Titre | « Captations d'héritages » : les enjeux juridiques et judiciaires d'un combat anticlérical (France, 1880-1905) | |
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Auteur | Inès Anrich | |
Revue | Revue historique | |
Numéro | no 698, avril 2021 | |
Page | 365-386 | |
Résumé |
Pendant l'âge d'or de la « République anticléricale » (1880-1905), le clergé français est régulièrement accusé de captation d'héritage, un motif qui n'a pas été étudié par l'historiographie de l'anticléricalisme, pourtant foisonnante. Ce terme désigne les manœuvres déployées par les clercs pour faire main basse sur la fortune de certains catholiques, tout particulièrement les malades et les vieillards. Il constitue le moyen d'une attaque en règle contre la générosité pieuse. Bien qu'utilisées dans la presse pour désigner des procès intentés par des héritiers, à des membres du clergé ayant reçu un don ou legs, de la part de leur parent défunt, les captations d'héritages ne correspondent pas vraiment à une catégorie juridique. Elles n'ont dans le Code civil qu'une acception restreinte, tandis que de nombreuses dispositions dérogatoires encadrent et limitent la générosité pieuse. Trois affaires passées devant les tribunaux civils entre 1880 et 1905 montrent que si les héritiers s'estimant lésés s'efforcent de prouver qu'il y a bien eu captation d'héritage, les juges écartent ce motif. Ils décident d'annuler les donations litigieuses en appliquant le régime d'exception juridique qui encadre les dons et legs au clergé. Cela n'empêche la presse de désigner ces affaires comme des captations d'héritages, en leur appliquant une grille de lecture anticléricale et fictionnalisante. Ce motif imprègne ainsi l'imaginaire social, au point d'influencer le comportement des héritiers qui attaquent en justice certains membres du clergé, et, dans un cas, celui des magistrats chargés de rédiger le jugement, alors pétri par l'imaginaire anticlérical. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Résumé anglais |
During the golden age of the « anticlerical Republic » (1880-1905), the French clergy was frequently accused of heritage captation, a pattern that was never studied by the historiography of anticlericalism, in spite of its dynamism. This expression defined the tactics used by clergymen in order to steal some Catholics' fortune, especially the sick and the old. This category was a means of attacking pious generosity. The press used it in order to describe trials initiated by heirs to priests who had received a gift or a bequest from their deceased relative. But heritage captation was not really a legal category. In the Code civil, they had a limited signification, but many derogatory dispositions limited pious generosity. Three cases jugged by civil courts between 1880 and 1905 show that the heirs who felt prejudiced tried to prove that there had been a captation, but the judges refused that argumentation. They decided to cancel the litigious donations by using the derogatory regime around gifts and bequests to the clergy. It did not prevent the press from calling these cases heritage captation, by applying an anticlerical and fictionalising frame of analysis. This pattern shaped the anticlerical imaginary as to influencing the behaviour of heirs attacking some clergymen in court. In one case, it also influenced the judges in charge of redacting a judgement that appears to be highly anticlerical. Source : Éditeur (via Cairn.info) |
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Article en ligne | http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=RHIS_212_0365 (accès réservé) |