Titre | Proposition d'un modèle neurobiologique de l'addiction | |
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Auteur | Jean-Pol Tassin | |
Revue | Psychotropes : Revue internationale des toxicomanies et des addictions | |
Numéro | vol. 14, 2008/3-4 Qu'est-ce qu'une addiction ? | |
Rubrique / Thématique | Dossier thématique : Journée de la SERT-Marmottan : (19 mai 2008) |
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Page | 11-28 | |
Résumé |
L'une des tâches les plus difficiles en ce qui concerne la pharmacodépendance est de déterminer les modifications comportementales et neurochimiques induites à long terme par les drogues d'abus. L'intérêt de cette recherche viendrait, entre autres, de ce qu'il est probable que certaines de ces modifications aient des points communs avec celles apparaissant dans plusieurs troubles psychiatriques. Chez les rongeurs, les drogues d'abus déclenchent une hyperactivité locomotrice, et la répétition des injections augmente cette réponse. Cet effet, appelé sensibilisation comportementale, persiste plusieurs mois après la dernière prise, mimant en cela la sensibilité à long terme aux drogues d'abus observée chez les toxicomanes. Bien que les propriétés addictives des drogues d'abus soient généralement considérées comme dues à une augmentation de la libération de dopamine dans le noyau accumbens, des expériences pharmacologiques et génétiques récentes indiquent un rôle crucial des récepteurs α1b-adrénergiques dans les réponses comportementales et « récompensantes » aux opiacés et aux psychostimulants. Il vient aussi d'être démontré que les systèmes sérotoninergiques, par l'intermédiaire des récepteurs 5-HT2A, contrôlent les effets des drogues d'abus. Des expériences réalisées sur des animaux dépourvus soit de récepteurs α1b-adrénergiques soit de récepteurs 5-HT2A indiquent que, chez les souris sauvages, les neurones noradrénergiques et sérotoninergiques s'inhibent mutuellement lors de la stimulation de ces deux récepteurs et que ce couplage disparaît lors d'injections répétées de psychostimulants, d'opiacés ou d'alcool. Ce découplage noradrénaline/sérotonine conduit à une sensibilisation à long terme des neurones noradrénergiques et sérotoninergiques, modifiant ainsi la perception des événements extérieurs. Ce découplage apparaîtrait aussi lors de stress chroniques facilitant le développement de troubles mentaux. Reprendre de la drogue créerait un recouplage artificiel, apportant ainsi un soulagement temporaire. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Résumé anglais |
A challenge in drug dependence is to delineate long-term behavioral and neurochemical modifications induced by drugs of abuse. This task is interesting because such modifications may also occur in the course of different psychopathologies. In rodents, drugs of abuse induce locomotor hyperactivity, and repeating injections enhances this response. This effect, called behavioral sensitization, persists many months after the last administration, thus mimicking long-term sensitivity to drugs observed in human addicts. Although addictive properties of drugs of abuse are generally considered to be mediated by an increased release of dopamine in the ventral striatum, recent pharmacological and genetic experiments indicate an implication of α1b-adrenergic receptors in behavioral and rewarding responses to psychostimulants and opiates. Later on, it was shown that not only noradrenergic but also serotonergic systems, through 5-HT2A receptors, were controlling behavioral effects of drugs of abuse. More recently, experiments performed in animals knockout for α1b-adrenergic or 5-HT2A receptors indicated that noradrenergic and serotonergic neurons, besides their activating effects, inhibit each other by means of the stimulation of α1b-adrenergic and 5-HT2A receptors and that this mutual inhibition vanishes in wild type mice with repeated injections of psychostimulants, opiates or alcohol. Uncoupling induced by repeated treatments with drugs of abuse installs a stable sensitization of noradrenergic and serotonergic neurons, thus modifying perception of external stimuli. We propose that noradrenergic/serotonergic uncoupling is a common stable neurochemical consequence of repeated drugs of abuse which may also occur during chronic stressful situations and facilitate the onset of mental illness. Drug consumption would facilitate an artificial re-coupling of these neurons, thus bringing a temporary relief. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Article en ligne | http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=PSYT_143_0011 |