Contenu du sommaire : Varia

Revue Cahiers d'études africaines Mir@bel
Numéro no 166, 2002
Titre du numéro Varia
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • études et essais

    • Une anthropo-logique communautaire à l'épreuve de la mondialisation : De la relation de dette à la lutte sociale(l'exemple ivoirien) - Alain MARIE p. 207-256 accès libre avec résumé
      La Côte-d'Ivoire est un exemple significatif d'une évolution des sociétés africaines essentiellement marquée par la crise d'un mode d'intégration et de régulation fondée sur la relation de dette (la solidarité hiérarchique entre « créanciers » et « débiteurs »). D'un double point de vue anthropologique et sociologique, il apparaît, en effet, que, sous l'effet de la crise économique et de la mondialisation néo-libérale, la solidarité microsociale (anthropo-logique de la dette) et le patrimonialisme clientéliste postcolonial (régime de la « dette sociocritique »), qui s'articulaient l'un à l'autre et, de ce fait, entretenaient une « sur-communautarisation » de la société globale, sont objectivement et subjectivement remis en question. Ceci se traduit par un processus d'individualisation allant dans le sens de l'engendrement d'une société (civile) restructurée en « classes sociales » antagonistes. L'analyse du cas ivoirien met cette problématique générale à l'épreuve des soubresauts de l'après « houphouëtisme » jusqu'à aujourd'hui. Elle argumente la thèse selon laquelle, en arrière plan, des tensions interethniques, de la xénophobie et des pseudo résurgences communautaristes (instrumentalisées par les élites politiques), les luttes pour le pouvoir entre bourgeoisies rivales et la question sociale (paupérisation, prolétarisation et amplification des inégalités sociales en milieu rural comme en ville) sont d'autant plus déterminantes que les ressources se font plus rares (la terre et les emplois, notamment) et que s'exaspèrent les revendications catégorielles et démocratiques (au nom de la justice sociale, surtout). En dernière analyse, les communautarismes sont le produit politique de la question sociale.
    • De la « cité-État » en Afrique noire : L'espace et le politique chez les Saman du pays dogon (Mali) - Gilles HOLDER p. 257-284 accès libre avec résumé
      Dans cet article, on se propose de définir la notion de « cité-État » en Afrique qui, bien que requise par les historiens, mais de façon imprécise, est quasiment inutilisée par les anthropologues. Pour illustrer l'originalité de cette politie, nous avons pris l'exemple de la cité de Kani érigée au début du XIXe siècle par les Saman du pays dogon (Mali), une société guerrière, musulmane et esclavagiste liée à Djenné, la vieille métropole du Delta intérieur du Niger. Axée sur un centre intangible retranché du monde par une enceinte, la cité détermine un arrière-pays comme espace d'alliance et un outre-pays comme espace de prédation qui transcendent la géographie politco-religieuse dogon à travers une souveraineté plus politique que territoriale. L'État, qui se manifeste notamment par le monopole de la force et l'existence d'une place publique, centrale et panoptique ne relevant ni des lignages, ni de la royauté, ni de l'islam, instaure ici une citoyenneté fondée sur une citadinité à la fois réelle (Kani) et idéelle (Djenné), par laquelle tout homme adulte de statut libre, tout Saman, accède à la responsabilité juridique.
    • Reflections on Two Sticks: Gender, Sexuality and Rainmaking - Todd SANDERS p. 285-314 accès libre avec résumé
      Réflexions sur « deux bouts de bois » : Genre, sexualité et rites d'obtention de la pluie. Tous les chercheurs qui ont étudié les croyances et les rites d'obtention de la pluie ont noté à leur propos la prééminence du symbolisme sexuel. Troublés par ce phénomène, ils se sont tournés vers les aspects sociaux, politiques et économiques de ces rites. À l'inverse, la perspective adoptée ici privilégie l'analyse des interprétations locales des rites d'obtention de la pluie chez les Ihanzu de Tanzanie, en avançant l'hypothèse que les rites de ce groupe et, par extrapolation, les rites similaires d'autres populations africaines sont tous saturés de symbolisme sexuel et que, de surcroît, ces rites prennent sens par rapport à des interprétations plus larges mettant en jeu les processus de reproduction. Pour les Ihanzu, en effet, toute (re)production (y compris celle des enfants et de la pluie) requiert une combinaison équilibrée des catégories mâles et femelles. Cette caractéristique tranche avec leurs notions ordinaires de genre, lesquelles supposent la hiérarchie entre les sexes et l'inégalité. Cet article tente ainsi de montrer que les notions concurrentes de genre et de pratiques de genre sont mises en ?uvre dans certains rituels et dispositifs de la vie de tous les jours. Enfin, si, à l'instar de tous ceux qui ont étudié les rites de pluie cet article met en évidence leur symbolisme sexuel, il va également plus loin en tentant de cerner, dans le cadre d'un terrain particulier, l'importance de ce symbolisme et les raisons pour lesquelles il prend précisément cette forme.
    • L'Éthiopie médiévale. État des lieux et nouveaux éclairages - Bertrand Hirsch, François-Xavier Fauvelle-Aymar p. 315-336 accès libre avec résumé
      L'histoire de l'Éthiopie entre le VIIe et le XIIIe siècle est mal connue. Des recherches historiques et archéologiques récentes sur des sites du Mänz, du Gedem et de l'Ifat, ainsi que de nouvelles datations au Carbone 14, ont permis notamment de révéler l'existence d'une nouvelle culture sur le haut plateau, caractérisée par la richesse du mobilier importé. Elles permettent aussi de repenser l'arrière-plan historique des processus de christianisation et d'islamisation de ces régions, de saisir ces phénomènes de façon synchronique, et de remettre en question le modèle migratoire dominant dans l'historiographie.
    • French Colonial Reading of Ethnographic Research : The Case of the "Desertion" of the Abron King and its Aftermath - Ruth Ginio p. 337-358 accès libre avec résumé
      One of the most consequential events of the Vichy period in French West Africa was the "defection" of the Abron King and a large entourage of court members from Côte-d'Ivoire to the British-ruled Gold Coast.   This article uses this "affair" as a case study for a broader issue?the relationship between ethnographic research and French colonial policy.   According to the testimony of the Governor of Côte-d'Ivoire at that time, Hubert Deschamps, he was inspired to offer suggestions as to how to act following the ?defection' after reading an ethnographic study written twenty years earlier.   The comparison between his suggestions and the study in question allows us to examine in detail the way ethnography could influence colonial policy.   At the same time, the reaction of Governor-General Pierre Boisson to Deschamps' ideas underscores the fact that although such ethnographic studies had a potential influence, especially over Governors who were attracted to this science, they also had their limits when in conflict with political considerations.
    • Vol et relations entre Peuls et Guiziga dans la plaine du Diamaré (Nord-Cameroun) - Saïbou ISSA, Hamadou Adama p. 359-372 accès libre avec résumé
      À la fois forme de résistance à la domination peule et mode d'accumulation de biens, le vol fut au coeur des relations entre les communautés peules et guiziga dans la plaine du Diamaré, avant et pendant la colonisation européenne. Mobilisant tous les hommes actifs, le vol fut une ressource que les chefs guiziga et les intermédiaires de l'administration instrumentalisèrent chacun selon leurs intérêts. Aux plans politique et administratif, la guérilla des Guiziga leur permit d'obtenir leur affranchissement vis-à-vis de la tutelle peule. Au plan économique, les Peuls perdirent une part considérable de leur bétail, au profit des groupes guiziga et durent quitter des zones prioritaires d'élevage. Tout cela laisse, des Guiziga, une image de voleurs invétérés très tenace encore de nos jours.
  • notes et documents

    • La part de l'Autre dans la quête de soi : À propos de la conversion à l'islam de Thomas Ismayl Urbain - Jérôme DEBRUNE p. 373-384 accès libre avec résumé
      Thomas Urbain, jeune métis traversé par une crise d'identité et gangé au saint-simonisme, débarque en Égypte en 1832 pour participer à l'union de l'Orient et de l'Occident. Très vite attiré par l'islam, le jeune homme tombe amoureux tour à tour d'une femme noire originaire d'Abyssinie et de sa fille métisse. Les ayant perdues toutes les deux, il se convertit alors à l'islam sous les auspices du saint-simonisme. Revenu en France pour une courte période, il se fait nommé en Algérie comme traducteur rattaché à l'Armée et continue de défendre l'idée d'une union entre l'Orient et l'Occident. Il encourage en particulier les mariages mixtes et montre lui-même l'exemple en épousant une algérienne musulmane avec qui il aura une fille. Il va pourtant d'échec en échec, tant dans sa vie privée que publique, et doit fuir l'Algérie à la fin du Second Empire pour échapper à la vindicte des colons.
  • chronique bibliographique