Contenu du sommaire : Varia

Revue Cahiers d'études africaines Mir@bel
Numéro no 167, 2002
Titre du numéro Varia
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • études et essais

    • Comment se construit et s'invente une tradition religieuse : L'exemple des nations du candomblé de Bahia - Emmanuelle Kadya Tall p. 438-458 accès libre avec résumé
      L'auteur s'attache à montrer comment des attributions catégorielles en termes de nations, données aux esclaves africains par les commerçants de la Traite ont été réinterprétées par ces derniers et leurs descendants d'abord au sein des confréries laïques catholiques, puis au sein des communautés du candomblé, dans des quêtes identitaires ethnico-statutaires et religieuses. L'histoire du concept de nation, sa polysémie qui touche aux registres de l'ethnicité, du politique et du religieux est retracée pour mettre en lumière les différents moments qui aboutissent à la situation actuelle. Ainsi, l'élaboration de la tradition du candomblé bahianais repose en partie sur les inventions d'une élite sacerdotale, constructions en partie légitimées par le pouvoir d'écriture des intellectuels.
    • Le pentecôtisme brésilien en Terre africaine : L'universel abstrait du Royaume de Dieu - André Mary p. 463-478 accès libre avec résumé
      L'expansion du mouvement pentecôtiste dans le monde et plus particulièrement en Afrique est généralement liée à ses origines et à ses ressources américaines, même si les formes de son appropriation par les populations africaines sont anciennes et multiples. Il existe cependant un réseau d'échange religieux Sud-Sud qui se traduit entre autres par l'implantation d'Églises coréennes ou brésiliennes dans les capitales africaines. Cet article fait le point sur les stratégies missionnaires, essentiellement urbaines, de l'Église Universelle du Royaume de Dieu, l'une des Églises néo-pentecôtistes les plus importantes du Brésil. Cette Église multiplie les paradoxes en conjuguant l'inspiration de la Puissance de l'Esprit et un modèle d'organisation épiscopal plutôt catholique, ou en associant une stratégie de visibilité, un prosélytisme de rue, et une politique du secret et de la discrétion. Sur le marché en pleine effervescence des pratiques de guérison divine et de délivrance, les pasteurs animateurs de l'Universelle ne jouent pas les « docteurs », et encore moins les « prophètes » de la Réconciliation nationale, mais ils utilisent pleinement les procédés d'une dramaturgie qui fait parler les diables et se propose de libérer l'Afrique de ses démons. L'universalité aussi abstraite que discrète sur laquelle ouvre le « Royaume de Dieu » n'offre pas cependant les mêmes possibilités d'identification communautaire et d'investissement prophétique que les Églises pentecôtistes africaines ou la mouvance évangélique internationale.
    • In Search of New Skin: Michel Leiris's L'Afrique fantôme - Phyllis CLARCK-TAOUA p. 479-498 accès libre avec résumé
      À la recherche d'une nouvelle personnalité : L'Afrique fantôme de Michel Leiris Michel Leiris s'embarqua pour l'Afrique en surréaliste déçu, à la recherche d'une nouvelle personnalité. Il fuyait ses ennuis métropolitains, emportant avec lui un primitivisme d'avant-garde qui obscurcissait sa perception de l'Afrique, de ses peuples et de ses cultures. Incapable de se débarrasser de son obsession pour Breton et éprouvant le manque de femmes bien vêtues, il se tourna vers l'introspection et l'écriture. En tant qu'archiviste et secrétaire de la mission Dakar-Djibouti, son journal L'Afrique fantôme offre un éclairage sur l'ethnographie naissante, ses méthodes et ses institutions, de même que sur l'éthique de la collecte des objets. Le pillage dans les villages d'objets destinés à être exposés dans les musées parisiens prend la forme d'un fantasme pseudo-érotique qui répond à la frustration de Leiris et qui accroît la jouissance de ce dernier tout armé qu'il est de son statut de Blanc. Ce qu'il découvre dans la brousse, à sa grande déception, c'est la persistance de sa qualité de Français plutôt que son existence en tant qu'Autre primitif. La participation de Leiris à cette expédition historique fut néanmoins l'amorce d'un engagement de toute une vie aux côtés de l'Afrique ainsi que le début d'un processus d'incorporation, dans les institutions et les pratiques culturelles françaises, d'éléments en provenance des colonies.
    • Entre engagement et allégeance : Historicisation du politique au Sénégal - Tarik Dahou p. 499-520 accès libre avec résumé
      À partir du cas particulier du Sénégal, ce texte s'attache à présenter une approche alternative aux visions fonctionnelles appliquées à l'étude des systèmes clientélistes contemporains. La critique des théories rationalistes est effectuée à partir d'une analyse de la généalogie du concept de factionnalisme et d'un terrain réalisé dans le delta du Fleuve Sénégal. Au niveau local, les allégeances politiques s'avèrent tributaires d'alliances historiques et affectives qui déterminent davantage les coalitions politiques que l'intérêt.
    • "Children For Death": Money, Wealth, and Witchcraft Suspicion in Colonial Asante - William C. OLSEN p. 521-550 accès libre avec résumé
      « Les enfants de la mort » : monnaie, richesse et accusations de sorcellerie dans l'Asante colonial L'article étudie le changement des valeurs culturelles du matrilignage lié à l'insertion des membres de la parentèle dans les nouvelles conditions économiques qui marquent les premières décennies de la domination coloniale britannique et de l'expansion capitaliste dans le pays asante de Gold Coast. Les nouvelles caractéristiques introduites par le colonialisme, notamment l'essor des entreprises capitalistes et de l'économie marchande ainsi que la consommation de produits européens, provoquèrent des tensions accrues en raison de la redistribution inégale de la richesse au sein du lignage. La monnaie en vint à symboliser une nouvelle sorte de pouvoir, pouvoir à la fois matériel et occulte et associé à l'action maléfique des sorciers. Ces sorciers, à leur tour, exerçaient leur talent destructeur au sein de la parenté et des relations sociales en général et étaient, de surcroît, capables de commettre les pires atrocités dans le cadre de la cosmologie asante. Les pouvoirs destructeurs de la sorcellerie pouvaient être contrecarrés par les plantes médicinales et les rituels anti-sorciers accomplis dans les sanctuaires par les guérisseurs. Le nombre de ces sanctuaires s'est grandement accru en pays asante entre 1906 et 1940.
    • Le génocide de 1972 au Burundi : Les silences de l'Histoire - René Lemarchand p. 551-568 accès libre avec résumé
      Vingt-deux ans avant l'hécatombe du Rwanda, qui fit environ 600 000 victimes, la plupart tutsi, un autre génocide ensanglantait la région des Grands Lacs : entre 200 000 et 300 000 Hutu furent massacrés par l'armée du Burundi à la suite d'une rébellion hutu qui fit des milliers de victimes chez les Tutsi. Au Rwanda comme au Burundi le meurtre de masse porte tous les signes distinctifs du génocide : le ciblage ethnique des victimes, l'intentionnalité exterminatrice, l'ampleur des tueries. À la différence du Rwanda, ou l'ethnie des génocidaires fut écartée du pouvoir, au Burundi c'est la minorité tutsi qui devait régner sans partage sur les destinées du pays, jusqu'en 1993. Ceci explique le silence officiel qui, jusqu'à aujourd'hui, entoure le génocide de 1972. Cette mise entre parenthèses des atrocités commises en 1972 a non seulement contribué à obscurcir leurs relations avec celles de 1994 au Rwanda voisin, mais a créé un non-dit officiel qui aggrave les tensions entre les communautés hutu et tutsi. Au Burundi comme au Rwanda le moment est venu de procéder à de véritables « retrouvailles de la mémoire », et, ce faisant, de reconnaître que la culpabilité n'est pas une voie à sens unique. Le plus grand danger qui menace la région des Grands Lacs est celui d'une mémoire ethnicisée, où chaque groupe se dispute le privilège de détenir la vérité, et où l'histoire départage les bons des mauvais suivant l'appartenance ethnique.
  • notes et documents

    • The Sublime Object of Blackness - Ivor CHIPKIN p. 569-584 accès libre avec résumé
      Le sublime objet de la « négritude ». Cet article traite d'une publicité parue dans l'un des plus importants journaux sud-africains. Cette publicité suggère qu'il existe une conspiration d'extrême droite blanche contre le Président Thabo Mbeki, conspiration destinée à discréditer son leadership et le leadership des Noirs en général. On défend ici l'idée que cette publicité est à la fois le reflet et le signe avant-coureur d'une forme radicalement nouvelle de nationalisme. À travers l'usage qui est fait du terme « Noir », le Président et le gouvernement deviennent des objets quasi-religieux et infaillibles.
  • chronique bibliographique