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Titre Une finance pour le peuple : Politique de la technique de gestion indicielle aux États-Unis
Auteur Sabine Montagne
Mir@bel Revue Actes de la recherche en sciences sociales
Numéro no 252, juin 2024
Page 70-91
Résumé Cet article montre comment les gérants d'actifs financiers ont travaillé, depuis les années 1960, à donner l'impression qu'ils oeuvraient à établir une finance « raisonnable ». Pour ce faire, il retrace l'histoire politique d'une nouvelle technique de placement de l'épargne : la gestion indicielle. Il décrit les étapes au cours desquelles les promoteurs de cette technique se sont forgés un capital symbolique en se positionnant en un sous-champ financier soucieux de sécuriser l'épargne populaire. Cet espace social a constitué une sorte de « main gauche de la finance », opposée à la « main droite », celle du pôle formé par les agents les plus ouvertement spéculateurs. L'article analyse trois processus de persuasion qui ont façonné un tel clivage : la théorisation universitaire de la technique de gestion indicielle à partir des années 1960, sa légalisation juridique dans la décennie 1970, puis sa promotion médiatique à partir des années 1990. Les formes différentes d'autorité symbolique ainsi mobilisées ont joué de manière complémentaire et cumulative pour accréditer l'idée que ce sous-champ était capable de piloter le capitalisme dans son ensemble. La perspective d'histoire économique développée ici sur plus de soixante ans montre que les défenseurs de l'indiciel se sont toutefois accommodés des pratiques de leurs adversaires spéculateurs et, plus généralement, de la financiarisation des structures de l'économie. La polarisation que ces agents et institutions ont construite entre finance raisonnable et finance spéculative leur permet aujourd'hui de se présenter en alternative critique d'un ordre financier qu'ils ont pourtant contribué à faire advenir et dont ils sont devenus des instances centrales.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Résumé anglais This article shows how, since the 1960s, asset managers have worked to create the impression that they are working to establish “reasonable” finance. To do so, it traces the political history of a new savings investment technique: index management. It describes the stages during which the promoters of this technique forged symbolic capital by positioning themselves in a financial sub-field concerned with securing popular savings. This social space constituted a kind of “left hand of finance”, opposed to the “right hand” of the pole formed by the most openly speculative agents. This article analyzes three processes of persuasion that have shaped such a cleavage: the academic theorization of the index management technique from the 1960s onwards, its legalization in the 1970s, and then its promotion since the 1990s. The different forms of symbolic authority thus mobilized played a complementary and cumulative role in lending credence to the idea that this sub-field was capable of steering capitalism as a whole. The perspective of economic history developed here over more than sixty years shows that the defenders of indexing nevertheless accommodated the practices of their speculative opponents and, more generally, the financialization of economic structures. The polarization that these agents and institutions have built up between reasonable and speculative finance enables them to present themselves today as a critical alternative to a financial order that they have helped to bring about and of which they have become central players.
Source : Éditeur (via Cairn.info)
Article en ligne https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ARSS_252_0070 (accès réservé)