Contenu du sommaire : Les politiques économiques européennes face à la Grande Récession
Revue | Politique européenne |
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Numéro | no 42, 2013/4 |
Titre du numéro | Les politiques économiques européennes face à la Grande Récession |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Les politiques économiques européennes face à la Grande Récession - Martial Foucault p. 8-21
- Frankenstein en Europe : L'impact de la Banque centrale européenne sur la gestion de la crise de la zone euro - Clément FONTAN p. 22-45 Depuis sa création en 1999, la Banque centrale européenne a cherché à influencer les règles de gouvernance économique de la zone euro alors que ses responsabilités initiales sont recentrées sur le domaine monétaire. Bien qu'elle n'ait pas pu exercer de véritable influence sur ces domaines lors des dix premières années de l'euro, la crise des dettes souveraines débutée en décembre 2009 a fait apparaître une fenêtre d'opportunité pour les banquiers centraux. Le but de cet article est alors d'identifier les moyens par lesquels la BCE a pu étendre son influence au-delà du domaine monétaire pendant la crise de la zone euro. Après avoir exploré les différentes dimensions de la BCE en tant qu'acteur politique, l'article explore l'impact de la BCE à travers trois canaux : son monopole sur les liquidités, la reconnaissance de son expertise et son autorité morale sur les États membres. Au-delà de cette étude empirique, l'article remet en cause la maîtrise du processus de délégation de compétences à des agences indépendantes par les décideurs politiques et souligne la place centrale des erreurs de perceptions dans la gestion de la criseFrankenstein in Europe : the impact of the European Central Bank on the eurozone crisis' management.
Since its creation in 1999, the European Central Bank has been trying to weigh on the rules of the eurozone economic governance, even though its official responsibilities are strictly restricted to monetary issues. In this context, the 2009 sovereign debt crisis has been a window of opportunity for the ECB to exert an unprecedented influence on these issues. The main aim of this article is thus to analyze how the ECB managed to extend its influence beyond its official monetary responsibilities during the crisis. Following the assumption that the ECB is a political player, I explore the three channels through which it had an impact on the eurozone economic governance : its monopoly on liquidities, the recognition of its expertise on financial issues and its moral authority on member states. The main research findings of this study are the unexpected lack of control of political representatives over the ECB politics during the crisis and the central role of the policymakers' misperceptions on the ECB during the crisis-solving process. - Poursuivre malgré la crise ? : Changement de contexte et continuité des politiques d'emploi en Europe - Mehdi Arrignon p. 46-70 Les stratégies d'« activation » visant à inciter davantage les chômeurs à l'emploi ont été poursuivies au cours de la crise. Pourtant ces réformes n'avaient pas atteint leurs objectifs avant la crise et leurs résultats ont été particulièrement négatifs dans la conjoncture récente. Pourquoi les avoir maintenues ? L'inertie s'explique à la fois par des raisons institutionnelles (gouvernance européenne faiblement réactive en matière d'emploi), cognitives (implantation durable d'un référentiel d'« activation » chez les responsables nationaux et européens) et politiques (crise comme variable écran empêchant de dresser le bilan des stratégies poursuivies).Going On in Spite of the Crisis ? Why Context Has Changed and Why Employment Policies Have Not Active social policies try to “make work pay better than Welfare”. These policies are experimented since 1997 in Europe ; in the first part of the 2000's, they didn't succeeded in accelerating the return to work. During the last crisis, the results were even worse. How to explain the persistence of such ineffective strategies ? Analyzing European institutions and comparing three Member-States in Europe, we argue that institutional, cognitive and political factors can explain the inertia of public policies in periods of crisis.
- La fin du modèle de flexicurité face à la résilience des modèles nationaux ? : Syndicats et négociations sur l'emploi en Allemagne, en France et en Italie - Catherine Spieser p. 72-95 Depuis les années 1990, sous l'influence de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) puis des stratégies européennes, l'idée de « flexicurité » s'était imposée comme paradigme dominant des politiques de l'emploi et du travail. Cependant, la crise a remis en question le bien-fondé de ce paradigme en temps de récession. Depuis 2008, les partenaires sociaux comme les décideurs des politiques publiques se sont saisis de l'agenda de la lutte contre la crise de l'emploi dans l'ensemble des pays européens. Une comparaison des cas allemand, français et italien nous montre alors les limites de l'européanisation et la résilience des modèles nationaux au prisme de l'action publique négociée. En effet, en étudiant le positionnement des organisations syndicales et patronales, leurs pratiques du dialogue social et l'usage des instruments d'action publique ou leur réforme, cet article met en évidence trois types de reconfiguration des relations professionnelles face à la crise et donc des appropriations et ajustements différenciés de l'idée de « flexicurité ».The end of the flexicurity model in front of the resilience of national models? Trade unions and collective bargaining on employment in Germany, France and Italy Since the 1990s, under the influence of the Organisation for Economic Cooperation and Development (OECD) and strategies developed at the EU level, the idea of “flexicurity” had become the dominant paradigm of labour market policies. However, the crisis has led to question the appropriateness of this policy paradigm in times of economic recession. Since 2008, social partners and policy-makers have been facing a new agenda of fighting the employment crisis all across Europe. The comparative study of negotiated policies in Germany, France and Italy shows the limited scope of europeanisation and the resilience of national models in this domain. We look into the stances of trade unions and employers organisations, their practice of social dialogue and collective bargaining and the use of relevant policy instruments. This article thereby outlines three paths of reconfiguration of industrial relations in the face of the crisis, and provides evidence of three different ways in which domestic actors adapt the idea of flexicurity to the context of the crisis.
- Preferences for European Social Policy in Times of Crisis - Laurie Beaudonnet p. 96-123 Depuis 1992 et la création de l'Union économique et monétaire, les citoyens européens sont de plus en plus conscients des conséquences économiques et sociales de l'intégration européenne. La crise économique actuelle, en augmentant la pression financière sur les politiques de redistribution, a renforcé les craintes du public en matière de protection sociale et de (dé-) régulation du marché du travail. Néanmoins, notre connaissance des préférences en matière de redistribution et de politiques sociales au niveau supranational est encore parcellaire, malgré l'importance de ces préférences pour le soutien politique dans les régimes multi-niveaux. Cet article étudie (a) les facteurs attitudinaux et économiques du soutien à une politique sociale commune et leur évolution dans le temps, (b) l'impact de la crise économique actuelle sur ces préférences. L'étude examine la validité empirique de la logique d'exit, en se fondant sur une analyse de time series cross section dans l'UE des Quinze, de 1996 à 2011. Les résultats étayent la thèse de la stratégie d'exit et montrent un renforcement de cette logique à la faveur de la crise économique de 2008.Since 1992, the establishment of the Economic and Monetary Union (EMU) has raised citizens' awareness of the economic and social implications of European integration. The current economic crisis increased the financial pressures on redistribution policies, strengthening the public's concerns about the potential consequences for the level of social protection and labour market (de-) regulation. However, we know little about preferences for redistribution and social policies at the supranational level, despite the importance of such preferences for political support in multi-level systems. This article assesses (a) the attitudinal and economic determinants of preferences for a European social policy over time, and (b) the impact of the recent economic turmoil on these preferences. The study investigates the empirical validity of the exit logic mechanism. It relies on a Time Series Cross Section analysis of public opinion in the European Union (27 Member states), from 1996 to 2011, using Eurobarometer and Eurostat data.
- Institutional Knots and EU Economic Governance : Intergovernmental Decision-Making in the Great Recession and the Eurozone Crisis - George Ross p. 124-149 L'Union européenne a depuis toujours construit ses décisions en utilisant conjointement les méthodes communautaires et intergouvernementales. Cependant depuis le traité de Maastricht le poids de l'intergouvernementalisme n'a cessé de croître s'accompagnant d'une implication toujours plus forte de l'UE au niveau national. Durant la « Great Recession » et la crise de la zone euro les décisions de l'UE ont certes été prises en grande partie de façon intergouvernmentale mais selon deux approches différentes. À la suite de la chute de Lehman Brothers, un intergouvernmentalisme « coordonné » s'est imposé à travers un accord entre les membres de l'UE autour d'objectifs généraux: renflouer le secteur bancaire, poursuivre des plans de stimulation économique, ou encore effectuer des réformes du secteur financier. Par la suite, chaque pays a été libre de définir ses propres plans pour arriver à de tels objectifs définis. Durant la crise de la zone Euro, la méthode a changé en faveur d'un intergouvernementalisme dit « cooperatif » dans lequel les membres de la zone euro et de l'UE ont négocié de manière multilatérale des décisions détaillées que tout le monde était dans l'obligation de suivre. Ces processus d'intergouvernementalisme coopératif ont été très lents et ont parfois mené vers de mauvaises décisions, voire des erreurs dans lesquelles les préférences des pays les plus forts se sont imposées. De tels résultats ont alors, au moins dans le court terme, posé de forts problèmes de légitimité à l'UE.The EU has always made decisions by a complex mix of “community method” and intergovernmentalism. It is arguable, however, that there has been a substantial shift toward intergovernmentalism since Maastricht started to expand the EU's involvement in national lives. EU decisions in the Great Recession and the Eurozone crisis have been made predominantly by intergovernmental methods, but in two very different ways. Immediately after Lehman Brothers there was a moment of “coordinated” intergovernmentalism, when EU members together agreed on broad internationally defined goals about bailouts, stimulus plans, and financial sector reforms, after which each then pursued these goals in the specific ways that its national government deemed appropriate. The Eurozone crisis has been different, however. It has involved “cooperative” intergovernmentalism in which Eurozone and EU members have had to make new decisions through multilateral bargaining that then were on each and all. “Cooperative intergovernmentalist” processes have contributed to slow decision-making and, sometimes, faulty decisions, in which the preferences of more powerful member states were imposed on others. The results, at least in the short term, have been harmful to the EU's legitimacy.
Lecture croisée
- Le fonctionnement de l'Union européenne. Introduction à l'Union européenne - Gwenaëlle Perrier p. 152-157
Lectures critiques
- The Struggle for EU Legitimacy. Public Contestation, 1950-2005 - Christophe Majastre p. 160-163
- Le Champ de l'Eurocratie : Une sociologie politique du personnel de l'UE - Léa Lemaire, Stefan Waizer p. 164-167