Titre | Dans le labyrinthe | |
---|---|---|
Auteur | Gilles Moutot | |
Revue | Astérion | |
Numéro | no 29, 2023 Pour une histoire sémantique du politique | |
Rubrique / Thématique | Varia |
|
Résumé |
Cet article propose une analyse du livre sur Beethoven auquel, sans avoir eu le temps de l'achever, Adorno a travaillé durant plus de 30 ans. Longtemps attendue, la traduction française permet aujourd'hui de prendre pleinement la mesure de l'importance de ce volume, tour à tour atelier ou chambre d'écho de l'œuvre entière d'Adorno. Ligne de force de l'ouvrage, le rapprochement entre Beethoven et Hegel porte ainsi l'enjeu d'un rapport entre l'identité et la différence tel que l'altérité ne se laisse pas absorber dans l'économie de la pensée spéculative. À cet égard, on a d'abord été attentif au fait que, pour Adorno, c'est dans la mesure même où la forme beethovénienne vise la constitution d'une « totalité intensive », qu'elle conduit à mettre au jour – au sein de l'apparence esthétique et par elle – le caractère arbitraire d'un tel primat accordé au tout. Si telle est la « teneur de vérité » de cette musique, on peut alors considérer que le « style tardif » de Beethoven (motif présent du premier au dernier des textes qu'Adorno a consacrés au compositeur) en constitue le plein déploiement, en tant que critique, immanente au matériau musical, de l'illusion du réconcilié. S'il est connu que, notamment, les derniers quatuors ou les dernières sonates sont exemplaires d'un tel geste, on a voulu montrer que celui-ci se trouvait à la fois dédoublé et altéré dans la composition de la Missa solemnis, qu'Adorno dit ne pas parvenir à comprendre. On soutient alors l'hypothèse suivante : exprimant de façon éminente une intempestivité qui traverse l'ensemble de l'œuvre beethovénienne, cette tension entre deux formes de distanciation, ou d'« estrangement » (Verfremdung), cristallise du même coup les exigences théoriques fondamentales de cette réforme de la dialectique qu'Adorno appelle dialectique négative et, indissociablement, celles de la conception d'une temporalité historique non linéaire et non téléologique. Source : Éditeur (via OpenEdition Journals) |
|
Résumé anglais |
This article analyses the book on Beethoven, which Adorno worked on for more than 30 years without having time to complete it. The long-awaited French translation now makes it possible to fully appreciate the importance of this volume, which is, at the same time, a workshop and an echo chamber for Adorno's entire work. The main thrust of the book is the connection between Beethoven and Hegel, which raises the issue of a relationship between identity and difference that ensures that otherness is not absorbed into the economy of speculative thought. In this respect, we should first bear in mind that, for Adorno, it is to the very extent that Beethovenian form aims at the constitution of an “intensive totality” that it leads to the exposure, within and through aesthetic appearance, of the arbitrary character of such primacy granted to the whole. If this is the “truth content” of this music, then we might consider that Beethoven's “late style” (a reasoning present from the first to the last of Adorno's texts on the composer) constitutes its full unfolding, as a critique, immanent in the musical material, of the illusion of the reconciled. While it is well known that the last quartets or sonatas are exemplary of such a gesture, we wished to show that it was both duplicated and altered in the composition of the Missa solemnis, which Adorno said he could not understand. We, therefore, put forward the following assumption: this tension between two forms of distancing, or “estrangement” (Verfremdung), expresses in an eminent way untimeliness that runs through the whole of Beethoven's work, and at the same time crystallises the fundamental theoretical requirements of this reform of dialectics that Adorno calls negative dialectics, and, inseparably, of the concept of a non-linear, non-teleological historical temporality. Source : Éditeur (via OpenEdition Journals) |
|
Article en ligne | https://journals.openedition.org/asterion/10408 |