Titre | Réflexions sur la construction de l'identité de cadres industriels à l'épreuve de la mobilité internationale | |
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Auteur | Philippe Pierre | |
Revue | La Revue des Sciences de Gestion | |
Numéro | no 220-221, 2006 | |
Rubrique / Thématique | Apprentissages organisationnels |
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Page | 149-158 | |
Résumé |
La vie en entreprise est aujourd'hui marquée par ce constat tout simple : chacun, dans son activité quotidienne, découvre qu'il peut se situer aussi par rapport à d'autres cultures et plus seulement dans sa propre société nationale. Ainsi, à mesure que se diversifient pratiques d'expatriation et internationalisation de l'activité, les stratégies des firmes multinationales reposent de plus en plus sur des processus de socialisation de leurs membres qui cherchent à développer et renforcer une culture « globale » d'entreprise, sans mettre en péril les cultures des filiales locales. Les spécialistes parlent de management interculturel. Des fonctions d'« ambassadeur d'entreprise » sont assignées à une nouvelle génération de cadres internationaux dont la mission sera de jouer un rôle efficace d'interface entre siège et filiales, comme entre filiales elles-mêmes, une fois qu'ils seront bien « imprégnés » de la culture de l'entreprise comme des particularismes des différents marchés. Le processus par lequel ces cadres internationaux continuent à s'approprier l'esprit de la communauté à laquelle ils appartiennent et, en même temps, s'identifient à des rôles professionnels en apprenant à les jouer de manière personnelle et efficace, hors de leur contexte culturel d'origine, est un objet d'étude fécond mais peu étudié. Cette question a été le plus souvent évoquée en termes d'assimilation mécanique aux valeurs de l'entreprise, de ses dirigeants, ou de dualité identitaire insurmontable pour le salarié (le trop fameux « choc culturel »). Loin de cela, les modalités de socialisation des cadres internationaux d'Alpha illustrent un type d'intégration difficile et qui se manifeste en une multiplicité d'expériences vécues liées à l'international. Derrière l'immédiate « adhésion » réclamée par les instances dirigeantes, s'opère, au cours de la mobilité internationale, un travail réflexif entre la subjectivité du manager, son rapport à ses origines, et l'objectivité de ses rôles sociaux. A un niveau individuel, être un cadre international, c'est une manière particulière de vivre l'expérience en terre étrangère, ou plutôt, plusieurs manières de vivre des stratégies de l'identité liées à la manipulation de son ethnicité dans un contexte de forte mobilité géographique et fonctionnelle. Cet article démontre aussi que la socialisation des cadres internationaux ne se définit pas à travers une même culture mondiale ou transnationale des élites qui ferait disparaître les enracinements ethniques et les différences nationales. La « communauté », le registre des appar tenances ne disparaissent pas dans l'entreprise « mondialisée ». Ainsi, de plus en plus, les grandes entreprises possèdent la caractéristique de favoriser une multiplication d'espaces sociaux de référence dans lesquels les individus peuvent partiellement user de manière stratégique à travers la mise en place d'une mobilité sociale fondée sur la diversification des définitions de soi. Entretenant un rapport dynamique à leurs identifications ethniques et culturelles qu'ils cherchent à agencer en récit de vie, les cadres internationaux confirment qu'une des scènes premières de la sociologie de l'entreprise, est le contact de face-à-face avec cet autre avec lequel on est contraint de coopérer. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Résumé anglais |
Industry executives and international mobility : reflections on constructing an identity Today, company life is influenced by this simple observation : all individuals, in their daily activity, are discovering that they are able to position themselves with regard to other cultures and no longer simply within their own national society. Thus, as expatriation practices and business internationalisation diversify, the strategies of multinational firms increasingly rely on processes of socialising their employees, who are seeking to develop and reinforce a « global » company culture, without endangering the cultures of local subsidiaries. Specialists have coined the term « intercultural management ». The role of « company ambassador » is allocated to a new generation of international executives whose mission will be to play an effective role as interface between head office and its subsidiaries — and between the subsidiaries themselves — once they have been suitably « impregnated » with the company culture and the particular features of different markets. The process by which international executives continue to adopt the spirit of the community which they belong to and, at the same time, identify themselves with professional roles by learning to handle them in a personal and effective manner, outside the context of their culture of origin, is a fertile area of study which has not yet been explored to any great extent. This issue has most often been evoked in terms of the mechanical assimilation of company or management values, or in terms of the dual identity which employees are unable to overcome (the infamous « culture shock »). Far removed from this, the socialisation modes of Alpha international executives demonstrate a type of problematic integration, which is shown through a series of experiences linked to the international context. Underlying the immediate « adherence » demanded by managing bodies, a process of reflection takes place, during international mobility, which operates between the subjectivity of management, one's relationship with one's origins and the objectivity of one's social roles. At an individual level, being an international executive is a unique way of living the experience abroad, or rather, several different ways of experiencing identity strategies linked to the manipulation of one's ethnicity in a context of significant geographical and functional mobility. This article also demonstrates that the socialisation of international executives does not define itself through one single global or transnational elitist culture, which will eliminate ethnic roots and national differences. The « community », this set of affiliations, will not disappear in the « globalised » company. Hence, to an increasing extent, large companies can be characterised as favouring a multiplication of areas of social reference, which can partially be used in a strategic manner via the implementation of social mobility based on the diversification of definitions of oneself. Maintaining a dynamic relationship with their ethnic or cultural identifications which they seek to weave together as a life story, international executives confirm that one of the key aspects of business sociology is face to face contact with this « other » person with which one is obliged to cooperate. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Article en ligne | http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=RSG_220_0149 |