Contenu du sommaire : Cultures du progrès

Président de l'Université du Wisconsin entre 1874 et 1887, le philosophe John Bascom profita de son mandat pour étendre ses théories aux problèmes sociaux et économiques. C'est ainsi qu'il se trouva à l'avant-garde des mouvements en faveur de la prohibition, des droits des femmes et des droits syndicaux. Il contribua aussi au progressisme du Wisconsin par son influence sur l'un de ses étudiants, le futur gouverneur Robert M. LaFollette, qui lui vouait une immense admiration. Cet article analyse l'apport de Bascom à la «culture du progrès».

La construction des programmes d'enseignement et de recherche de la Graduate School of Business Administration est décrite ici comme la rencontre de plusieurs groupes de réformateurs : autour du doyen Edwin F. Gay, des universitaires sont à la recherche de nouvelles approches des sciences économiques ; leurs partenaires dans le monde des entreprises cherchent des alliés pour défendre diverses conceptions de l'efficacité, mais ne représentent pas une élite managériale homogène et bien établie. La mise en oeuvre du projet de « science des affaires » fait ressortir la rivalité entre les traditions culturelles du travail en usine et celles du commerce et de la banque, ravivée aussi par les controverses politiques sur la réglementation de l'économie.

Après la Première Guerre mondiale, des ouvrières américaines s'associèrent à leurs homologues d'autres pays pour élaborer des normes internationales concernant le droit du travail. Encouragée par des militantes françaises et anglaises, l'American Women's Trade Union League convoqua en 1919, à Washington, un Congrès International des Travailleuses. Cet article analyse les propositions législatives concernant les femmes et le droit du travail formulées à cette occasion, mais aussi, plus tard, par l'organisation à laquelle le Congrès donna naissance, la Fédération Internationale des Travailleuses. Il s'attarde aussi sur les difficultés rencontrées par ces militantes pour donner forme à une politique internationale progressiste, et sur l'importance historique de cette expérience internationaliste.

Cet article examine Hell's Hinges (1916), un « classique » du western signé William S. Hart, dans le contexte culturel de l'ère progressiste. Une analyse détaillée de l'intrigue et des personnages montre que le film devrait plutôt être qualifié de mélodrame, genre dont le cadre est généralement la grande ville. Corrompue par l'alcool et par la prostitution, la bourgade du Far West dépeinte par Hart ressemble à la jungle urbaine que de nombreux réformateurs progressistes espéraient pouvoir moraliser. Si le film se conclut dans un déchaînement de violence vengeresse digne de l'Ancien Testament, répondant ainsi aux attentes d'un public populaire et ouvrier, il n'en reflète pas moins l'atmosphère particulièrement complexe de l'Amérique progressiste, mélange de moralisme protestant et d'enthousiasme pour des réformes concrètes. La relation chiasmique entre les quatre principaux personnages (Blaze le « méchant-gentil », Robert le pasteur efféminé, sa sœur Faith, véritable figure rédemptrice, et Dolly, fille de saloon tentatrice) offre une image pertinente de l'instabilité des codes moraux et culturels d'une époque où la féminisation de la culture religieuse, l'émergence de la « Nouvelle Femme » et la réaffirmation de l'individualisme masculin semblaient redéfinir l'Amérique victorienne.

Intellectuel de gauche réputé et polémique, Howard Zinn (1922-2010) est considéré comme un représentant de la nouvelle histoire sociale, hissé au rang de figure publique suite aux grands mouvements sociaux des années 1960. À la suite de la publication de son ouvrage majeur A People's History of the United States from 1492 to the Present (1980), il est devenu un représentant incontournable de « l'histoire par en bas ». Les polémiques historiographiques et politiques soulevées par son oeuvre témoignent de son influence en tant qu'intellectuel engagé. Son décès soudain en janvier 2010 a interrompu une longue trajectoire historique de passeur d'expériences entre générations militantes. En effet, les expériences fondatrices de sa vie le lient à des traditions et à des réseaux politiques antérieurs aux transformations intellectuelles dues au maccarthysme. Dans un entretien récent, Zinn est interrogé sur sa conception du progressisme dans le contexte des élections présidentielles américaines de 2008. Se fondant en partie sur sa propre expérience, il rend compte, dans la discussion qui suit, de la fluidité idéologique particulière qui a présidé à l'histoire du progressisme au vingtième siècle.

Musil apparaît comme un penseur qui se situe au confluent de la littérature et de la philosophie européennes. L'intérêt pour sa conception d'un sujet « sans qualités », longtemps comprise en référence à la tradition autrichienne et à Mach, ne rend pas compte de sa vision du caractère ni de son attachement « romantique » à la subjectivité. C'est bien plutôt l'héritage d'Emerson qui éclaire son ambition de sauver le sujet, à travers des notions telles que le « dixième caractère » et l'« homme du possible ».