Contenu du sommaire : Représentativités syndicales, représentativités, patronales
Revue | Travail et emploi |
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Numéro | no 131, juillet-septembre 2012 |
Titre du numéro | Représentativités syndicales, représentativités, patronales |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Représentativités syndicales, représentativités patronales. Règles juridiques et pratiques sociales. Introduction - Sophie Béroud, Jean-Pierre Le Crom, Karel Yon p. 5-22
- Fonctions et usages de la représentativité patronale - Nicole Maggi-Germain p. 23-45 D'un point de vue historique, la représentativité en tant que catégorie juridique a été pensée afin de permettre à des organisations professionnelles, tant patronales que de salariés, de signer des accords susceptibles d'extension, c'est-à-dire engageant l'ensemble des employeurs ou l'ensemble des salariés compris dans le champ d'application de la convention ou de l'accord. La reconnaissance de représentativité confère une telle légitimité. Cependant, les fonctions (les missions imparties par le droit), mais aussi les usages (l'utilisation qui en est faite par les organisations ou l'Administration) de la représentativité se sont progressivement élargis : le droit pose parfois la représentativité comme condition pour siéger dans des instances décisionnaires de la branche, dans des instances publiques consultatives ou encore pour participer au paritarisme national et interprofessionnel. En effet, si la représentativité constitue d'abord une forme de reconnaissance vis-à-vis de la profession, elle l'est aussi à l'égard de l'Administration : de facto ou de jure, elle confère une autorité pour peser sur les décisions publiques. De la même manière, l'Administration utilise la représentativité comme un critère de sélection des organisations professionnelles d'employeurs appelées à participer au dialogue social.
- Devenir une organisation représentative au niveau national interprofessionnel : Les enjeux juridiques de l'action des employeurs de l'économie sociale - Pascal Caillaud p. 47-64 La recodification du Code du travail et la réforme du dialogue social ont renforcé la place de la négociation nationale interprofessionnelle dans le processus législatif d'adoption de réformes sur le travail, l'emploi et la formation professionnelle, sans traiter de la question de la représentativité des organisations d'employeurs à cette échelle. Dans certains secteurs particuliers comme l'économie sociale, la notion d'interprofession fait désormais débat, autant du fait des activités professionnelles de ces secteurs, que de la situation juridique particulière des employeurs. Les actions de contestation menées par la principale organisation d'employeur (l'Usgeres) sont multiformes : constitution de nouvelles alliances aux élections prud'homales, négociations d'accords qualifiés d'interprofessionnels sans la signature du Medef, de la CGPME et de l'UPA, et contentieux devant le Conseil d'État. La création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) en 2009 a redonné une actualité à ce débat en prévoyant une procédure originale de consultation des organisations d'employeurs situées hors-champ de la négociation interprofessionnelle. Ces réformes, comme ces mouvements de contestation des règles actuelles de représentativité, nous amènent à interroger la notion d'interprofession. Existe-t-elle réellement ou ne doit-on parler que d'interbranches ou d'intersecteurs ? Se pose alors la question de la détermination du champ d'application et du « hors-champ » de ces accords nationaux interprofessionnels.The recodification of the Labour Code and the reform of social dialogue have strengthened the role of national interprofessional bargaining in the legislative process of adoption of reforms on labour, employment and vocational training, without resolving the issue of the representativeness of employers' organizations. In some sectors, such as the social economy, the notion of “interprofession” is being debated, because of the nature of the professional activities of these sectors and of the unusual legal statuses of employers. The protests led by the main employers' organization (Usgeres) are multifaceted: new alliances for the elections of industrial tribunals, bargaining agreements labelled interprofessional without the signature of the Medef, the CGPME and the UPA, and legal proceedings before the Council of State. The institution of the Fund for securing professional pathways (FSPP in French) in 2009 has revived interest in this debate by providing an original procedure of consultation of employers' organizations outside the field of interprofessional bargaining. These reforms and these protest movements of the current rules of representation lead us to question the notion of interprofession. Is it real or should we only speak of interbranches or intersectors? This raises the question of determining the scope and the “off-scope” of interprofessional agreements.
- Reconnaissance de représentativité et quête de reconnaissance : Le cas de l'Organisation des transporteurs routiers européens - Stéphane Carré p. 65-74 Une préoccupation essentielle de l'OTRE, organisation patronale du secteur routier créée en 2000 à la suite d'un conflit interne à la Fédération nationale des transports routiers (FNTR), a été durant dix ans sa reconnaissance officielle de représentativité, reconnaissance lui permettant de participer aux négociations collectives en commission paritaire de branche. Dans le même temps, l'organisation s'est concentrée, d'un point de vue revendicatif, sur la politique routière de l'État français, axe a priori sans lien étroit avec une possible reconnaissance de représentativité. Mais il apparaît que l'obtention de cette reconnaissance par l'État autorise en fait l'organisation patronale à participer pleinement aux consultations institutionnelles ou informelles que l'Administration initie en matière routière.One of the main concerns of the OTRE – an employers' organization of the road sector set up in 2000 after an internal conflict within the National Federation of Road Transport (FNTR) – has been for ten years its quest for the official recognition of its representativeness. As a matter of fact, achieving recognition would empower it to take part in collective bargaining in sectoral joint commissions. During the same period, the OTRE focused its claims on the French state road policy, a line of conduct which didn't seem to have any close connection with a possible recognition of its representativeness by the state. Yet, it appears that such recognition enables it to fully take part in institutional or informal consultations the French administration initiates about road policies.
- Nouvelles règles de représentativité syndicale et de négociation collective à la SNCF : Une réforme sous tension - Dominique Andolfatto, Marnix Dressen p. 75-88 La SNCF (Société nationale des chemins de fer français) a traversé en avril 2010 un long conflit alors même qu'elle a été l'une des premières grandes entreprises françaises à mettre en œuvre la nouvelle loi sur la « démocratie sociale » qui redéfinit les règles de la représentativité syndicale et de la négociation collective. Si ce conflit a conduit à souligner les limites d'une réforme censée favoriser le dialogue, celle-ci n'en a pas moins modifié le paysage syndical caractéristique de l'entreprise ferroviaire, obligeant les acteurs des relations professionnelles à se remettre en cause et à innover. La loi du 20 août 2008 a ouvert un nouveau contexte juridique pour les acteurs des relations professionnelles, avec pour projet une transformation volontariste de ces dernières. L'étude se focalise d'abord sur ses effets concernant la structure du jeu des acteurs au sein de la SNCF puis sur le conflit de 2010 qui illustre les difficultés du changement dans le sens attendu par le législateur et les organisations qui l'ont soutenu. À travers cette étude de cas, l'application de cette réforme se révèle un bon analyseur des réalités du syndicalisme dans une entreprise où il compte encore beaucoup.The French National Train Administration SNCF (Société nationale des chemins de fer français) was the scene of a long labour conflict in 2010 and also one of the first major French firms to act out the new “démocratie sociale” law, which redefines the rules of trade union recognition and collective bargaining. While exposing some of the limits of the reform, specifically conceived to favor dialogue over conflict, the event nevertheless did alter the landscape of railway sector trade unionism whose traditions are deeply embedded, obliging labour organizations and management to question traditional practices and innovate. The 20th August 2008 law which notably claims to “modernize” labour-management relations has thus set out a new legal context in which actors are invited to find ways to do so. The present study begins by analyzing these structural changes and their consequences upon labour relations before focusing on the 2010 conflict. The event illustrates how difficult it is to introduce change, in the sense intended by this recent legislation and the labour and management organizations that supported it. The case study is useful for understanding current realities of labour relations within a major firm where they continue to play a major role.
- La spécificité de la représentation des journalistes en question : les implications de la loi du 20 août 2008 dans le secteur de la presse - Sophie Béroud, Cécile Guillaume p. 89-101 Le Syndicat national des journalistes (SNJ) bénéficie d'une disposition dérogatoire qui autorise la mesure de sa représentativité à partir d'un seul collège spécifique. Mais l'obtention de ce collège, le fait qu'il ne donne pas lieu à un rassemblement plus large (« journalistes et cadres »), suscite des tensions dans les entreprises tant se joue pour le SNJ, via l'agrégation de l'ensemble de ses résultats électoraux au niveau de la branche, le maintien de son rôle historique dans la profession. L'étude menée dans un grand groupe de presse permet de saisir comment cette stratégie spécifique peut entrer en contradiction avec des enjeux plus transversaux dans un contexte de restructurations économiques et d'affaiblissement des garanties collectives. L'article souligne l'importance stratégique que revêt désormais, en amont des élections professionnelles, la négociation du protocole relatif à l'organisation du scrutin et au découpage des collèges. Ce constat vaut particulièrement pour les syndicats catégoriels, dont le statut dérogatoire reste fragile, mais aussi pour les syndicats intercatégoriels, en fonction de leur base sociale et de leur influence effective sur les différentes catégories présentes dans l'établissement.In the context of the new 2008 statutory recognition legislation, the Syndicat national des journalistes (SNJ, national union of journalists), being a craft union, has managed to benefit from the right to have its audience measured separately, through either a specific ballot for journalists-only or a ballot including journalists and managers. At the workplace level, the negotiation of these two options with the other general unions generates numerous tensions and reveals the struggle the SNJ is ready to lead to maintain its dominance within the press sector. However, this case study led in a multinational company emphasizes the potential contradictions between this limited strategy and the need for unions' coalition in order to preserve employees' rights, in a context of corporate restructuring. More generally this article calls attention to the renewed significance union elections have gained in the French context where the main union confederations were granted an undisputable right to represent worker's interests.
- Représentation du travail et représentativité syndicale aux marges du salariat : le cas de la distribution directe - Karel Yon p. 103-118 La réforme de la représentativité syndicale permet-elle de lutter contre l'institutionnalisation des syndicats ? L'article s'interroge sur cette attente, qui se retrouve autant chez les acteurs de la réforme que chez les spécialistes du syndicalisme. En étudiant un secteur professionnel de constitution récente, la distribution directe, il montre que la réforme ne saurait répondre à un problème incorrectement formulé. L'institutionnalisation des syndicats est en effet un processus contradictoire, qui dissocie autant qu'il relie les salariés à leurs représentants. Cette précision conduit à étudier l'impact de la réforme de la représentativité syndicale de manière plus nuancée. La mobilisation des règles de représentativité dans les deux entreprises étudiées montre que les effets de la réforme en termes de syndicalisation s'avèrent ambivalents. Le nouveau régime de représentativité ne garantit pas davantage un contrôle plus étroit des salariés sur leurs représentants. Il accroît en revanche l'interdépendance des arènes de branche et d'entreprise, en tant que celle-là est désormais connectée à celles-ci via la procédure élective.Is the reform of union representativeness a solution to the problem of union institutionalization? The article addresses that question, raised by the reform as well as by labour specialists. Through the study of the newly built branch of leaflet distribution, it is shown that the reform cannot solve a problem which is incorrectly set. Union institutionalization is, indeed, a contradictory process, which separates as much as it links together workers and their representatives. This precision leads us to study the impact of the reform of union representativeness in a more nuanced way. The mobilization of the rules of representativeness in the two firms under study shows that the reform has ambivalent effects in terms of unionization. The new regime of representativeness doesn't guarantee a control of workers over their representatives any tighter. However, it reinforces the interplay between the branch and firms respective arenas, which are now connected through the electoral process.
- Le rôle de l'administration du Travail dans la reconnaissance de la représentativité des organisations professionnelles. : Interprétation et usages de l'ex-article L. 133-2 du Code du travail (1946-2006) - Jean-Pierre Le Crom p. 119-136 Cet article s'intéresse au rôle de l'administration du Travail dans l'appréciation de la représentativité des organisations patronales et des organisations syndicales de salariés n‘appartenant pas aux cinq grandes confédérations. À partir d'archives inédites, il décrit l'évolution du cadre bureaucratique des enquêtes de représentativité depuis 1936. Il analyse ensuite l'appréciation souple des cinq critères en vigueur jusqu'en 2008 (les effectifs, l'indépendance, les cotisations, l'expérience et l'ancienneté du syndicat, l'attitude patriotique pendant l'Occupation) et les pratiques différenciées selon qu'il s'agit d'organisations d'employeurs ou de salariés. Il met enfin l'accent sur la « doctrine » de l'Administration qui mêle objectivité (la norme des 5 % qui s'est imposée depuis le début des années 1980) et subjectivité (le rôle présumé que les organisations reconnues représentatives joueront dans le dialogue social).This article deals with the role the French administration plays in the evaluation of the representativeness of employers' organisations and workers' trade unions that don't belong to the five main confederations. Using archives that had never been studied before, it describes the evolutions the administrative frame of representativeness enquiries has undergone since 1936. It then analyses the flexible use made by the administration of the five evaluation criteria in force until 2008 (number of members, independence, union dues, how old and how experimented the union is, patriotic attitude during the German Occupation) and shows that the Labour administration acts differently whether it investigates an employers' organisation or a workers' union. It finally highlights the Labour administration's doctrine that combines objectivity (the rule of the five percent has prevailed ever since the beginning of the nineties) and subjectivity (it tries to anticipate the way organisations that would be granted representativeness would act in future collective negotiations).
- Robert Solow, Jean-Philippe Touffut (dir.), La fragmentation du travail. État, entreprises et marchés face à la spécialisation des économies. Colloque du Centre Cournot : Paris, Albin Michel, coll. « Collection présentée par Robert Solow », 2011 - Raul Sampognaro p. 137-139
- Catherine Sauviat, Laurence Lizé, La crise du modèle social américain : Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Économie et société », 2010 - Thierry Kirat p. 139-140
- Philippe Askenazy, Les décennies aveugles : emploi et croissance, 1970-2010 : Paris, Seuil, 2011 - Frédéric Lerais p. 140-142
- Anne Pezet, Éric Pezet, La société managériale. Essai sur les nanotechnologies de l'économique et du social : Montreuil, La ville brûle, 2010 - Yuri Biondi p. 142-143