Contenu du sommaire : Sorties de guerre au XXe siècle

Revue Histoire@Politique Mir@bel
Numéro no 3, septembre 2007
Titre du numéro Sorties de guerre au XXe siècle
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Avant-propos

    • Sortir de la guerre : jalons pour une histoire en chantier - Bruno Cabanes, Guillaume Piketty p. 1 accès libre avec résumé
      Les sorties de guerre ont été largement négligées par la plupart des historiens. Pourtant, ces périodes sont essentielles de bien des points de vue, à commencer par la reconstruction des identités et la réintégration des soldats, la genèse des récits d'après-guerre et le développement des traumatismes individuels et collectifs. Cet article, qui étudie plus spécifiquement la sortie des deux conflits mondiaux en comparaison, examine les complexités du processus de démobilisation.
  • L'ennemi

    • France, 1944 : maintien de l'ordre et exception judiciaire. Les cours martiales du régime de Vichy - Virginie Sansico p. 2 accès libre avec résumé
      Créées en janvier 1944 au moment de l'ultime radicalisation du régime, les cours martiales ont condamné à mort et fait exécuter environ deux cents résistants, ce qui constitue le bilan le plus meurtrier de toutes les juridictions de Vichy. Pourtant, elles ont longtemps été considérées comme des tribunaux d'exception de second plan, en raison des représentations qui pèsent sur le « dernier Vichy » et entretiennent la confusion entre la Milice et le secrétariat général au Maintien de l'ordre. Cet article montre que les cours martiales étaient des instruments de répression étatiques parfaitement structurés et à l'organisation centralisée, et non pas de « simples » exactions miliciennes.
    • «Au nom de la Patrie ! A mort les traîtres». La répression des inciviques belges de 1914 à 1918 - Laurence van Ypersele p. 3 accès libre avec résumé
      Dès 1918, la Belgique fut confrontée à des problèmes que la plupart des pays européens ne découvriront qu'au lendemain de la Deuxième guerre mondiale. Comment sort-on d'une guerre d'occupation ? Comment reconstruit-on un Etat affaibli par l'occupation ? Comment répond-on à la demande collective de justice ? Le présent article interroge l'image de ceux que la population voulait voir châtiés, au nom de la "Belgique Martyre". Car cet imaginaire apparaît bien comme le miroir inversé du culte de la Patrie.
  • Retours de guerre

    • Le Grand retour, URSS 1945-1946 - Nicolas Werth p. 4 accès libre avec résumé
      Si tous les pays belligérants furent confrontés, en 1945-1946, à l'expérience du retour des combattants, des prisonniers de guerre, des évacués et des déportés civils, en URSS ces problèmes prirent un relief particulier à cause de l'ampleur des masses humaines en jeu (30 millions de personnes) et du rapport pathologique au monde extérieur entretenu par un pouvoir politique obsédé par la « contamination par les influences étrangères » des quelque 12 à 13 millions de Soviétiques, militaires et civils, qui pour la première fois de leur vie étaient sortis d'URSS. L'article analyse les conditions du retour de quatre grandes catégories de citoyens soviétiques : les évacués, les combattants, les prisonniers de guerre et les rapatriés civils.
    • Economie morale de la reconnaissance. L'Ordre de la Libération au péril de la sortie de Seconde guerre mondiale - Guillaume Piketty p. 5 accès libre avec résumé
      L'Ordre de la Libération forme la part la plus prestigieuse de l'économie morale de la reconnaissance créée par la France libre. A la Libération, celle-ci fusionna avec les critères habituels de la reconnaissance française selon des modalités qui firent la part belle aux distinctions nées de la volonté du général de Gaulle. La démission de ce dernier, en janvier 1946, ne modifia pas fondamentalement la donne, sauf pour les titulaires de la croix de la Libération. Ceux-ci se retirèrent sur un Aventin duquel il ne descendirent brièvement qu'aux débuts de la Ve République.
    • La dernière génération du feu ? Jalons pour une étude des anciens combattants français de la guerre d'Algérie - Raphaëlle Branche p. 6 accès libre avec résumé
      Cet article propose quelques pistes pour une étude des anciens combattants de la guerre d'Algérie (1954-1962). Revenus d'une guerre qui n'avait pas ce nom, ils furent des anciens combattants en mal de reconnaissance. C'est pourquoi cette histoire doit faire une part importante aux caractéristiques du conflit qui éclairent les vécus différenciés de ses acteurs. Elle se situe précisément à l'articulation des discours officiels et des pratiques sociales. Elle doit, en particulier, se pencher sur le poids des conflits mondiaux dans les images que la société française se fit de ces hommes, pendant et après la guerre.
  • Démobilisation culturelle

    • Expériences enfantines du deuil pendant et après la Grande Guerre - Manon Pignot p. 7 accès libre avec résumé
      Le deuil, compris à la fois comme pratique et comme sentiment, est intrinsèquement lié à l'expérience enfantine de la Grande Guerre : deuil personnel, deuil observé ou deuil de la communauté toute entière, il devient une réalité omniprésente, qui concerne tous les enfants. Sur ces derniers repose aussi le poids des morts et de leur mémoire. L'injonction mémorielle dont les enfants deviennent les principaux destinataires ne rend-t-elle pas le deuil infini ? Le caractère infini de la douleur de la perte ne rend-t-il pas dès lors impossible l'achèvement du deuil comme pratique ?
    • Réparer, réconcilier, oublier : enjeux et mythes de la démobilisation scientifique, 1918-1925 - Anne Rasmussen p. 8 accès libre avec résumé
      Après une intervention des « sciences » dans la Grande Guerre qui fut opérationnelle autant qu'idéologique, les obstacles à la conversion des scientifiques au temps de paix furent nombreux, notamment dans le domaine particulier que constituait l'organisation internationale des institutions savantes. Le texte analyse l'horizon d'attente de la démobilisation culturelle des savants, façonné par des représentations de l'activité scientifique – coopérative, pure, morale – développées dans la seconde moitié du XIX e siècle et qui déterminèrent la mesure des succès et des échecs de la démobilisation, au moins sur le plan symbolique.
    • 1918-1920, des tranchées aux stades. Quelques éclairages sur la sortie de guerre des sportifs français et des fédérations de football européennes - Paul Dietschy p. 10 accès libre avec résumé
      Depuis le début du mois d'août 1914, les périodiques et les fédérations dédiés au sport, ont contribué à alimenter une culture de guerre animée par l'esprit de croisade. Au printemps 1918, l'exemple du quotidien L'Auto et de son directeur Henri Desgrange montre que la haine de l'ennemi s'accompagne d'une volonté de le punir. C'est ce qu'expriment les dirigeants du sport français ainsi que ceux des fédérations de football alliées qui plaident dès novembre 1918 pour l'exclusion des représentants des puissances centrales des relations sportives internationales. Toutefois, la sortie de guerre s'exprime aussi à l'échelle hexagonale par une démocratisation et une standardisation des pratiques sportives dont témoigne le succès du ballon rond.
    • Sortie de guerre et enjeux urbains : histoire de deux projets parisiens (1919-1939) - Fabienne Chevallier p. 11 accès libre avec résumé
      Deux projets parisiens sont étudiés ici à la lumière des atouts et des faiblesses de la capitale à l'issue du premier conflit mondial : les manifestes de Le Corbusier pour Paris (1922 et 1925) et la Cité universitaire, qui prend le nom de Cité internationale universitaire en 1925. Ce deuxième projet est animé par les idéaux pacifistes, tandis que le premier est interprété comme le premier acte de l'urbanisme moderne du XX e siècle. L'étude des contextes, des discours de propagande et des projets architecturaux montre, derrière les intentions affichées, certains traits communs : un internationalisme mêlé de nationalisme, la volonté de redorer le prestige de Paris, l'importance donnée à la communication. Rêves de puissance, américanisme, mémoire du conflit et nostalgie du passé subsistent dans ces deux projets typiquement modernes et tournés vers l'invention d'un « homme nouveau ».
    • Sortir de la guerre civile à retardement : le cas espagnol - Sophie Baby p. 12 accès libre avec résumé
      L'Espagne présente un cas de sortie de guerre « à retardement » puisque celle-ci a été reportée plus de trente ans après la fin de la guerre civile en 1939. C'est en effet la transition à la démocratie, amorcée par la mort de Franco en 1975, qui constitue la période clef du modèle espagnol de réconciliation nationale. Celui-ci, fondé sur l'amnistie réciproque des crimes du passé, est aujourd'hui dénoncé par la voix des vaincus qui s'impose dans l'espace public, relayée par le gouvernement Zapatero. Comment expliquer les choix fondateurs effectués alors ? Au poids des représentations actives du passé, ne convient-il pas d'ajouter celui, souvent oublié, de la violence politique du présent ? La pacification espagnole ne repose-t-elle pas dès lors sur un amalgame trompeur entre les crimes de la guerre civile, de la dictature franquiste et de la jeune démocratie, à l'origine des frustrations aujourd'hui révélées ?
  • Vari@rticles

    • A contre histoire. Gaston Clémendot, instituteur pacifiste (1904-1952) - Olivier Loubes p. 13 accès libre avec résumé
      Le parcours de Gaston Clémendot reflète les ambivalences du pacifisme français dans le premier XXe siècle. De 1904 à 1952, cet instituteur socialiste et syndicaliste milite et écrit des manuels scolaires : jusqu'en 1922 il agit pour que l'enseignement de l'histoire aux enfants soit « impartial », c'est-à-dire pour lui internationaliste et pacifiste mais sans oublier la défense de la patrie. Il est alors, comme la plupart des maîtres, un pacifiste patriote. A partir de 1923 il combat pour la suppression de l'histoire à l'école primaire car « l'histoire c'est le contraire de la paix ». Ce tournant radical, contrecoup de la Grande Guerre, le fait devenir un pacifiste intégral, même pendant la Deuxième guerre mondiale contrairement à la plupart des instituteurs.
    • L'entretien de recherche en histoire : statut juridique, contraintes et règles d'utilisation - Florence Descamps p. 14 accès libre avec résumé
      Le développement de la pratique de l'entretien en sciences humaines et sociales, la constitution de corpus oraux à caractère patrimonial ou scientifique, le développement de l'histoire du temps présent et du recours aux témoins, la montée des problématiques de valorisation et de mise à disposition du public conduisent à s'interroger sur la nature et le statut des témoignages oraux obtenus par voie d'entretien, ainsi qu'aux règles juridiques qui enserrent leur création, leur propriété intellectuelle, leur diffusion et leur exploitation dans un environnement scientifique, culturel ou pédagogique.
  • Sources

    • Un entretien avec Jean Mendelson, directeur des archives du ministère des Affaires étrangères - Yves Denéchère p. 15 accès libre avec résumé
      Le ministère français des Affaires étrangères assure lui-même la conservation et la mise à disposition des chercheurs de ses archives qui représentent en volume comme en qualité une source essentielle pour l'histoire des relations internationales. Un grand projet en cours de réalisation vise à l'installation d'un nouveau centre de conservation et de consultation sur le site de La Courneuve. Jean Mendelson évoque les modalités de ce déménagement d'une ampleur exceptionnelle. Il précise notamment quelles seront les conséquences néfastes pour les lecteurs pendant cette opération, mais aussi les meilleures conditions d'accueil qui seront offertes par la suite. Les deux autres parties de l'entretien portent sur les réflexions du directeur des archives du ministère des Affaires étrangères sur la politique de dérogation qui est suivie au Quai d'Orsay et sur la collecte des sources orales.
  • Pistes & débats

    • De la Grande Alliance à l'affrontement armé Est-Ouest (1944-1950) : origines de la Guerre froide et débats historiographiques - Justine Faure p. 16 accès libre avec résumé
      Depuis les années 1950, les origines de la Guerre froide ont donné lieu à des débats particulièrement vifs et nombreux. Si les historiens ont pendant un temps cherché à établir des responsabilités, ils s'attachent désormais à comprendre les mécanismes de la dissolution de la Grande Alliance. Grâce à l'ouverture partielle des archives de l'ancien bloc soviétique, les historiens disposent de nouvelles sources, qui parfois posent plus de questions qu'elles n'en résolvent. Cependant, elles permettent de mieux comprendre les objectifs de Staline au sortir de la guerre et de modifier la chronologie classique des origines de la Guerre froide. Cet article se propose donc d'offrir aux lecteurs un panorama de ces débats et un état des lieux des dernières avancées historiographiques.