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Titre  « Le paradoxe occidental » : comment peut-on proclamer la liberté et pratiquer l'esclavage ?1
Auteur Gérard Fritz
Mir@bel Revue Droit et cultures
Numéro no 70, novembre 2015 Esclavage et capitalisme mondialisé
Rubrique / Thématique
Dossier : Esclavage et capitalisme mondialisé
Page 43-64
Résumé Parmi les premiers Américains à rédiger des déclarations de droits affirmant le principe « naturel » de liberté, plus d'un étaient propriétaires d'esclaves. Ni eux ni leur entourage n'y virent un grand scandale. Si la contradiction ne fut pas perçue, on peut en trouver les raisons dans les philosophies sociale et politique de l'époque : un homme libre s'entendait comme un individu disposant d'une propriété. Les autres, confinés aux marges de la société devenaient une charge pour celle-ci ; il fallait simplement un pas de plus pour passer de «  l'encadrement des pauvres  » au maintien d'une certaine forme d'esclavage. Le mot choquait plus que la chose et c'est pourquoi si on condamna très vite la « traite », il fallut plus de temps pour abolir l'esclavage lui-même. Nul ne conteste ce grand pas dans les principes, mais il est effectué dans des systèmes sociaux qui n'ont pas rompu avec l'héritage idéologique de ce qu'on a appelé, à la suite de C. B. Macpherson, « l'individualisme possessif ». La structure sociale et économique se développant à partir des mêmes notions de base, on constate vite qu'après la célébration de l'abolition, d'autres situations sociales perdurèrent qui, à l'exception du mot, présentaient de nombreuses ressemblances avec l'esclavage ; au-delà de leurs particularités, toutes ces nouvelles manifestations du mal, qui prolifèrent et s'amplifient, sont regroupées sous l'appellation « d'esclavage moderne ». Le combat contre l'esclavage n'est donc pas une victoire du passé, mais toujours un combat de notre temps.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais Among the first Americans who were to write declarations of rights stating liberty as a basic natural right, some owned slaves and did not see the problem, nor did those who lived around. We nowadays are shocked by this inconsistency, but they were not and it is probably the result of the social and political philosophy predominant in those times, where a free man meant an individual disposing of some kind of property. Those who did not, had to live on the fringe of society with no (or very little) political participation in it; worse, they were a burden for the citizens who had to take them in charge as «poors» (which was just the last step before slavery and an easy one to take). Even if the word was not to be used, I was always possible to devise something very similar. There is no denying that abolition was necessary and an exigence of justice; even if we must not forget that the slave trade was abolished some decades before slavery itself, it is important to keep in mind that a society that rests on the root ideas of what C.B. Macpherson called «possessive individualism» is prone to elaborate new mechanisms of exploiting labor and repressing people, all of them giving birth to what is known as «modern slavery». The end of slavery is therefore not a victory of the pas but still a battle to be won.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://droitcultures.revues.org/3624