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Titre Discours radiophoniques, cartographies épidémiques et représentations locales de la COVID-19 en Guinée
Auteur Fanny Attas, Moustapha Keïta-Diop, Marie-Yvonne Curtis, Frédéric Le Marcis
Mir@bel Revue L'Espace Politique
Numéro no 44, 2021/2 L'Afrique à l'épreuve de la pandémie de Covid-19 + Varia
Rubrique / Thématique
L'Afrique à l'épreuve de la pandémie de Covid-19
Résumé Avec la COVID-19, faute de pouvoir mener des ethnographies classiques, les enquêtes réalisées via l'internet, le téléphone ou les réseaux sociaux ont participé à exclure de la production des connaissances un large pan de la population africaine qui souffre de la fracture numérique et/ou d'analphabétisme. Le présent article comble ce vide en analysant les discours populaires sur l'épidémie via les radios émettant en langues nationales en Guinée et au travers de données ethnographiques recueillies dans les régions de Conakry, Mamou et Forécariah par des chercheurs guinéens et français auprès d'agents de santé et de la population, de mars 2020 à décembre 2021. Les discours populaires ont été recueillis en français, sosoxui (Basse-Côte), pulaar (Moyenne Guinée), kissiye et kpɛlɛɛwoo (région forestière), et maninkakan (Haute-Guinée). Ils mettent en avant une crainte initiale de la contamination puis une altérisation et un discrédit de la maladie, témoignant d'un désengagement cognitif et pratique des Guinéens face à la COVID-19 au cours de l'épidémie. La diffusion massive d'informations sur la COVID-19 a conduit la population à d'abord s'approprier les mesures de protection contre l'épidémie, le souvenir d'Ebola jouant un rôle majeur. Mais, lorsque le temps épidémique s'est confondu avec le processus électoral controversé de 2020, la portée politique de la réponse et le nombre réduit de cas enregistrés ont mené à une résistance populaire croissante contre les mesures de restriction (confinement, port du masque). Le virus est apparu comme exogène et ne concernant que les élites nationales et les populations des pays du Nord. L'imaginaire de l'épidémie, alimenté par le traumatisme d'Ebola, s'est nourri du registre de la coercition : désormais « épidémie tournevis », la COVID-19 en Guinée apparaît pour la majorité silencieuse de la population comme la reproduction du rapport inégal qui la lie à ses élites, comme la Guinée au reste du monde.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais If COVID-19 epidemics confirmed social sciences' interest for the study of social media (Lee Hugues et Pale, 2009) and infodemic (Vosoughi et alii, 2018) in epidemic contexts, it also excluded a large part of the population still important in Africa from the production of knowledge: those who cannot access internet because of lack of connection and/or illiteracy. This paper fills this gap by analyzing local representations of COVID-19, drawing on the longitudinal study of radiophonic discourses in national languages and face-to-face ethnography led by anthropologists among the population. It examines how COVID-19 was appropriated and interpreted by Guinean population through the mobilization of epidemic, political and historic local experiences. It also considers how the evolution of local representations of the pandemics, over time and over political and economic perturbations, illustrates a progressive cognitive and practical lack of public interest in the virus. To do so, radio shows in national languages including participation from the public on COVID-19 topic were systematically recorded, transcribed and translated in French from March to August 2021. National languages included sosoxui for Basse-Côte, pulaar for Moyenne Guinée, kissiye and kpɛlɛɛwoo for the Forest region, and maninkakan for Haute-Guinée. Long-term participant observation and face-to-face interviews were led in the cities of Conakry and Mamou, and in the rural areas of Forécariah from May 2020 to December 2021 among health professionals and general population. These data were analysed thematically and chronologically to examine how the epidemics was discussed and the restriction measures commented by the population through time. From March to May 2020, the massive diffusion of information about COVID-19, both at international and national level, led the Guinean to take ownership of the protection measures against the epidemic – the traumatic memory of Ebola playing a major role. However, as the epidemic event merged with the 2020 controversial electoral process, local populations began to question the relevance of the epidemic management policies and restriction measures. The reduced number of positive cases led to a trivialization of COVID-19 and to a rising popular resistance against restriction measures such as confinement and wearing a mask. The virus appeared exogenous and concerning only national elites and populations of Northern countries. The representation of the epidemic, first powered by the trauma of Ebola, rapidly turned to the register of coercion: now called the “Screwdriver epidemic”, COVID-19 in Guinea appears for the local populations as the reproduction of the unequal relation binding them to their elites, as Guinea is bound to the rest of the world.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://journals.openedition.org/espacepolitique/10007