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Revue Revue d'études comparatives Est-Ouest Mir@bel
Numéro vol 34, no 1, mars 2003
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • La fin du monopole de la violence légitime ? - Catherine Colliot-Thélène p. 5 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    En s'appuyant sur une exégèse précise des textes de Max Weber et en prenant en compte les textes d'un certain nombre de ses contemporains, juristes notamment, l'article qui suit invite à une réinterprétation de la fameuse définition de l'État par le « monopole de la violence légitime ». Plutôt qu'une décision ontologique liant dogmatiquement l'État à la violence, on propose d'y voir le résumé d'une thèse relative à l'histoire du droit, portant plus précisément sur les conditions d'effectivité des droits subjectifs. Cette définition apparaît alors comme l'alternative wébérienne aux théories classiques de la souveraineté. En tant que telle, elle offre une grille de lecture originale des transformations institutionnelles de l'époque contemporaine.
    By using an accurate interpretation of Max Weber's writings and taking into account texts by contemporaries (in particular, jurists), the well-known definition of the state as exercising a monopoly over legitimate violence is reexamined. Rather than an ontological decision dogmatically linking the state to violence, this definition can be seen as summarizing a thesis on the history of law, specifically on the conditions of the effectiveness of subjective rights. It thus turns out to be a Weberian alternative to classical theories of sovereignty. As such, it provides an original grid for interpreting institutional transformations in our times.
  • Identités collectives et usages légitimants du passé : les organisations de jeunesse tchèques - sandrine Devaux p. 33 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Nous proposons de traiter dans cet article les effets du passé sur la manière dont des associations se réorganisent après 1990 en République tchèque. Le cas des organisations de jeunesse est révélateur des processus en œuvre puisque se conjuguent des logiques de conversion, de "restauration" d'anciennes associations et de création de nouvelles. Dans cette configuration, s'affrontent de multiples passés socialiste et pré-socialiste. Nous montrerons concrètement comment les acteurs "bricolent" pour construire un passé légitimant et une nouvelle identité collective. Nous verrons également dans quelle mesure ce bricolage résulte des interactions entre les différents passés mobilisés. L'approche en termes de path dependence retenue ici ne nous semble néanmoins pertinente que si elle s'appuie sur des éléments précis concernant les mécanismes des phénomènes de continuité et de transformation et sur des jeux d'échelles.
    How does the past affect the way that associations in the Czech Republic reorganised after 1990? As the case of youth organisations shows, the processess under way have involved a combination of converting or restoring old associations and creating new ones. In this situation, the many socialist and pre-socialist uses of the past come into conflict. This article will explore how the various players are having to piece different and diverse elements together to create a legitimizing past and a new collective identity, and moreover, the extent to which this is the direct consequence of interaction between the different pasts involved. Finally, it is important to note that the analytical approach of path dependence which has been chosen here is apposite in so far as it is based on precise elements concerning mechanisms of continuity and transformation, and on scale games.
  • La démocratie pour les Tchèques : une légitimité politique et une composante identitaire - Muriel Blaive p. 59 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Lorsque l'on aborde le thème de la légitimité au sein de la nation tchèque, le rapport théorique et pratique qu'elle entretient avec la démocratie s'impose de prime abord. Contrairement à leurs voisins immédiats d'Europe centrale, les Tchèques s'auto-définirent au XXe siècle sur une base apparemment politique ; persuadés d'être affranchis de tout nationalisme étriqué, ils présentèrent la composante démocratique de leur culture comme l'élément le plus représentatif de leur identité. En réalité, le stéréotype de la nation démocratique est l'expression même de leur nationalisme. L'histoire récente montre qu'il en a été maintes fois abusé et qu'il convient donc de le manipuler avec précaution.
    When discussing the Czech nation's legitimacy, its theoretical and practical relation with democracy compels recognition above all else. Unlike their adjacent neighbors in central Europe, 20th-century Czechs defined themselves in political terms. Persuaded that they had been freed from any narrow nationalism, they presented their culture's democratic aspect as being most typical of their identity. In reality, the stereotype of the democratic nation itself expressed their nationalism. As recent history has shown, this stereotype has often been abused and must, therefore, be handled with care.
  • Élections, légitimité politique et stabilité dans les Balkans : le lien manquant - Nadège Ragaru p. 83 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Depuis plus d'une décennie, la communauté internationale semble avoir placé ses espoirs de stabilisation politique en Europe du Sud-Est dans l'organisation, sous supervision internationale, de scrutins électoraux. Au fil des années, ces consultations électorales mobilisent cependant un nombre décroissant d'électeurs. Maints arguments ont été avancés pour expliquer les taux d'abstention élevés, les désillusions devant des réformes au coût social élevé, les pratiques clientélaires des élites partisanes, voire la trop grande fréquence des appels à l'arbitrage populaire. Par-delà ces constats, nul n'a, semble-t-il, songé à interroger l'un des principaux postulats des politiques d'aide à la démocratisation à l'Est, à savoir l'assimilation du vote à une « potion » démocratique censée lier les citoyens à leurs élus dans l'acte même de la délégation d'autorité et, partant, favoriser l'adhésion populaire à la démocratie. Il y a pourtant bien crise du vote, aujourd'hui, dans sa capacité à conférer aux élites politiques mandat et légitimité. Partiellement disqualifiés, dans les régions sous administration internationale, par une externalisation de la décision vers les responsables de la communauté internationale, les gouvernants sont également fragilisés par leur incapacité, en période d'austérité macroéconomique, à proposer à leur électorat des projets politiques porteurs de dividendes sociaux. Les années 1990 ont donc vu les alternances se multiplier sans que les électeurs aient le sentiment de disposer d'alternatives. Dès lors, le miracle de la conversion, par l'élection, des préférences individuelles en choix collectifs favorisant l'allégeance aux systèmes établis n'opère plus. La réitération des procédures électorales, simple traitement comportemental, ne suffira pas à résoudre le problème.
    For more than a decade now, the international community seems to have placed its hopes for political stabilization in Southeastern Europe in organizing, under international supervision, elections. Over the years, voter turnout has declined. Among the many arguments used to explain this trend are : disillusionment with reforms that bear a high social cost, the patronage practices of party elites and, even, the frequency of elections. No one seems to have thought of questioning one of the major postulates underlying policies for democratizing Eastern Europe. This postulate likens voting to a democratic "potion" that links citizens to elected officials via a delegation of authority and thus generates support for democracy. Given this voting crisis however, questions arise about whether elections confer legitimacy on political elites and entitle them to hold office. Partly disqualified in areas under international administration, since decision-making is externalized toward leaders from the international community, elected officials are also fragile owing to their inability, during a period of macroeconomic austerity, to propose to voters political programs with social dividends. During the 1990s, parties have alternated more often in power, but voters still do not feel that they have any alternative. Hence, the miracle of elections converting individual preferences into collective choices that generate allegiance to established systems no longer works. The repetition of elections, a mere behavioral treatment, cannot suffice to settle this problem.
  • Au coeur de la transformation du droit russe : le Svod zakonov de la Fédération de Russie - Alexandre Sgaggion p. 103
  • Une singularité de la santé publique : l'évolution de la mortalité en Hongrie depuis 1970 - Stéphane Vari p. 123 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
    Dans les années 1965-1978, une hausse de la mortalité des adultes en âge de travailler a été observée dans l'ensemble des pays d'Europe centrale et orientale. La thèse la plus fréquemment avancée pour expliquer ce phénomène est celle de l'exposition aux "facteurs de risque" (alcool, tabac.) rejetant ainsi la responsabilité sur les individus et leurs habitudes de vie. Or cette thèse est contredite lorsqu'on s'intéresse aux mortalités particulières que sont les "mortalités évitables" liées au système de soins. Elles ont, par définition, une dimension institutionnelle qui dépasse les comportements individuels. Les données de l'OMS montrent que la Hongrie présente un niveau plus élevé qu'ailleurs de ces mortalités et fondent donc l'hypothèse d'une responsabilité du système national de santé. Les maladies cardio-vasculaires sont ici privilégiées car elles ont partout une place prépondérante dans la mortalité globale. Depuis les années 1980, le progrès médical a entraîné une forte baisse de la mortalité. Cet effet bénéfique a également été observé en Hongrie, mais plus tardivement et dans une moindre mesure car la diffusion des innovations a été limitée par le fonctionnement du système de santé. L'article conjecture qu'une part importante de la responsabilité de la lenteur des progrès revient à la forme de dessous-de-table médicale que les Hongrois appellent « prime de reconnaissance ». Du fait de la corruption et du désintérêt des personnels soignants, les patients temporisent avant de faire appel à la médecine, d'où des soins souvent trop tardifs. Ces éléments incontournables dans la limitation des chances de1 survie des patients en Hongrie se retrouvent dans d'autres pays de la région.
    From 1965 to 1978, the mortality rate of adults of work age rose in awll central and eastern European countries. The exposure to "risk factors" (alcohol, tobacco), the most frequently advanced explanation, throws responsibility onto individuals and their habits. This explanation meets up with the contradictory evidence of an "avoidable" mortality linked to the health-care system. By definition, cases of avoidable mortality have an institutional dimension that reaches beyond personal behavior. According to WHO data, the level of such mortality is higher in Hungary than elsewhere. This underlies the hypothesis that the national health system carries responsibility. Heart-related illnesses are examined since, everywhere, they rank among the major causes of mortality. Since the 1980s, medical progress has led to a sharp drop in this cause of mortality. This positive effect has occurred in Hungary too, but to a lesser degree and at a later date because the operation of the health system limited the diffusion of innovations. The conjecture is made that this slow diffusion can be blamed on the under-the-counter medicine, which Hungarians call the "gratitude money". Owing to corruption and a lack of motivation among health-care providers, patients hold off before visiting a doctor, whence the belated care. All this inexorably limits the Hungarian patient's chances for survival, and as much can be said about the other countries in central and eastern Europe.
  • Les toxicomanies en Ouzbékistan post-soviétique : exploration de dynamiques plurielles et gestion des risques - Sophie Hohmann p. 167
  • Revue des livres