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Titre La distinction entre torture ordinaire et extraordinaire : Une modulation de la douleur judiciaire en France (XVIe-xviiie siècles)
Auteur Cyrielle Chamot
Mir@bel Revue Droit et cultures
Numéro no 82, octobre 2021 Le corps en droit
Rubrique / Thématique
Dossier : Le corps en droit.
Résumé La traditionnelle summa divisio entre ordinaire et extraordinaire revêt diverses formes et est notamment observée dès le XVIe siècle concernant la torture lors de l'instruction. Cette dichotomie entre géhenne ordinaire et extraordinaire s'insère dans un ensemble de plusieurs classifications visant à intensifier progressivement la souffrance judiciaire afin d'obtenir les aveux des prévenus. La question fait alors l'objet d'une réglementation approfondie ayant pour but d'encadrer les tourments et d'éviter tout abus de la part des agents de justice. La distinction entre torture ordinaire et extraordinaire a des répercussions d'ordre matériel conséquentes pour le suspect qui peut ainsi être atteint dans son intégrité corporelle à des degrés variables. La question ordinaire s'avère plus douce et constitue généralement un prélude à la question extraordinaire plus rigoureuse, leurs modalités dépendant naturellement des époques et des ressorts judiciaires. La justification d'une telle différence de traitement repose en principe sur la volonté d'épargner une certaine catégorie de personnes plus faibles telles que les femmes, les malades, les vieillards etc., ceux-ci ne subissant alors que la torture ordinaire. A contrario, les accusés de sexe masculin en bonne santé subissent généralement la question ordinaire, puis la question extraordinaire. L'intensité de la douleur que peuvent subir les corps tourmentés peut ainsi considérablement fluctuer selon l'état ou la condition des prévenus. Ces deux degrés de torture représentent donc des étapes distinctes et/ou complémentaires de la procédure inquisitoire. Or, il ressort de l'analyse des sources et des actes de la pratique que géhenne ordinaire et extraordinaire sont presque systématiquement employées ensemble et deviennent quasiment indissociables. L'extraordinaire s'avère alors être la norme en matière de torture et s'inscrit dans un mouvement de généralisation de la douleur maximale dans le cadre de la recherche de la vérité. Au nom de cette dernière, les corps des prévenus sont alors profondément dégradés.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais The traditional summa divisio between ordinary and extraordinary takes on various forms and is notably observed from the 16th century onwards concerning torture during the investigation. This dichotomy between ordinary and extraordinary Gehenna was part of a set of several classifications aimed at progressively intensifying judicial suffering in order to obtain confessions from defendants. The issue was then the subject of extensive regulation with the aim of framing the torments and avoiding any abuse on the part of the agents of justice. The distinction between ordinary and extraordinary torture has significant material repercussions for the suspect, whose physical integrity may be affected to varying degrees. The ordinary question is milder and generally constitutes a prelude to the more rigorous extraordinary question, their modalities naturally depending on the times and the judicial jurisdictions. The justification for such a difference in treatment is based in principle on the desire to spare a certain category of weaker people such as women, the sick, the elderly, etc., who are then subjected only to ordinary torture. In contrast, healthy male defendants are usually subjected to the ordinary question and then the extraordinary question. The intensity of the pain that the tormented bodies can undergo can thus fluctuate considerably according to the state or condition of the defendants. These two degrees of torture thus represent distinct and/or complementary stages of the inquisitorial process. However, it emerges from the analysis of the sources and the acts of the practice that ordinary and extraordinary Gehenna
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne http://journals.openedition.org/droitcultures/7619