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Titre "Comptabilité, discipline et finances publiques : une expérience d'introduction de la partie double sous la Régence".
Auteur Yannick Lemarchand
Mir@bel Revue Politiques et management public
Numéro vol. 18, no 2, juin 2000
Mots-clés (géographie)France
Mots-clés (matière)histoire histoire des faits économiques histoire des idées monarchie politique financière réglementation richesse système financier
Résumé Sous l'Ancien-Régime, la collecte des impôts était une affaire privée des plus fructueuses. Utilisant les recettes fiscales, les receveurs généraux consentaient au roi de coûteuses avances. Le prétendu retard des recouvrements justifiait celui des versements et l'État payait des intérêts sur ses propres deniers. En 1716, afin d'accélérer les rentrées du Trésor et de diminuer la charge d'intérêt, le gouvernement introduisit une réforme reposant sur une intéressante innovation technique : l'utilisation de la partie double pour le contrôle des receveurs. L'expérience fut progressivement étendue aux divers secteurs de la finance, mais cette nouvelle organisation se heurta rapidement à l'hostilité affichée des financiers. Ces efforts de rationalisation furent interrompus en 1726. Les quatre frères Paris, qui avaient été les promoteurs de ces réformes, furent éloignés des finances et l'on supprima la quasi totalité des contrôles qu'ils avaient instaurés. Par delà le récit de ces événements, cette étude tente d'en apprécier la signification. L'intérêt de cette modification des méthodes comptables dépasse les aspects purement techniques, car il accompagne un changement organisationnel fondamental. Les frères Paris tentèrent de remplacer un ensemble de relations contractuelles décentralisées par une administration bureaucratique centralisée, en concevant la comptabilité comme un instrument de contrôle particulièrement sophistiqué, susceptible de modifier le comportement des financiers. On peut donc voir dans cette expérience l'une des multiples manifestations de l'émergence des disciplines au XVIIIe siècle, telles qu'analysées par Foucault. Elle préfigure les dispositifs qui seront mis en place, à partir de la fin du siècle, dans les finances françaises, et elle relève de cette ambition d'un gouvernement scientifique que partage l'Europe des Lumières. Les écrits des Paris sont d'ailleurs à ranger parmi les premières expressions d'une réflexion que l'on désignera bientôt comme la 'science de l'administration".
Source : Éditeur (via Persée)
Article en ligne https://www.persee.fr/doc/pomap_0758-1726_2000_num_18_2_2628