Contenu du sommaire : Les économistes autrichiens 1870-1940
Revue | Cahiers d'économie politique |
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Numéro | no 51, automne 2006 |
Titre du numéro | Les économistes autrichiens 1870-1940 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Les économistes autrichiens (1870-1940) - Stéphane Longuet p. 7-25
- L'École autrichienne dans le panorama de la pensée économique : De sa naissance à la Deuxième Guerre mondiale - Gilles Dostaler p. 27-48 Les questions que nous nous posons sont celles de la nature, de l'homogénéité et de l'évolution de l'école autrichienne, entre son émergence dans les années 1870 et le déclenchement de la Deuxième Guerre Mondiale. C'est ensuite celle de son statut par rapport aux autres courants de la pensée économique. Les économistes rattachés à ce courant de pensée sont eux-mêmes en désaccord à ce sujet et mesurent diversement leur distance à une orthodoxie qui est elle-même en mouvement. Nous traiterons d'abord de la contribution de Menger, puis de celles de ses disciples immédiats. Nous nous pencherons enfin sur les contributions des économistes autrichiens entre les deux guerres mondiales.
- L'histoire de la pensée économique à l'épreuve de l'"universalisme" d'Othmar Spann - Jean-Jacques Gislain p. 49-68 L'économiste autrichien Othmar Spann (1878-1950) propose le terme « universalisme » pour qualifier, en opposition à l' "individualisme", la doctrine et la méthode consistant à poser en premier la totalité, la société, dans l'ordre logique d'analyse « fonctionnelle » des faits économiques. Spann applique alors cette approche universaliste à sa lecture de l'histoire de la pensée économique, opposant ainsi une lignée d'économistes universalistes (Müller, Fichte, Baader, Stein, List, Thünen, Roscher, Hildebrand, Knies, Bernhardi, Schmoller) à la lignée des économistes individualistes (Smith, Ricardo, Rau, Say, Menger, Jevons).
- L'apriorisme des Autrichiens - Maurice Lagueux p. 69-90 L'apriorisme radical prôné par Mises et Rothbard a été maintes fois dénoncé avec véhémence. Sans chercher le moindrement à réhabiliter cette thèse intempérante, on s'intéressera à l'intuition d'origine kantienne qui est à sa racine. En prenant pour exemple la "loi" de l'utilité marginale décroissante, on élaborera une expérience imaginaire qui permettra de comparer l'attachement des économistes envers ce genre de loi à celui que, selon Kuhn, les physiciens éprouvent à l'égard de leurs théories. Cette discussion permettra alors de préciser et d'illustrer en quoi consiste la condition d'intelligibilité dont on a cru indûment pouvoir dériver une thèse résolument aprioriste.
- Subjectivisme économique, figures du besoin et de l'utilité marginale à travers les éditions des Grundsätze (1871-1923) de Carl Meger - David W. Versailles p. 91-107 Cette contribution argumente que les Grundsätze de Carl Menger fondent le subjectivisme économique dans la théorie cognitive. L'article entre dans le détail des figures du besoin en liaison avec la notion de valeur d'usage. Il revient sur les figures de l'utilité pour distinguer les éditions des Grundsätze. La seconde édition (1923) a été le point de départ d'une lecture qui amoindrit l'originalité du raisonnement initial (1871) en gommant les aspects cognitifs de la représentation de l'individu. Avec les différentes figures du besoin et de l'utilité, dans le concept de valeur d'usage, le subjectivisme de Carl Menger existe en matière économique de façon autonome.
- La place de Sensory Order dans l'oeuvre de F.A.Hayek - Jack Birner p. 109-138 Bien que les perceptions des individus jouent un rôle central dans la théorie économique de Hayek des années trente, elle n'utilise pas la théorie psychologique que Hayek lui-même avait développée précédemment, et qui fut publiée, en 1952, dans The Sensory Order. Cependant, il s'agît d'un paradoxe apparent. The Sensory Order présente, en premier lieu, une théorie sur le rapport corps-âme, dont la théorie de la perception contenue n'est qu'une illustration. Les parties de l'?uvre de Hayek sur lesquelles la théorie de Sensory Order a exercé une influence importante sont sa méthodologie et sa philosophie sociale plutôt que son économie
- Morgenstern est-il un économiste autrichien ? - Christian Schmidt p. 139-155 L'article développe trois idées principales. En premier lieu, Morgenstern a été moins influencé dans ses premiers travaux par l'École économique autrichienne que par les discussions philosophiques autour du cercle de Vienne. En second lieu, c'est dans cette perspective qu'il a soulevé les problèmes fondamentaux posés par la prévision d'un équilibre économique qui sont à l'origine de sa rencontre avec Von Neuman. Enfin, sa contribution à l'élaboration de la théorie des jeux l'a conduit à retrouver la tradition économique autrichienne, à travers une analyse institutionnelle des phénomènes sociaux.
- L'opposition entre Menger et Böhm-Bawerk sur la théorie du capital et de la production - Jacques-Laurent Ravix p. 157-176 L'article propose un nouveau point de vue sur l'opposition fameuse entre Menger et Böhm-Bawerk, présentée généralement comme une opposition entre une vision « subjectiviste » et une vision "matérialiste" du capital et de la production. A partir d'une confrontation des textes des deux auteurs, nous montrons que Böhm-Bawerk est en fait un partisan quasi-dogmatique de la conception réaliste de Menger sur la production capitalistique et de sa théorie de l'imputation des valeurs des biens de consommation à celle des biens de production. En cherchant à concilier ces deux aspects, Böhm-Bawerk révèle cependant les contradictions inhérentes à la méthode autrichienne.
- Hayek et Knight (1933-1936). La controverse sur le capital - Stéphane Longuet p. 177-195 Knight s'est lancé dans une violente attaque contre la théorie autrichienne du capital et dans une polémique avec Hayek. L'article montre que si l'opposition porte apparemment sur le concept de période de production et, plus précisément, sur celui de période moyenne, en réalité, des clivages plus profonds divisent les deux auteurs : celui de la pertinence de la théorie autrichienne comme théorie générale du système productif et, au-delà, celui de la capacité de l'analyse économique à expliquer la dynamique à long terme. C'est ainsi le projet hayékien lui-même qui va se trouver ébranlé par cette polémique.
- Les transferts de capitaux chez Otto Bauer - Michel Rosier p. 197-216 L'article propose une reconstruction analytique de la critique qu'Otto Bauer adressa à la thèse de Rosa Luxemburg sur l'accumulation du capital : les hausses de la composition organique du capital supposent des transferts de capitaux. Le sens de cette critique se dégage alors : il est illégitime d'étudier les tendances de longue période du système capitaliste en faisant abstraction des phénomènes de courte période relatifs à la concurrence des capitaux.
- Finance et reproduction : la théorie des crises de Rudolf Hilferding - Christian Tutin p. 217-239 Le Capital financier d'Hilferding contient une théorie des crises qui tente d'intégrer à une approche en termes de reproduction, l'analyse des mouvements conjoints du taux de profit et des prix relatifs et celle des conditions de financement de l'accumulation. Son schéma de déroulement des crises met au c?ur de l'analyse la montée des coûts de reproduction du capital fixe pendant les phases d'expansion, ce qui le rapproche des versions autrichiennes de la théorie monétaire des cycles, autant que de Marx. Son analyse monétaire est cependant plus proche de Keynes que d'Hayek. Hilferding reste une source d'inspiration pour toute théorie des crises inspirée de Marx.
- Le crédit et le capitalisme : la contribution de J. A. Schumpeter à la théorie monétaire - Odile Lakomski-Laguerre p. 241-264 L'objectif de ce papier consiste à considérer la théorie monétaire de Schumpeter, non pas comme un aspect, mais plutôt comme le point de départ logique d'un examen de son projet théorique : fournir une analyse susceptible de saisir les phénomènes complexes de la dynamique économique capitaliste. La théorie monétaire de Schumpeter, fondée sur le concept de comptabilité sociale, offre un édifice analytique qui englobe aussi bien les situations d'équilibre de l'économie que le déséquilibre engendré par l'évolution. L'étude de la monnaie, des banques et du crédit donne une réponse spécifique au problème de la coordination économique dans le contexte de la dynamique capitaliste ; en effet, plus que le marché, ce sont les institutions monétaires qui encadrent l'action des entrepreneurs.
- Rudolf Hilferding : des avancées novatrices (monnaie de crédit, barrières à l'entrée...) - Christian Palloix p. 265-285 R. Hilferding s'appuie au départ sur un dispositif marxiste théorique très orthodoxe et appauvri. Toutefois une histoire surévaluant le rôle des banques et monopoles à la fin du XIXe et au début du XXe siècle le conduit au relâchement des hypothèses de départ et à des apports novateurs, bien que méconnus : un comportement des monopoles fondé sur des barrières à l'entrée leur conférant un 'pouvoir de marché', une planification de la production des monopoles en système de prix fictif, la tendance à la différenciation des taux de profit, la monnaie de crédit comme monnaie spécifique du capitalisme, le capital financier comme 'moment' et non exclusivement comme fraction de capital, etc. Néanmoins les failles du dispositif de départ convoqué ne lui permettent pas d'ériger un nouveau dispositif théorique cohérent sur l'analyse du capitalisme, avec un rabattement ultime sur l'orthodoxie marxiste.
- L'accumulation du capital - Otto Bauer p. 287-309