Contenu du sommaire : L'agence financière, volume 1
Revue | Sociétés contemporaines |
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Numéro | no 92, 2013 |
Titre du numéro | L'agence financière, volume 1 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Édito - Muriel Darmon, Florence Haegel, Wilfried Rault, Maud Simonet p. 5
- Sociologie de l'agence financière : enjeux et perspectives Introduction : Introduction - Sabine Montagne, Horacio Ortiz p. 7-33
- Investir, une décision disséminée : Enquête de terrain sur les dérivés de crédit - Horacio Ortiz p. 35-57 Ce texte se base sur une enquête de terrain auprès de gérants de fonds investissant l'argent de leurs clients en dérivés de crédit. L'analyse montre que les employés se présentent comme porteurs de la décision d'investir, en appliquant des procédures qui impliquent une figure théorique, multiple et contradictoire, de l'investisseur individuel. Cependant, leur décision est en fait le résultat des interactions en partie hiérarchiques au sein de leur entreprise, et suit les règles du réseau d'experts au sein duquel les dérivés de crédit sont produits et échangés. La décision n'est pas celle d'un « investisseur » individuel, mais elle est disséminée dans ces espaces sociaux.Investing : A Disseminated Decision. Fieldwork-Based Research on Credit Derivatives. This text is based on fieldwork research carried out among fund managers investing their clients' money in credit derivatives. The analysis shows that employees present themselves as the source of the decision to invest, by applying procedures that imply a multiple and contradictory theoretical figure of an individual investor. Yet, their decision is actually the result of the partly hierarchical interactions within their company, and it follows the rules of the network of experts where credit derivatives are produced and exchanged. Thus, the decision does not belong to an individual “investor”, but it is disseminated in these social spaces.
- Les « dealers » de la dette souveraine
: Politique des transactions entre banques et État dans la grande distribution des emprunts français - Benjamin Lemoine p. 59-88 Cet article analyse les interactions commerciales nouées autour de la dette souveraine française entre l'État et les banques commerciales. L'enquête porte sur le fonctionnement concret du réseau de banques chargées, en interaction avec les hauts fonctionnaires de l'Agence France Trésor (AFT) au ministère des Finances, de tenir le marché de la dette, c'est-à-dire d'assurer la distribution, la vente et la valorisation des emprunts d'État. La stratégie des pouvoirs publics visant à constituer de ce réseau de grossistes, qui doit diminuer le coût d'émission et assurer la qualité de la dette sur les marchés financiers internationaux, est l'un des canaux par lesquels chemine l'interpénétration des intérêts entre finances publiques et finance privée. L'économie des relations qui s'impose entre les banques privées et l'État est celle d'un partenariat structuré par des transactions et des échanges de bons procédés dont la légitimité publique et politique est parfois incertaine. Ces interactions ont pour effet de verrouiller un arrangement de marché pour le financement de l'État.Sovereign Bonds Dealers. Politics of the Transactions Between Banks and State Regarding Government Bonds Sales and Distribution. This article analyzes the commercial interactions formed around the French sovereign debt between the state and commercial banks. The survey focuses on the practical operation of the French primary dealers, the private bank network charged with “making the debt market”, that is to say ensuring the distribution, sale and valuation of government bonds, and interacting with senior officials of the Agence France Trésor (AFT) at the Ministry of Finance. The government strategy of creating this network of wholesalers, to reduce the cost of transmission and to ensure the quality of French debt in the international capital markets, is one of the channels through which the interpenetration of interests between public finance and private finance travels. The mode of relationship thus required between private banks and the state is that of a “partnership” structured by transactions and exchanges of good practices whose public and political legitimacy is sometimes uncertain and which has the effect of locking a market arrangement for state funding.
- Le crédit donné aux pauvres : Droit à l'endettement et financiarisation de l'action sociale - Pascale Moulévrier p. 89-106 La fin des années 1980 a constitué une première étape du développement de l'offre de microcrédits en France, principalement à destination des personnes peu solvables mais désireuses de créer leur propre activité professionnelle. Depuis le début des années 2000, une offre de micro-finance estampillée « solidaire », englobant les microcrédits personnels, se structure grâce au soutien d'un État favorable à la captation de ce marché par les entreprises bancaires, assistées des associations d'action sociale devenues prescripteurs d'emprunteurs. Ces dispositifs dotés désormais de cadres juridiques ajustés et portés par des intermédiaires convertis ont conduit à la production d'un droit à l'endettement qui, tout en posant légitimement la question de l'accès de tous à l'argent, contribue par ailleurs à financiariser l'aide sociale. En s'appuyant sur une série d'enquêtes auprès des professionnels, bancaires et sociaux, du microcrédit et sur l'examen des circuits de demandes de prêts et de leur octroi, cet article vise à mettre au jour les processus qui conduisent institutions et acteurs aux intérêts apparemment divergents à participer ensemble à la production d'un marché financier, ni tout à fait public, ni tout à fait privé, du crédit aux pauvres.Credit Given to the Poor. Right to Debt and Financialization of Social Action. The end of 1980's established a first step in the development of the offer of microcredit in France, mainly aimed at people with low income willing to create their own professional activity. Since the beginning of the 2000's, a wider offer of so called “solidaire” micro-finance including personal microcredits has been established thanks to the support of the government. The later was in favour of financial institutions capturing this market, with the assistance of the social action groups acting as borrowers. These plans, endowed from now on with legal frameworks adjusted and carried by converted intermediaries, led to the production of a right to have debts which, while raising the legal question of the access of all to money, contributes to a process of financialization of social assistance. Based on a series of field studies on banking, social, and microcredit professionals, and on the analysis of the channels for requesting and granting loans, this article aims at shedding light on the processes that drive institutions and actors with apparently divergent interests to participate together in the production of a financial market, neither completely public, nor completely private – that of credit to the poor.