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Titre Spectres, conjuration et invocation (de la guerre) dans les représentations de la crise. Une réflexion à partir du droit de crise
Auteur Marie Goupy
Mir@bel Revue Astérion
Numéro no 30, 2024 Les guerres d'antan
Rubrique / Thématique
Dossier
Résumé Les représentations de la guerre travaillent le droit de crise. Il suffit, pour s'en convaincre, d'observer non seulement l'origine d'une large partie de ce droit, mais le modèle plus ou moins explicite qu'a constitué la guerre dans nombre d'interprétations du droit de crise, et ce, depuis la Révolution française au moins. Ce rapport à la guerre est néanmoins, dès cette origine même, particulièrement ambivalent. Il l'est encore aujourd'hui, lorsqu'il accompagne l'application des lois sur l'état d'urgence durant la lutte contre le terrorisme, ou durant la crise sanitaire, qui s'est encore vue escortée d'une pesante rhétorique guerrière. Pourtant, jamais le modèle de la guerre n'a semblé aussi éloigné des changements réels qui affectent le droit de crise, en particulier sur un plan temporel, tant ce dernier traduit au contraire une prise en charge administrative de plus en plus continue de l'urgence – souvent visée avec la formule ambiguë d'exception permanente. C'est cette tension entre une transformation de la temporalité du droit de crise et le recours à toute une rhétorique qui fait continuellement référence à un modèle discontinuiste de la guerre, apparemment anachronique, que cet article voudrait aborder, en tentant de penser le rapport au temps qui s'y énonce de façon paradoxale. Plus spécifiquement, il s'agit d'éclairer une représentation curieusement nostalgique à l'égard des « guerres d'antan », en prenant appui sur le concept derridien de spectre.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Résumé anglais Emergency powers are shaped by representations of war. For proof of this, we not only need to observe the origins of a large part of this kind of law, but also the more or less explicit model provided by war in many interpretations of emergency legislations, at least since the French Revolution. Nevertheless, from the outset, this relationship has been particularly ambivalent. It remains ambivalent today, when governments apply emergency legislations during the fight against terrorism or during the health crisis, which were both escorted by heavy war rhetoric. And yet, never has the war model seemed so far removed from the real changes affecting the management of crisis, particularly in terms of temporality. On the contrary, this management reflects an increasingly continuous administrative handling of emergencies – often referred to by the ambiguous formula of “permanent state of emergency”. It is this tension between a transformation of the temporality of emergency legislations, and the use of a whole rhetoric that continually refers to an apparently anachronistic, discontinuous model of war that this article seeks to address, by attempting to think through the relationship with time that is paradoxically expressed in it. More specifically, the aim is to shed light on a curiously nostalgic representation of the “wars of yesteryear”, based on the Derridean concept of the spectre.
Source : Éditeur (via OpenEdition Journals)
Article en ligne https://journals.openedition.org/asterion/10564