Contenu du sommaire : « Flexicurité, sécurisation des parcours professionnels et protection sociale »
Revue | La Revue de l'IRES |
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Numéro | no 63, no spécial, 2009/4 |
Titre du numéro | « Flexicurité, sécurisation des parcours professionnels et protection sociale » |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
« Flexicurité, sécurisation des parcours professionnels et protection sociale »
- Introduction - Solveig Grimault p. 5
- Une flexicurité au service des capacités des citoyens européens - Jean-Michel Bonvin, Pascale Vielle p. 35 Les sécurités en question dans le modèle de la flexicurité restent largement indéterminées. Si ce modèle s'est constitué sur l'idée que la protection de l'employabilité de l'individu devait passer avant la protection de son emploi, et s'il a ce faisant permis de mettre au cœur du débat la question des transitions professionnelles, il est resté très discret sur les moyens de les sécuriser. Sauf à réserver à la formation tout au long de la vie un rôle de « couteau suisse » dans la modernisation de nos systèmes d'emploi... En particulier, le modèle de la flexicurité ne dit rien ou pas grand-chose sur le concours de la protection sociale à la sécurisation des trajectoires professionnelles. S'agit-il de confier au marché du travail et à son fonctionnement propre la prise en charge des fonctions redistribuées du welfare, au risque d'alimenter en retour le procès des sécurités « à l'ancienne », réputées trop passives ? S'agit-il, à l'inverse, « d'ajouter » à la protection sociale classique un étage de droits attachés à la personne et dédiées à la sécurisation des parcours ? Les débats noués en France autour des derniers grands accords nationaux interprofessionnels n'ont pas véritablement permis de trancher cette alternative, en dépit du potentiel que recèle la notion de portabilité des droits introduite par les partenaires sociaux et de l'assise qu'elle pourrait constituer pour penser de nouvelles articulations entre travail et protection sociale. Il resterait encore à traduire et à prolonger ces articulations dans un équipement propre au marché du travail dont certaines expérimentations actuelles seraient la préfiguration.Flexicurity and the Issue of Appropriate Forms of Security
The security issue raised by the flexicurity model remains rather unspecified. Even though this model has been built on the idea that the protection of individuals' employability has to prevail over the protection of their jobs. It has thus helped refocus the debate on the issue of occupational transitions, but it has nevertheless remained very vague concerning the ways of making them secure. Unless we consider lifelong training to be the key factor in the modernization process of our employment systems... More specifically, the flexicurity model says nothing – or next to nothing – about how social protection helps make career paths more secure. We can wonder whether the labour market and its functioning can deal alone with the redistribution of welfare functions, at the risk of keeping the debate on “old” and “too passive” forms of security going. Or whether, on the contrary, it is a matter of “adding” to classical social protection another layer of rights linked to individuals, in order to render career paths secure. The debates that have arisen on recent major national multi-industry agreements have not really helped answer these questions, in spite of the great potential the notion of transferability of rights offers, which has been introduced by social partners, and in spite of the role it could have for working out new relationships between work and social protection. One issue would remain, namely implementing and following through those relationships within a specific framework for the labour market – which is said to be foreshadowed by a number of ongoing experiments. - Protection sociale complémentaire : ingénierie de la négociation collective - Jacques Barthelemy p. 63 L'article s'intéresse au potentiel de la négociation collective dans le champ de la protection sociale complémentaire, au bénéfice de la sécurisation des parcours professionnels. Aborder le problème de la spécificité de la négociation et de l'accord collectif portant sur la protection sociale complémentaire nécessite un rapide rappel historique : il faut en effet se souvenir que le père de la sécurité sociale, Pierre Laroque avait eu l'ambition de favoriser l'émergence d'un authentique droit conventionnel de la sécurité sociale. C'est de cette ambition qu'était née l'institution de prévoyance, fondement d'une véritable Sécurité sociale de nature conventionnelle. L'article revient tout d'abord sur cette histoire, avant d'analyser les effets des directives européennes dans le champ de la prévoyance collective (loi Evin et loi du 8 août 1994), en particulier sur la portée de la fonction de solidarité que les institutions de prévoyance sont en mesure d'assurer. Il propose ensuite, sur la base de cette analyse rétrospective, une réflexion sur le potentiel actuel de la notion de garantie sociale, inscrite dans le Code du travail : objet de négociation collective, la garantie sociale est en effet susceptible d'accueillir un large éventail de garanties, et pourrait être d'une grande utilité dans la perspective de la sécurisation des parcours professionnels.Company Sponsored Social Protection: The Engineering of Collective Bargaining
This article analyses collective bargaining's potential regarding company sponsored social protection, in terms of rendering career paths secure. Tackling the specific nature of bargaining and collective agreements on company sponsored social protection calls for a quick look at the historical background: indeed, the ambition of the founder of the social security system, Pierre Laroque, was to help develop a true right to collective bargaining regarding social security. This approach led to the creation of a welfare institution that gave rise to a social security system that is really based on collective bargaining. This article begins with this historical background, before analysing the effects of European directives in the area of collective protection (the Evin law and the law adopted on 8 August 1994), especially the impact that welfare institutions are able to have in matters of solidarity. On the basis of this retrospective analysis, it then offers thoughts about the current potential of the notion of social guarantees as embodied in employment law. Thus, as there is collective bargaining on the social security system, the social guarantees concerned can indeed be wide-ranging, and could be very useful in terms of rendering career paths secure. - Les institutions de la flexicurité - Yves Chassard, Jean-Yves Kerbouc'h p. 77 Quels procédés faut-il mettre en place en France pour y implanter le modèle de la flexicurité ? Différentes solutions ont été suggérées ces dernières années pour introduire la flexicurité dans la relation salariale. Certaines ont généré des illusions, telle la proposition de substituer des incitations financières aux règles du droit du travail. D'autres ont été des demi-réussites comme l'obligation imposée à l'entreprise de maintenir la capacité du salarié à occuper un emploi. D'autres, encore, se sont révélées décevantes, notamment les politiques de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. En réalité, le modèle de la flexicurité ne peut fonctionner que si les institutions du marché du travail permettent l'exercice effectif d'un droit à l'employabilité. Tout salarié, demandeur d'emploi, jeune sortant du système éducatif devrait pouvoir trouver un lieu qui lui fournisse, cumulativement, une information sur les perspectives d'embauche par métier dans son bassin d'emploi, la possibilité d'identifier les acquis de son expérience professionnelle, de s'orienter dans le maquis des certifications, de se faire accompagner pour la confection d'un éventuel dossier de VAE et de s'orienter vers une formation le préparant à un nouvel emploi. Ceci laisse entrevoir une autre facette de la flexicurité, où la sécurisation et la dynamisation des parcours sont assurées par des institutions externes à l'entreprise, qu'elles soient paritaires, publiques (Etat, Pôle emploi, collectivités territoriales) ou privées (autres participants au service public de l'emploi). L'enjeu réside désormais dans la façon dont les parties prenantes, aujourd'hui dispersées, sauront travailler ensemble. Dans ce contexte, les partenaires sociaux ont des opportunités à saisir et un rôle clé à jouer.Which Institutions for Flexicurity?
Which procedures should France implement to establish the flexicurity model? Various proposals have been made in recent years to introduce flexicurity within employer-employee relationships. Some have given rise to illusionary solutions, as for example the proposal to replace labour law rules by financial incentives. Some have been only partly successful, such as the requirement for companies to maintain workers' employability. Some have proved disappointing, in particular policy on forward-looking employment and skills management. In fact, the flexicurity model can be effective only if labour market institutions make it possible for the right to employability to be applied. Every worker, jobseeker, or young person leaving the educational system should be able to find a place which provides them with information on all the following things: work prospects in their respective occupation and labour pool; identifying the skills they have acquired through professional experience; making sense of the many certifications available; help with possibly preparing an application for validating work experience (VAE); and guidance towards specific training for a new job. This points to another aspect of flexicurity where rendering career paths secure and dynamic is taken on board by institutions outside companies, whether of a joint and public nature (State, public employment centres and local authorities), or even by private companies (other participants in public employment services). From now on, the issue depends on the way stakeholders, who are scattered nowadays, will manage to work together. In this context, social partners have opportunities to seize and a key role to play. - Flexicurité en Europe : une approche critique - Maarten Keune, Philippe Pochet p. 105 Ces dernières années, la « flexicurité » est devenue un concept clé du débat européen. Dans cet article, nous montrons que la flexicurité a effectivement apporté un certain nombre d'éléments positifs à ce débat, en particulier en favorisant une approche plus holistique et en renversant certaines hypothèses néo-classiques. Dans le même temps, ce concept reste mal défini et très ambigu. Il n'est pas parvenu à créer un consensus quant aux directions politiques à établir, et a été souvent instrumentalisé au service des milieux et intérêts traditionnels.Plus fondamentalement, nous nous interrogerons sur la mesure dans laquelle les approches dominantes de la flexicurité parviennent à expliquer les succès et échecs sur les marchés du travail des pays européens. La flexicurité a souvent été analysée en termes de complémentarité entre trois différentes politiques (réglementations en matière contractuelle et de licenciement, politiques actives du marché du travail et de la protection sociale). Les pays nordiques et les Pays-Bas sont habituellement cités comme exemples positifs. Selon nous, cette analyse s'appuie sur des fondements empiriques fragiles. Nous proposerons une perspective alternative basée sur différents types d'organisation du travail et différentes manières de soutenir les transitions sur le marché du travail.Flexicurity in Europe: a Critical Approach
In recent years, flexicurity has become a key concept in European debate. We show in this article that flexicurity has indeed positively contributed to this debate, in particular as it has promoted a more holistic approach and overturned some of the neoclassic hypotheses. At the same time, this concept has not been fully defined and remains very ambiguous. It has not managed to achieve a consensus on the political directions that need to be taken and it has often been used to serve more traditional circles and interests. This leads us to wonder to what extent the dominant approaches of flexicurity can explain the successes and failures that can be observed in the labour markets of European countries. Flexicurity has often been analysed in terms of the complementary nature of three political approaches (regulation of contracts and redundancies, as well as active polities regarding the labour market and social protection). The Nordic countries and the Netherlands are usually referred to as positive examples. In our view, this analysis offers no solid empirical foundation. Instead, we offer an alternative perspective based on different types of work organisation and different ways of supporting transitions in the labour market. - Dessein et destin de quatre arrêts de la Cour de justice des communautés européennes. Peut-on maintenir la spécificité des modèles sociaux en Europe ? - Sylvaine Laulom, Florence Lefresne p. 127 Entre décembre 2007 et juin 2008, la Cour de justice des communautés européennes rend quatre arrêts (Viking, Laval, Rüffert et Luxembourg) qui mettent en cause directement certaines spécificités des modèles sociaux européens, touchant au droit de grève, à la nature des dispositifs conventionnels et aux modalités de fixation des minima salariaux. La première partie de l'article campe les circonstances de ces arrêts et en analyse l'argumentaire juridique qui consacre la primauté des normes de libre prestation de services sur celles de protection des salariés. La seconde partie envisage les effets d'une telle orientation du droit communautaire, en termes de fragilisation des dispositifs conventionnels (le cas suédois sert de point d'appui à l'analyse) et de déploiement de stratégies de plus en plus agressives de recours à la sous-traitance internationale appelant de nouvelles formes de mobilisation collective (les conflits observés au Royaume-Uni au cours de l'année 2009 en témoignent). L'urgence des réponses attendues par les salariés au plan européen contraste singulièrement avec l'inertie des institutions qui pourraient en être porteuses.Objective and Destiny of Four Judgments of the European Communities
Between December 2007 and June 2008, the Court of Justice of the European Community (CJEC) pronounced four judgments (Viking, Laval, Rüffert and Luxembourg) which overtly question some of the specific features of European social models, regarding the right to strike, the nature of collectively-agreed provisions, as well as procedures for setting the minimum wage. This article begins by describing the circumstances in which those judgments were pronounced and then analyses the legal arguments giving priority to norms regarding the free provision of services over norms protecting workers. Secondly, it looks into the possible impact of such an approach of Community law, in terms both of weakening collectively-agreed provisions (based on the case of Sweden) and of implementing increasingly aggressive international subcontracting strategies, which call for new forms of collective mobilization (as the disputes that took place in the UK in 2009 show). European workers are expecting a quick response at European level, including a new directive on posted workers, while the institutions concerned remain, in contrast, very inert. - Les nouveaux enjeux de la négociation dans le champ de la protection sociale complémentaire, quels leviers pour la sécurisation des parcours professionnels ? - Gaby Bonnand p. 153
- Flexicurité et protection sociale - CFE-CGC p. 159
- Sécurisation des parcours professionnels et négociation collective dans le champ de la prévoyance : comment assurer la continuité des droits ? - Michelle Doussineau p. 169
- Au-delà de la flexicurité : la création de nouveaux droits pour les salariés - Sébastien Dupuch, Catherine Fitte p. 175