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Titre La corvée lors du creusement de l'isthme : Guerre des discours et représentation romanesque
Auteur May Farouk
Mir@bel Revue Sociétés & Représentations
Numéro no 48, 2019 Les imaginaires du canal de Suez
Rubrique / Thématique
Enjeux idéologiques et discours de domination
Page 143-155
Résumé Pratique ancestrale exercée depuis l'Antiquité, la corvée joua, lors du creusement du canal de Suez, un rôle fondamental que la légende dorée du canal – à bien des égards – tend à minimiser, sinon à occulter. De ce projet pharaonique qui révolutionna la navigation mondiale, une mémoire idéalisante retient, en effet, moins le sacrifice de milliers de fellahs mobilisés sur les chantiers que le génie diplomatique des principaux acteurs (Lesseps, Saïd pacha, Ismaïl pacha, la Compagnie du Canal...) vantant ainsi l'union sacrée des deux mers qui venait de sceller le mariage mythique de l'Orient et de l'Occident. Or, c'est précisément le revers de la médaille, à savoir l'envoi à la corvée de milliers d'ouvriers égyptiens dans des conditions très précaires que nous souhaitons examiner. Un premier détour par l'histoire nous permettra de cerner comment, dans le cadre du percement de l'isthme, la corvée devient un enjeu polémique et géopolitique de taille. Et ce, avant de démonter les rouages d'une guerre des discours qui s'acharne à légitimer la corvée ou au contraire à la condamner dans un élan humaniste qui dissimule mal sa duplicité. Pour illustrer ce processus d'instrumentalisation de la corvée dans le discours propagandiste de l'époque, nous retiendrons notamment les retentissements médiatiques provoqués par la note turque qui stipule, parmi les conditions à la poursuite du creusement, l'arrêt de la corvée sur les chantiers. Enfin, nous tenterons d'analyser comment, en empathie avec les souffrances endurées par les fellahs, des écrivains comme Edmond About dans Le fellah (1869) et Erckmann-Chatrian dans Souvenirs d'un ancien chef de chantier à l'isthmede Suez (1877) ont représenté ce drame humain.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais The forced Labour during the Isthmus Digging: War of Speeches and Novelistic Representation
Ancestral legacy practiced since ancient times, the forced labour played, during the Suez Canal digging, a fundamental role that the canal golden legend – in many ways – tends to minimize, if not to obscure. This pharaonic project that revolutionized the world navigation, retains in fact less the sacrifice of thousands of fellahs mobilized on construction sites than the diplomatic genius of the main actors (Lesseps, Said Pasha, Ismail Pasha, the Canal Company...) praising up the sacred union of the two seas which had just sealed the mythical marriage of East and West. But it is precisely the other side of the coin, namely the forced labor of thousands of Egyptian peasants in very precarious conditions, that we wish to examine. A first detour through history will allow us to understand how, in the context of the Isthmus piercing, the forced labour becomes a controversial stake and gains a large geopolitical width. And this, before dismantling the wheels of a war of speeches that strives to legitimize the forced labour or on the contrary to condemn it in a humanistic drive that does not hide its duplicity. The Turkish note which stipulates, among the conditions for the digging works continuation, the stopping of the unfree labour on the sites, is part of the contemporary propaganda discourse. Finally, we will try to analyze how, in empathy with the sufferings endured by the fellahs, writers like Edmond About in The Fellah (1869) and Erckmann-Chatrian in Memories of a Former Construction Site Director in the SuezIsthmus (1877) have represented this human drama.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=SR_048_0143