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Titre Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. A propos du cente­naire du Congrès international de droit comparé de Paris
Auteur Christophe Jamin
Mir@bel Revue Revue internationale de droit comparé
Numéro vol. 52, no. 4, 2000
Rubrique / Thématique
DROIT COMPARÉ : HISTOIRE ET MÉTHODES
Page 733-751
Résumé Saleilles et Lambert contribuent à la critique virulente de la doctrine exégétique à la fin du XIXe siècle. Ils tentent de lui substituer une nouvelle méthode qui s'affranchisse de la seule lecture des textes. Saleilles la trouve dans ce qu'il appelle la méthode historique dont le droit comparé, destiné à pénétrer et vivifier l'évolution du droit national, constitue l'un des aspects. Lambert est plus ambitieux : il voit dans l'étude du droit comparé un véritable substitut à la libre recherche scientifique défendue par Gény. La recherche d'un droit commun législatif qui dépasse les seules frontières nationales est pour lui le seul moyen de parvenir à dégager des solutions objectivement justes. L'étude du droit comparé est ainsi mobilisée au service d'une véritable révolution méthodologique qui a pour effet de façonner durablement une théorie des sources du droit en train de se constituer, car la doctrine est désormais la seule en mesure de réaliser des constructions juridiques suffisamment élaborées susceptibles d'intégrer l'étude des droits étrangers qu'il s'agit de regrouper en familles homogènes. Au moment où la doctrine adopte une posture modeste, en refusant d'être qualifiée de source du droit, elle devient donc la principale source d'inspiration du législateur et du juge, qui trouveront dans ses constructions des principes certains de solutions que les textes seuls ne sont plus en mesure de fournir. L'invention du droit comparé moderne au début du XXe siècle devient ainsi un instrument de prise du pouvoir doctrinal.
Résumé anglais Saleilles and Lambert tookpart in the scathing criticism ofthe classical exegetic method (Ecole de l'Exegese) at the end of the 19h Century. They tried to replace its doctrine by a new method that would not be limited to the sole interpretation of legislation. Saleilles discovered it in what he called the historical method (la methode historique) of which comparative law, intended to penetrate and invigorate the evolution of national law, represented one aspect. Lambert was more ambitious : in his view, the study of comparative law was a genuine surrogate to the free and objective search for a rule (la libre recherche scientifique), the method advocated by Geny. Searchingfor a generally applicable legislative set of rules which extended beyond strict national boundaries was, in his opinion, the only way to discern objectively fair solutions. So the study of comparative law was summoned in support of a real methodological revolution which, in the resuit, was to shape durably the then emerging theory of sources of law. From now on, learned authors were able to build up legal constructs (constructions juridiques) sufftciently sophisticated to incorporate the study of foreign laws, which would now be taxonimised into homogeneous classes. Accordingly, at the same time learned authors (la doctrine) tended to assume a self-effacing position by declining to be called a source of law, their theories were becoming the main source of inspiration for lawmakers and judges who saw in them determinate problem-solving principles no longer to be found in legislation alone. The invention of modem comparative law at the beginning of the 2(fh Century thus served as an instrument in laying the foundations of the authors' hegemony.
Article en ligne http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_2000_num_52_4_18626