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Titre « Quand on va au juridique, c'est qu'on a déjà perdu » : Le droit comme contrainte dans les mobilisations syndicales
Auteur Baptiste Giraud
Mir@bel Revue Politix
Numéro vol. 30, no 118, 2017 Justice au travail
Rubrique / Thématique
Dossier : Justice au travail
Page 131-155
Résumé En dépit de la constitution d'un véritable savoir-faire militant dans l'usage du droit au sein des organisations syndicales, une partie de leurs militants continue d'entretenir un rapport critique et ambivalent à l'action en justice. Beaucoup n'envisagent cette modalité d'action que comme une arme de dernier recours, pour des raisons liées à des contraintes d'ordre tout à la fois juridique, organisationnel et stratégique. Cet article s'appuie sur une enquête ethnographique menée auprès de militants d'une structure syndicale territoriale de la CGT dans le secteur du commerce et des services. L'étude de son fonctionnement permet d'abord de mettre en évidence le rôle d'intermédiation fondamentalement ambigu que joue cet espace syndical dans les modalités de saisine de l'arme du droit par ses adhérents. Le soutien apporté aux adhérents pour régler leurs problèmes juridiques constitue une activité centrale des dirigeants de cette structure syndicale. La prise en charge des plaintes des adhérents passe cependant par l'apprentissage et par la mise en œuvre de stratégies d'évitement du recours à la justice, afin de privilégier des formes plus militantes de résolution des litiges, jugées plus efficaces pour faire valoir leurs droits et plus cohérentes avec les principes militants de l'organisation. Dans un second temps est étudié un long mouvement de grève révélateur des stratégies juridiques à la disposition des directions en situation de grève pour contenir la mobilisation, et des difficultés que les militants syndicaux peuvent a contrario rencontrer pour concilier le recours à l'action juridique avec l'organisation d'une grève. Cet article vise ainsi à rendre compte tout à la fois de certaines limites de la judiciarisation des stratégies syndicales et de la diversité des conditions dans lesquelles les conflits du travail en viennent à se prolonger dans l'arène judiciaire.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais Despite the development of considerable activist experience in the use of Law, many trade-union activists remain ambivalent about the relevance of legal action. They consider it as a last-resort, both for legal, organizational and strategic reasons. We explore this issue using an ethnographic survey conducted among activists from a local structure of the Confédération Générale du Travail (CGT). The first results highlight how trade unions have an ambiguous effect as intermediation spaces on the recourse to legal action by its members. Legal counseling and legal support to members, as well as legal training for unions' local representatives, has indeed become a central activity for the leaders of the organization, and an opportunity to recruit new members and to support their militant action. Yet, legal activities and recourse to justice are mitigated by a widespread preference for more militant methods of industrial conflict, thought to be more effective and aligned with the values of the organization. In a second step of the analysis, we study a long strike movement, which highlights the legal strategies developed by employers to contain strikes, but also the difficulties met by trade-unionists in conjointly leading legal action and the organization of strikes. To conclude, this article accounts for a number of limits in the “judicialization” of trade union strategies, and for the diversity of conditions upon which a judicialization of labor disputes may indeed happen.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=POX_118_0131