Titre | Numéritocratie | |
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Auteur | Isabelle BRUNO, Lucie POPHILLAT | |
Revue | Terrain | |
Numéro | Hors-série, juin 2021 Bureaucratie sublime | |
Rubrique / Thématique | MATRICES |
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Page | 136-147 | |
Résumé |
Parcoursup : la « règle d'airain du libéralisme » de David Graeber à l'œuvre. Toute action gouvernementale visant à améliorer l'efficacité d'une organisation signifie nécessairement plus de procédures, plus de confusion, plus de place pour les erreurs. Comme le montrent Isabelle Bruno et Lucie Pophillat, Parcoursup a franchi un nouveau seuil du sublime bureaucratique : la technocratie algorithmique transforme « la dure chape d'acier » de Max Weber en une matrice qui s'étend de façon oppressive. Son langage est hermétique – tout en revendiquant la transparence –, ses grilles sont réductrices et ses injonctions contradictoires. Ajoutez à cela le paramètre de la pression temporelle : 3, 2, 1, GO ! La turbo-bureaucratie produit un parcours d'orientation et d'obstacles infernal. Les étudiants comme les enseignants font un dur travail d'imagination pour comprendre les opérations de base de cette infrastructure technique ultra-opaque. Que veut-elle ? Trouvez-le. Plus vite que ça. Le mécanisme est censé juger les élèves à leur juste valeur, une valeur calculée à la virgule près. Il nous enjoint à y croire. Parcoursup fonctionne à l'adhésion, à la complicité. Les participants, de tous côtés de l'interface, jouent le jeu comme si la technocratie réalisait la méritocratie. Mais dans la machine, ce n'est pas l'Homo meritocratus mais l'Homo numéritocraticus qui prend forme. Les images de Lucie Pophillat nous entraînent dans le monde affectif de cette course effrénée, de plus en plus confinée et désorientée. Des manicules semblent indiquer le chemin. À moins, bien sûr, qu'elles n'entraînent sur de fausses pistes. Chapô : EMMANUEL GRIMAUD & ANTHONY STAVRIANAKIS Source : Éditeur (via OpenEdition Journals) |
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Article en ligne | http://journals.openedition.org/terrain/21889 |