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Revue | Politiques et management public |
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Numéro | vol. 18, no 2, juin 2000 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- "Un néo-libéralisme centralisateur - Les collectivités locales dans la libéralisation du système de distribution électrique français. - François-Mathieu Poupeau L'ouverture à la concurrence du marché français de l'électricité suscite aujourd'hui de nombreuses interrogations quant à la place que la puissance publique va occuper dans le futur paysage institutionnel. Alors que la plupart des travaux s'interrogent sur la façon dont l'Etat fait l'apprentissage de ses nouvelles fonctions de régulateur, cet article se penche sur la dimension territoriale des recompositions actuelles. Il précise quels sont les enjeux des transformations du point de vue des relations entre l'Etat et les collectivités locales, qui jouissent du statut d'autorités concédantes de la distribution d'électricité. Il montre que, si le néo-libéralisme remet en question le caractère centralisé de l'organisation du secteur, il n'est pas pour autant synonyme de décentralisation politique. Pour le moment, au contraire, le nouveau cadre d'action publique cantonne le pouvoir local à un rôle secondaire, complémentaire à celui de l'Etat et des instances communautaires.
- "Les politiques de développement technologique : contenu, organisation et évaluation de la fonction d'intermédiation technologique". - Cécile Clergeau Depuis les lois de décentralisation de 1982, les pouvoirs publics locaux doivent assurer un rôle d'intermédiation entre les entreprises et les pôles d'innovation technologique (laboratoires, universités, etc.). Les modalités de cette intermédiation ont évolué depuis 15 ans et se sont complexifiées. C'est dans ce cadre que l'évaluation de l'action d'une agence régionale de développement technologique (ARDT) a été menée en Pays de la Loire. Nous montrons que l'intermédiation réalisée par cette agence se situe sur un continuum dont les deux extrémités sont l'intermédiation acteur et l'intermédiation réseau. Se pose alors le problème de la cohérence entre la politique publique et le mode d'intermédiation ainsi que celui de l'évaluation des actions mises en place.
- "Responsabilisation des acteurs dans les hôpitaux publics français et management : analyse des dernières réformes juridiques. - Sandrine Cueille Cet article analyse les dernières réformes juridiques concernant les établissements hospitaliers publics français comme une réponse aux problèmes d'asymétrie d'information entre le décideur de la politique de santé publique (l'Etat) et les établissements qui doivent la mettre en œuvre (les hôpitaux). En effet, cette asymétrie d'information, qui porte sur la qualité des prestations et leurs coûts réels, associée à des intérêts parfois divergents entre acteurs du système de santé publique, conduit à des situations d'aléa moral et d 'antisélection. Nous montrons que l'Ordonnance d'avril 1996, en particulier, permet d'instaurer des mécanismes d'incitation et de révélation de l'information théoriquement susceptibles de résoudre ces problèmes. Pour ce faire, elle s'appuie sur une plus grande responsabilisation des acteurs hospitaliers. Les réformes mises en œuvre pourraient alors conduire à un renforcement du management dans le secteur hospitalier public et contribuer au développement de pratiques de gestion d'inspiration nouvelle.
- "Pouvoir discrétionnaire et choix stratégiques du juge administratif : une analyse économique du gouvernement des juges. - Sophie Harnay La décision du juge administratif s'inscrit à l'intérieur d'une hiérarchie des normes constituée parles règles produites par les décideurs politiques et les juges supérieurs. On utilise un modèle de théorie des jeux en information complète et parfaite afin d'analyser la concurrence entre producteurs de règles. Dans ce cadre d'analyse, les joueurs adoptent des comportements stratégiques en fonction des structures institutionnelles auxquelles ils sont confrontés et de l'ordre des coups. En particulier, le juge de premier ressort adapte sa décision à la forme d'annulation qui le menace en priorité, veto politique ou procédure d'appel. C'est dans ce contexte que sont analysés les mécanismes de cassation et de contrôle de constitutionnalité.
- "Comptabilité, discipline et finances publiques : une expérience d'introduction de la partie double sous la Régence". - Yannick Lemarchand Sous l'Ancien-Régime, la collecte des impôts était une affaire privée des plus fructueuses. Utilisant les recettes fiscales, les receveurs généraux consentaient au roi de coûteuses avances. Le prétendu retard des recouvrements justifiait celui des versements et l'État payait des intérêts sur ses propres deniers. En 1716, afin d'accélérer les rentrées du Trésor et de diminuer la charge d'intérêt, le gouvernement introduisit une réforme reposant sur une intéressante innovation technique : l'utilisation de la partie double pour le contrôle des receveurs. L'expérience fut progressivement étendue aux divers secteurs de la finance, mais cette nouvelle organisation se heurta rapidement à l'hostilité affichée des financiers. Ces efforts de rationalisation furent interrompus en 1726. Les quatre frères Paris, qui avaient été les promoteurs de ces réformes, furent éloignés des finances et l'on supprima la quasi totalité des contrôles qu'ils avaient instaurés. Par delà le récit de ces événements, cette étude tente d'en apprécier la signification. L'intérêt de cette modification des méthodes comptables dépasse les aspects purement techniques, car il accompagne un changement organisationnel fondamental. Les frères Paris tentèrent de remplacer un ensemble de relations contractuelles décentralisées par une administration bureaucratique centralisée, en concevant la comptabilité comme un instrument de contrôle particulièrement sophistiqué, susceptible de modifier le comportement des financiers. On peut donc voir dans cette expérience l'une des multiples manifestations de l'émergence des disciplines au XVIIIe siècle, telles qu'analysées par Foucault. Elle préfigure les dispositifs qui seront mis en place, à partir de la fin du siècle, dans les finances françaises, et elle relève de cette ambition d'un gouvernement scientifique que partage l'Europe des Lumières. Les écrits des Paris sont d'ailleurs à ranger parmi les premières expressions d'une réflexion que l'on désignera bientôt comme la 'science de l'administration".
- Quand la permanence fait le changement. Coalitions et transformations de la politique du logement". - Philippe Zittoun La plupart des recherches qui s'intéressent à la question du changement dans les politiques publiques se focalisent généralement sur les moments de réforme ou sur les périodes de crise pour décortiquer les processus en œuvre. L'étude de la politique du logement, de la réforme de 1977 au milieu des années 1990, permet de montrer que réforme et changement ne sont pas toujours synonymes. Si la réforme de la politique du logement reflète bien la volonté d'une coalition dominée de prendre le pouvoir et d'imposer un changement radical de politique publique, elle est aussi l'occasion pour la coalition dominante de regrouper ses forces pour empêcher tout changement. A l'inverse, les périodes plus calmes qui succèdent à la réforme sont l'occasion de divisions et de scissions d'une coalition moins soudée, divisions qui ouvrent la voie à des changements importants.