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Titre « Remettre la vie parmi nous ». Expériences de la faim et organisation paysanne dans le Bas Nord-Ouest haïtien
Auteur Flore Dazet
Mir@bel Revue Tracés
Numéro no 41, 2021/2 Batailles de la faim
Rubrique / Thématique
Articles
Page 45-64
Résumé Dans le département rural du Bas Nord-Ouest haïtien, les habitants parlent sans cesse du problème du grangou (la faim) : évoquant l'image d'une zone agricole qui ne produit plus, les paysans disent manquer de tout et ne plus pouvoir vivre. La faim apparaît comme l'expression générale et indéterminée d'un « rien ne va ». À travers des formes d'organisation collective, les habitants tentent de rendre la situation intelligible et tangible, de manière à pouvoir agir sur elle. C'est ce que nous appelons, en nous inspirant de la pensée de John Dewey, un processus de reconstruction de l'expérience. Les ONG présentes dans le département pourraient s'avérer un levier dans ce processus. Cependant, si les perspectives des ONG ne diffèrent pas sensiblement de celles des populations sur la nature problématique de la situation, les manques qui la caractérisent ou les fins à poursuivre, elles divergent en ce qui concerne la signification de l'action et l'agencéité des habitants. Nous cherchons à montrer ici que la conception de l'action promue par les ONG, de type behaviouriste ou comportemental, est un « arrière-plan d'intelligibilité » qui contraint implicitement leur manière de percevoir les situations, les amenant à disqualifier les actions des paysans, à nier leur agencéité – à la fois pratique et normative – et finalement à les priver des moyens nécessaires à la reconstruction d'une expérience publique.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais In the rural department of lower North-West Haiti, the inhabitants constantly talk about the problem of grangou (hunger): Evoking the image of an agricultural area that no longer produces anything, the farmers say they suffer all kinds of shortages and can no longer make a living. Hunger appears as a general and indeterminate expression of “nothing working”. Through forms of collective organisation, the inhabitants try to make the situation intelligible and tangible, to be able to act on it. This is what we call, inspired by the ideas of John Dewey, a process of reconstruction of experience. The NGOs present in the department could prove to be a lever in this process. However, while the perspectives of the NGOs do not differ significantly from those of the peasants on the problematic nature of the situation, the shortcomings that characterise it, or the ends to be pursued, they do diverge with respect to the meaning of action and agency of the inhabitants. Here we seek to show that the behaviourist conception of action promoted by NGOs is a “background of intelligibility” that implicitly constrains their way of perceiving situations, leading them to disqualify farmers' actions, to deny their agency – both practical and normative – and finally to deprive them of the means necessary for the reconstruction of a public experience.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://journals.openedition.org/traces/12625