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Titre Terres et eaux entre coutume, police et droit au xixe siècle. Solidarisme écologique ou solidarités matérielles ?
Auteur Alice Ingold
Mir@bel Revue Tracés
Numéro no 33, 2017/2 Revenir à la terre ?
Rubrique / Thématique
Articles
Page 97-126
Résumé La notion de solidarité écologique a été avancée pour défendre un nouveau rapport entre humains et non-humains, reconsidérant la ligne de partage entre sujets et objets qui a constitué l'armature de l'ordre juridique propriétaire moderne. En formulant une solidarité écologique sous la forme idéale d'un solidarisme, ce débat est redevable d'un système qui place la représentation politique en tiers entre humains et non-humains. Cette enquête historienne propose d'observer des formes alternatives de solidarités écologiques, qui ne s'ancrent pas dans la volonté ni dans la représentation, mais qui s'enracinent dans des formes matérielles, inscrites dans les choses. C'est au travers du gouvernement des eaux après 1789 que s'observent ces solidarités matérielles à l'œuvre dans des d'institutions locales originales : les associations territoriales de propriétaires qui se sont maintenues au-delà de la rupture révolutionnaire. Des droits ont ainsi été reconnus comme attachés non aux personnes mais aux terres. Les commoners de ces institutions collectives n'étaient pas les hommes mais les terres elles-mêmes. Ces associations ont servi d'exemple phare dans la littérature sur les communs, à la suite d'Elinor Ostrom et ont été vues comme des exemples de réussite de gestion d'une ressource : Ostrom les a décrites comme des « alternatives empiriques » à la « tragédie de communs ». Loin du modèle propriétaire qui s'est imposé au xixe siècle, qui place la volonté au cœur du régime de territorialité moderne, cette enquête fait apparaître une image inverse du rapport de l'homme à la nature : à l'opposé d'un homme maître absolu sur ses terres, ces institutions rappellent la position de l'homme comme un obligé, inscrit à la fois dans une chaîne de générations et comme une sorte d'hôte d'un système écologique et social qui lui préexiste.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais « Ecological solidarity » has been promoted as a conceptual tool for rethinking ecological and social interdependence and for sketching new relations between humans and non-humans. In so doing, the promotors of the notion challenge the division between subjects and objects which structures the juridical architecture of our modern legal and property order. Ecological solidarity is a multidimensional phenomenon: it is based on the recognition of the interdependences between natural organisms and their physical environment, but it also tends to express a political sense of solidarity (solidarisme) that gives humans the responsibility to become representatives or spokespersons for non-humans. This paper sets out to demonstrate that other forms of ecological solidarity have historically existed, that were neither based on the will of individuals nor on political representation, but were rooted in material forms inscribed in things. Such material solidarities are best observed in the management of water in France after 1789: local institutions, namely associations of private owners that outlived the Revolution, granted rights to pieces of land rather than human subjects; the commoners of these water associations were not humans but pieces of land. Such institutions occupy a privileged place in Ostrom's literature, where they are presented as integral to any lasting management success for land and resources by local or regional communities: Ostrom described them as “empirical alternatives” to the “Tragedy of the Commons.” Distancing itself from the property system imposed during the nineteenth century, which put the subject's will at the heart of the relation between man and land, this historical inquiry shows a reverse image of the relation between man and nature. Contrary to man's traditional representation as master and possessor of nature, the inquiry shows that human actors inscribed themselves within a generational chain and can be viewed as heirs and guests of a previous ecological and social system.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://traces.revues.org/7011