Contenu du sommaire : Le maillage Suisse
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Numéro | no 72-73, avril-septembre 2008 |
Titre du numéro | Le maillage Suisse |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier : « Le maillage suisse »
- La Suisse est-elle un espace première classe ? - Géraldine Pflieger p. 4-12
- Développement international des industries de réseaux et construction d'une identité nationale : les cheminements technologiques et institutionnels des villes suisses vers un système stabilisé au XIXe siècle - Serge Paquier p. 13-26 L'objectif de cette contribution est de cerner les mécanismes à l'?uvre dans la création des réseaux modernes centralisés. Ils sont composés en amont de solutions à forte intensité technologique capables de produire sur un espace réduit (station de pompage, usine à gaz, bâtiment des turbines, centrale hydroélectrique) un fluide en très grande quantité, et en aval de vastes dessertes qui relient une multitude de consommateurs densément répartis dans l'espace urbain. L'analyse historique montre que le processus démarra dans le creuset novateur londonien au début du XVIIIe siècle par incorporation de la machine à vapeur au réseau d'eau existant, qui connut par la suite une importante croissance des dessertes. Bridé par le retour en force des solutions extensives (les dérivations d'eau de source), le concept de réseau moderne centralisé se transposa dans un secteur urbain connexe : l'éclairage. Ainsi, le gaz d'éclairage manufacturé connut à partir des années 1820-1830 une large diffusion dans les villes européennes. La diffusion des réseaux modernes en Suisse se heurta à des institutions municipales traditionnelles, qui résistèrent le plus longtemps possible, jusque vers les années 1850-60. Mais, s'enclenche assez rapidement un processus d'appropriation et d'adaptation des réseaux gaziers édifiés par des constructeurs nomades français et allemands. On constate des analogies évidentes avec le processus créatif qui eut lieu 150 ans plus tôt en Angleterre. La différence réside dans une complexité plus grande qui mobilisa créateurs de réseaux, fournisseurs d'équipement et hautes écoles d'ingénieurs. Ainsi la Suisse à la suite de l'Angleterre, de la France et de l'Allemagne apporta une contribution majeure à la progression des réseaux modernes centralisés.
- Transporter l'eau : regards croisés sur les réseaux urbains et ruraux de l'eau en Suisse - Emmanuel Reynard p. 27-38 Ressource-fluide, l'eau se laisse transporter et stocker pour satisfaire divers usages, dont les modalités et l'intensité ont changé au cours du temps. Cet article se propose de revisiter l'évolution historique du transport de l'eau en milieu rural et urbain. L'analyse croisée de trois usages de l'eau (eau de boisson, irrigation et hydroélectricité) et de la problématique de l'aménagement des eaux met en évidence l'interaction complexe entre la ville et son hinterland rural dans le domaine de l'eau. L'analyse montre que dans les trois domaines, les besoins importants et géographiquement localisés (prairies de fauche, villes en forte croissance, développement de l'hydroélectricité à accumulation) ont nécessité le recours à des transports au long cours et le développement de réseaux d'eau importants. Dans le domaine de l'aménagement, le XIXe et le XXe siècle ont considérablement artificialisé les réseaux naturels existants et les ont complétés par un nouveau réseau d'origine anthropique. Le développement de ces réseaux s'est accompagné de la création et de la transformation des institutions de gestion. Dans plusieurs cas, on a assisté à une rivalité entre les acteurs indigènes et l'influence d'acteurs allochtones, pourvoyeurs de capitaux notamment. La situation actuelle est caractérisée par une prédominance de la gestion par problèmes sur le modèle de la gestion intégrée par bassins versants et montre une certaine tension entre une gestion urbano-centrée, guidée par l'évolution des besoins des zones métropolitaines de la Suisse, et le modèle de la gestion par bassins versants, coordonnant l'ensemble des besoins et la disponibilité de la ressource à l'échelle de l'hydrosystème.
- « Always at your service ! » Swiss policy-making in the private railways sector from 1902 to the 1970s - André Kirchhofer, Jonas Steinmann p. 39-48 Au cours du XXe siècle, les chemins de fer suisses, qui étaient considérés comme une anomalie puisque constitués d'un secteur étatique et d'un secteur soi-disant « privé », rencontrèrent des difficultés financières, comme les chemins de fer d'autres pays. La plupart des entreprises exploitèrent à perte et connurent une faible rentabilité dès qu'elles furent privées de leur position de monopole avec la montée en puissance des transports routiers. Mais contrairement aux autres pays européens, la Suisse a renoncé à démanteler son système ferroviaire, et ce, à grande échelle. Même dans les zones éloignées où le trafic de marchandises et de voyageurs est devenu moins rentable ? et souvent, très peu rentable ? durant des décennies, le réseau est resté le même que celui qui avait été construit au XIXe et au début du XXe siècle. Considérant que des entreprises privées auraient couru à la faillite dans de telles conditions, l'article cherche à comprendre comme la politique ferroviaire suisse s'est accommodée des contraintes du privé, et surtout, pourquoi elle l'a fait. Pour y répondre, il faut mettre en avant le fait que l'État a constamment et généreusement subventionné le secteur ferroviaire, ce qui était dû à la conviction forte que les compagnies de chemin de fer étaient absolument indispensables au développement économique équilibré du pays dans son ensemble, c'est-à-dire y compris les régions montagneuses. D'autre part, les compagnies elles-mêmes ne comptèrent pas sur ces subventions publiques (à propos desquelles certains économistes les condamnaient), mais essayèrent par exemple de réformer leurs systèmes tarifaires ? dans un contexte décevant où elles en furent dissuadées par certaines associations commerciales.
- Les impacts de la régionalisation et de la libéralisation sur la durabilité du secteur ferroviaire en Suisse - Stéphane Nahrath, Patrick Csikos, Felix Buchli, Markus Rieder p. 49-64 Cet article analyse les transformations en cours (régionalisation et libéralisation) du secteur ferroviaire en Suisse, ainsi que leurs impacts sur la durabilité technique, économique, sociale et écologique de cette industrie de réseau. Il mobilise pour ce faire le cadre conceptuel des régimes institutionnels des ressources infrastructurelles qui implique une lecture de ces réformes sous l'angle aussi bien des politiques publiques que des droits de propriété. Cette contribution souligne l'importance séculaire du changement de régime en cours dans ce secteur et identifie les nouveaux enjeux de régulation découlant de la libéralisation et de la régionalisation du secteur.
- Rail 2000: Infrastructure Modernization in the Light of the National Transport Policy - Mario Keller, Roman Frick, Fritz Sager p. 65-77 Rail 2000 is the most comprehensive single extension and modernization project for railway infrastructure in recent Swiss history. The present article discusses the first stage of Rail 2000 (B21) in terms of both its effects and the question of how these fit into Swiss federal transport policy. The empirical basis of the study is the global evaluation of B21. The analyses show that the project has broadly achieved its overall goals of more frequent, more rapid, more direct, and more comfortable routes. We have also seen positive effects regarding shifts on the demand side and a good level of cost-effectiveness. Correspondingly, the project fits well into the overall goal of Swiss transport policy, which is to improve the standard of public transport on offer. B21 also corresponds to the overall federal transport policy goals regarding modal split, coordination of land-use and transport, and compatibility with EU policy. However, the coherence analysis also shows that some questions remain open for the future. These relate mainly to three points : first, the demand for equal regional access has still to be met ; second, the separation between long distance transport and regional transport is likely to cause capacity deficiencies in the near future if transport volume continues to increase ; third, the findings raise the question of whether a further increase in railway traffic volume as a result of better offers (planned in the second phase of Rail 2000) is in fact a desirable development for the future.
- Swiss telecommunications policy : From state monopoly to intense regulation - Alex Fischer p. 78-91 Les télécommunications sont l'un des exemples les plus fascinants des changements de politique d'infrastructure sous l'effet des pressions européenne et internationale. La présente contribution offre une analyse diachronique des réformes majeures en matière de politique de télécommunications en Suisse. A l'origine, les caractéristiques particulières du secteur ont créé une structure monopolistique et étatique du marché. Alors que ce modèle a persisté pendant plusieurs décennies, un changement au niveau mondial a modifié les conceptions sur lesquelles la politique initiale se basait. En Suisse, une série de réformes consécutives ont bouleversé la politique des télécommunications au niveau de la régulation, de l'offre et de la propriété : passage du monopole à la concurrence (fortement regulée) ; transformation de la régie fédérale des PTT en une entité partiellement privatisée, Swisscom ; création de nouvelles autorités regulatrices ainsi que d'un nouveau cadre légal pour le service universel. La présente contribution explore les raisons qui justifiaient l'ancienne politique publique et décrit les structures sous-jacentes à la nouvelle approche. La partie principale de l'article est dédiée à l'analyse des raisons du changement de la politique publique. L'article montre que les conditions générales telles que le développement technologique, l'idéologie, la théorie économique, ainsi que la pression internationale et européenne, ont radicalement changé en l'espace de seulement quelques années. Ces facteurs ont modifié la structure des incitations et les rapports de force au niveau national. Parmi les acteurs politiques principaux, personne ne pouvait fondamentalement résister à la réforme. Ainsi, les acteurs sceptiques ont offert leur soutien à la réforme en échange de concessions spécifiques dans des domaines d'une importance particulière pour eux.
- Le maintien du tramway envers et contre tout : Politique des transports et démocratie directe à Bâle - Christophe Jemelin, Vincent Kaufmann p. 92-107 Si la suppression des réseaux de tramway dans les villes de Suisse romande (une ligne exceptée à Genève) s'est effectuée sans remous ni consultation populaire, le cas de Bâle éclaire d'un jour particulier le rôle de la démocratie directe dans l'évolution des politiques de transport. En effet, les discussions ont été vives dès les années 1950 sur le maintien ou non du tramway, et de nombreuses votations ont été organisées. A travers une analyse historique, l'article montre que c'est davantage le principe de mise à l'agenda politique que le résultat des votations qui a débouché sur le maintien du réseau, puisque certains votes négatifs ont été contrés par une stratégie gouvernementale forte. Il apparaît que la présence d'un référentiel commun autour de la priorité à donner aux transports publics est également un élément explicatif du maintien des tramways, qui n'est pas d'ordre culturel suisse alémanique comme on l'entend souvent (les tramways ont été supprimés à Schaffhouse, St-Gall, Lucerne...), mais qui s'alimente par une tradition d'innovation : premier réseau tram-train de Suisse, première communauté tarifaire, premier abonnement écologique à prix réduit, premier RER transfrontalier. Le passage de la région bâloise à l'échelle trinationale (Suisse, France, Allemagne) illustre d'ailleurs la diffusion de ce référentiel par capillarité en Allemagne, les lignes RER étant exploitées aux normes helvétiques par une filiale des Chemins de fer fédéraux suisses, alors que la frontière française semble plus imperméable.
- Re-scaling network governance. The evolution of public transport management in two Swiss agglomerations - Daniel Kübler, Philippe Koch p. 108-119 This article analyses the up-scaling of territorial governance in the two Swiss agglomerations of Zurich and Bern. It focuses on the evolution, over the last half century, of the governance schemes established to manage a territorial network crucial to the functional integration of urban regions in Switzerland : urban public transport. Historical data is used to demonstrate that a shift in the territorial scope of urban public transport management has indeed taken place during the time period under scrutiny. However, specific political configurations as well as infrastructural settings have led to remarkable differences in the territorial management of urban public transport between the two agglomerations. This is especially striking, given the similarities of the initial governance scheme, as well as the dynamics of territorial restructuring that are comparable across the two places. We conclude that, while an up-scaling of territorial governance has occurred in both agglomerations, the different trajectories are the result of a process in which infrastructural pre-conditions combine with political conflicts to produce diverging forms of area-wide territorial governance.
- Services publics municipalisés et ouverture des marchés du gaz et de l'électricité. Risques et perspectives dans le contexte suisse - Jean-Marc Revaz p. 120-125
- Les municipalités au c?ur de la politique énergétique Suisse. Quel degré de politisation ?. Entretien avec Daniel Brélaz - Géraldine Pflieger p. 126-133
Rubriques - Le sens de l'événement
- CEVA, un projet centenaire au service de l'agglomération genevoise - Hanja-Niriana Maksim p. 134-137
Rubriques - Portrait d'entreprise
- L'industrie de la finance et les infrastructures (2) : les fonds privés d'investissement - Dominique Lorrain p. 138-151
Rubriques - Histoire de courbe
- L'industrialisation de l'auto-partage en Suisse - Michael Flamm p. 152-160
Repères bibliographiques
- Notes de lecture - p. 161-171
- À signaler - p. 171-172
- Revue des revues - p. 172-178