Contenu du sommaire : Terre, territoire, appartenances

Revue Etudes rurales Mir@bel
Numéro no 163-164, 2002
Titre du numéro Terre, territoire, appartenances
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • La globalisation ambiguë : Avant-propos - Édouard Conte, Christian Giordano, Ellen Hertz p. 9 accès libre
  • Rêves d'unité nationale - José Antonio Aguilar Rivera p. 25-44 accès libre avec résumé
    La crise que traverse l'identité nationale du Mexique à la fin du XXe siècle est comparée à celle qui frappe les États-Unis d'Amérique à la même époque. Le déclin de l'idéologie révolutionnaire mexicaine, la fin d'un État métis et la revendication d'un pluralisme culturel illustrée par les objectifs des rebelles du Chiapas ont pour contrepoint nord-américain la mise en question du melting-pot au nom d'un multiculturalisme qui serait plus adapté à la diversité des États-Unis.
  • Ruralité et nation en Europe centrale et orientale - Christian Giordano p. 45-65 accès libre avec résumé
    Partant de la constatation que les nations d'Europe centrale et orientale se sont organisées politiquement selon le principe de la Staatsnation et ont donc adopté des modèles d'État national venus de l'Europe occidentale et plus spécifiquement d'Allemagne et de France, l'article cherche à montrer que les appartenances se sont bâties sur l'ethnicité et la territorialité. Parce que la ruralité avec son organisation sociale spécifique (la communauté villageoise, la famille, le travail agricole) est considérée comme le « berceau de la nation », il s'est constitué en Europe centrale et orientale un complexe idéologique qui porte sur un système de correspondances entre ethnicité, ruralité, territoire et terre.
  • Peut-on devenir Allemand ? - Édouard Conte p. 67-90 accès libre avec résumé
    L'assouplissement de la loi allemande sur la citoyenneté de 2000 (Staatsangehörigkeitsgesetz) trouve une limite majeure dans les restrictions imposées à la reconnaissance de la double nationalité. Si le principe de la filiation est atténué, l'exclusivité du lien entre citoyen et État reste affirmée. Partant, l'objet du présent article est d'examiner, dans une perspective anthropologico-historique, les possibles articulations du refus du Parlement d'établir une parité entre droit du sang et droit du sol, et la persistance de la notion juridique d'appartenance au peuple allemand (Volkszugehörigkeit). Car cette dernière, en maintenant la distinction entre postulants à la nationalité considérés comme « membres du peuple » et ceux classés « étrangers », risque de générer, de droit et de fait, une hiérarchie des citoyens relevant d'un classement ethnique. Aussi peut-elle contribuer à renforcer le cloisonnement d'aires d'endogamie, ce qui doterait d'une force sociale nouvelle le principe de la filiation au moment même où la loi, allemande comme turque, entreprend d'atténuer les rigueurs du jus sanguinis.
  • Entre terre et territoire : enracinement de l'identité palestinienne - Christine Pirinoli p. 91 accès libre avec résumé
    La mémoire collective et les identités palestiniennes se (re)produisent à partir des référents symboliques centraux que sont la terre villageoise, le territoire, la nation et le transnational. Avec la perspective de la création d'un État palestinien, l'instrumentalisation, populaire et officielle, de ces notions rend particulièrement saillant le processus de réinterprétation qui est à l'?uvre. Si ces concepts restent fondamentaux pour la majorité des Palestiniens, notamment en regard du conflit qui les oppose à Israël, leur signification et surtout leur articulation se modifient en fonction des nouvelles lignes de démarcation qui structurent la société autour de divergences de plus en plus marquées.
  • Territoire et identité : Une perspective italienne - Stefano Cavazza p. 109-131 accès libre avec résumé
    En Italie, dans les années quatre-vingt-dix, des mouvements politiques appelés « ligues » luttaient pour la reconnaissance d'une identité locale en opposition avec l'appartenance nationale. Bien que le succès de ces ligues revienne aux thèmes spécifiques de leurs programmes politiques qui portaient largement sur les revendications culturelles, un territoire du Nord se distingue du reste du pays et marque une rupture profonde au sein de la tradition régionaliste. L'article étudie l'évolution du rapport entre territoire local et nation depuis l'Unité italienne jusqu'à aujourd'hui et examine les politiques culturelles du fascisme, du communisme et de la Démocratie chrétienne.
  • La boucle de la mélancolie ou l'imaginaire du nationalisme basque : À propos de trois ouvrages de Jon Juaristi - Carmen Bernand p. 133-143 accès libre
  • À la recherche des origines perdues : Le mouvement traditionaliste gaúcho au Brésil - Ruben George Oliven p. 145-165 accès libre avec résumé
    Le Mouvement traditionaliste gaúcho (MTG) au Brésil, avec ses deux millions de participants actifs, revendique le fait de constituer le plus grand mouvement de culture populaire de tout le monde occidental. Le « 35 CTG », créé en 1948 à Porto Alegre par des étudiants du niveau secondaire originaires des zones de pâturages du Rio Grande do Sul, a servi de modèle à plus de mille entités affiliées au MTG, réparties dans toutes les régions de l'État. Les valeurs du traditionalisme, diffusées par ces intellectuels, sont calquées sur la vie dans les latifundia où l'on pratique l'élevage. La représentation de la figure du gaúcho a également servi de modèle aux colons d'origine allemande et italienne des zones de minifundia où il n'a jamais existé de complexe pastoral destiné à l'élevage bovin, et aux émigrants du Rio Grande do Sul qui sont allés s'installer dans l'État de Santa Catarina, dans le Paraná, dans le Mato Grosso, et récemment aussi à l'étranger.
  • Guerres africaines : De la compétition ethnique à l'anomie sociale - Michel Adam p. 167-186 accès libre avec résumé
    L'Afrique intertropicale est la région du monde où se rencontre depuis trente ans le plus grand nombre de conflits armés. La majorité de ces conflits sont des guerres civiles dépourvues d'enjeu sécessionniste. Dans un contexte politico-culturel caractérisé par la faiblesse de la citoyenneté démocratique, elles opposent des groupes ethniques concurrents pour accéder au contrôle de l'opérateur économique central que représente l'État. Toutefois, le fonctionnement de l'État patrimonial-clientéliste est affecté par la dégradation économique de ces dernières années. Il en résulte une transformation de la nature des guerres civiles, lesquelles s'accompagnent de phénomènes d'anomie.
  • African Elites' Land Control Maneuvers - Laurel L. Rose p. 187-213 accès libre avec résumé
    Il est couramment admis dans la littérature que les efforts des élites africaines pour contrôler la terre, soit en acquérant des biens fonciers propres, soit en assumant des responsabilités administratives, servent leurs intérêts personnels. Deux questions peuvent être soulevées à cet égard : 1) pourquoi et comment les élites africaines cherchent-elles à contrôler la terre dans différentes communautés et États ? 2) quelles sont les conséquences de ces man?uvres au sein de ces mêmes communautés et États ?
  • Names beyond Nations : The Making of Local Cosmopolitans - Engseng Ho p. 215-231 accès libre avec résumé
    La connaissance des noms est utile pour explorer les césures et les connexions qui sont à l'oeuvre dans la constitution des groupes de parenté, des nations, des empires et des religions. Le fait que les noms représentent des signes arbitraires et soient inscrits dans des typologies permet l'échange d'identités entre individus et collectivités. À l'instar des dons, les noms modifient les écarts identitaires propres à deux acteurs et, en tant que moyens d'échange, leur mobilité - restrictive dans le cas du nationalisme, expansive dans le cas des généalogies prophétiques - trace les contours de communautés morales. Cet article examine les pratiques d'une nomination expansive et montre comment les généalogies contiennent des points d'articulation entre des communautés transrégionales et locales, en valorisant les individus à la fois membres d'une localité et cosmopolites, et en créant un langage de mobilité transculturelle au-delà des nations.
  • Globalization and New Strategies of Ruling in Developing Countries - Aihwa Ong p. 233-248 accès libre avec résumé
    Les débats autour de la globalisation sont une incitation pour les anthropologues à développer de nouvelles approches de la culture et de la société. Une tradition classique de cette discipline s'attache à l'étude de l'organisation et des fonctions sociales à tous les niveaux, mais nous avons besoin de nouvelles catégories pour analyser les aspects stratégiques des interconnexions contemporaines à l'échelle globale. Ce texte traite des effets de la globalisation économique sur les formes nouvelles d'expression spatiale de l'État souverain, et de la reterritorialisation du capital, deux processus qui participent de la valorisation de la culture et de la civilisation dans le Sud-Est asiatique. En particulier, l'auteur se demande comment les interactions entre globalisation économique, État et société ont produit de nouveaux enchevêtrements de relations sociales et de constellations politiques. Quels sont les changements fondamentaux survenus dans les États ? Quel est l'impact du marché et de ses priorités sur les espaces nationaux et sociaux ? Enfin, la globalisation ou ses crises conduisent-elles au développement de l'activisme politique ?
  • Tales of Territoriality : The Urbanisation of Meifa Village, China - Stephan Feuchtwang p. 249-265 accès libre avec résumé
    Le territoire est le plus ouvert et le plus inclusif de tous les lieux. À cette échelle les redoutables abstractions que représente la déterritorialisation peuvent être vues comme un compromis entre différentes formes de territorialisation. En d'autres termes, les thèses de Deleuze et Guattari, de James Scott et des postmodernes, qui mettent l'accent sur la dislocation, doivent être révisées. Cette tâche incombe à l'ethnographie et à l'histoire locale. Dans cet article, une étude de cas sur un village chinois en voie d'urbanisation fait ressortir que la soi-disant déterritorialisation est en fait le résultat de deux territorialisations : celle qui relève du programme de l'État et celle qui s'appuie sur une frange capitaliste de développement dont les points nodaux constituent les institutions économiques et leurs fonctions. À ce niveau, la négociation s'impose avec la réappropriation par les acteurs locaux du territoire.
  • Dynamiques territoriales des Aborigènes pitjantjatjara (Australie-Méridionale) - Frédéric Viesner p. 267-282 accès libre avec résumé
    Les Pitjantjatjara, Aborigènes du désert central de l'Australie, vivaient selon un cycle migratoire sur lequel se fondait leur organisation sociale et leur mode de subsistance. À la suite des contacts avec les Blancs, ils ont abandonné leurs relocalisations saisonnières et se sont établis en communautés. Cette population a opéré des changements politiques pour parvenir à trouver un compromis entre sa culture et le nouveau mode de territorialisation imposé par le gouvernement australien. Les Pitjantjatjara disposent d'une cosmologie qui les unit à leur territoire en relation avec leur système de filiation. Les impératifs dictés par l'État fédéral ont conduit les communautés aborigènes à se conformer à certaines obligations juridiques afin de mieux délimiter leurs territoires.
  • The Mapuche People in Post-Dictatorship Chile - Guillaume Boccara p. 283-303 accès libre avec résumé
    Cet article traite de l'émergence politique des Mapuche, dans le Chili démocratique postérieur à la dictature militaire. En s'appuyant sur des exemples concrets, l'auteur montre que les mouvements sociaux indigènes défient les fondements même de l'ordre dominant et contribuent à repenser la manière de construire sur d'autres bases la démocratie, le territoire et la citoyenneté. En redonnant vie à des institutions politiques anciennes et en réintroduisant des techniques «traditionnelles» de communication, de socialisation et de mémorisation, les chefs politiques et les organisations contestent la territorialité imposée par l'État chilien au lendemain de la défaite militaire subie par les Indiens à la fin du XIXe siècle. Alors que dans les années soixante et soixante-dix les paysans réclamaient plus de terres, les processus d'ethnogenèse actuels visent à la constitution de nouvelles frontières territoriales ainsi qu'à la redéfinition des groupes sociaux et des identités.
  • Comptes rendus - p. 305-343 accès libre