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Titre La leçon d'humanité de Gino
Auteur Michel Callon, Vololona Rabeharisoa
Mir@bel Revue Réseaux (communication - technologie - société)
Numéro vol.17, no 94, mars-juin 1999 Sciences, malades et espace public no 95 juillet-août
Rubrique / Thématique
Dossier : Science, malades et espace public
Page 197-233
Résumé Les récentes recherches consacrées aux maladies génétiques ont participé à la construction d'arènes publiques où se discutent des choix qui engagent la vie privée. L'identification des gènes responsables de certaines maladies graves, la mise au point de tests permettant d'identifier les individus porteurs de ces gènes ont en effet contribué à placer les individus concernés devant des décisions morales qui sont d'autant plus incontournables que les savoirs et les techniques disponibles sont largement répandus et diffusés. Cet article, qui considère la situation d'entretien comme un dispositif de construction d'une arène publique, présente le cas d'un malade réunionnais, atteint de dystrophie des ceintures, qui refuse de comprendre les leçons de la génétique et de s'intégrer aux réseaux médicaux et associatifs qui mettent en œuvre et diffusent ces connaissances. Ce refus met en évidence le dilemme auquel est confronté ce malade : participer à l'espace public mais en accepter les contraintes ; refuser d'y entrer mais courir le risque de n'être pas considéré comme un sujet autonome, libre et responsable. En utilisant les définitions de l'humanité et de la moralité présentées par François Julien dans son commentaire de Mencius, les auteurs proposent de considérer que le refus d'entrer dans l'espace public correspond au choix d'une autre forme d'humanité. A titre programmatique, quelques enseignements sur le rôle possible des sciences sociales dans la (dé)construction de l'espace public sont suggérés.
Résumé anglais Recent research on genetic diseases has contributed towards the construction of public arenas in which choices involving people's private lives are discussed. The identification of genes responsible for certain serious diseases and the development of tests to identify people carrying these genes have helped to put the individuals concerned in front of moral decisions. This has happened at a time when such decisions have become increasingly unavoidable as available know-how and technology are diffused. This article, which considers the interview as a tool in the construction of a public arena, presents the case of a patient from the island of Reunion. This patient, suffering from limb-girdle muscular dystrophy, refuses to learn the lessons of genetics and to become part of the medical and associative networks that implement and disseminate this knowledge. His refusal highlights his dilemma: either he participates in the public sphere but also accepts its constraints, or he refuses to enter it but risks not being considered as a free and responsible subject. Using the definitions of humanity and morality presented by François Julien in his comments on Mencius, the authors suggest that the refusal to enter the public sphere corresponds to the choice of another form of humanity. For future research, they also suggest conclusions on the possible role of the social sciences in the (de)construction of the public sphere.
Article en ligne https://www.persee.fr/doc/reso_0751-7971_1999_num_17_95_2159