Contenu du sommaire : Politiques de la "psy"
Revue | Raisons Politiques |
---|---|
Numéro | no 25, mars 2007 |
Titre du numéro | Politiques de la "psy" |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Éditorial - Franck Chaumon, Frédéric Gros p. 5-13
- Néolibéralisme et psychologie behavioriste - Paul Mengal p. 15-30 Cette étude explore les relations entre le néolibéralisme et la psychologie behavioriste. C'est en remontant aux sources de la pensée libérale, chez Jeremy Bentham et John Stuart Mill, que l'on constate que les philosophes utilitaristes ont posé les fondements de l'économie libérale et d'une psychologie nouvelle qui présente l'individu comme produit de son interaction avec l'environnement. En intégrant progressivement les apports de l'évolutionnisme darwinien, cette psychologie du comportement ou behaviorisme est devenue le modèle dominant de la psychologie américaine. John B. Watson et surtout Burrhus Frederic Skinner ont donné, tour à tour, à cette psychologie une orientation éducative et rééducative. En montrant expérimentalement la supériorité des systèmes de renforcements positifs sur les systèmes punitifs, ils ont développé une technologie de contrôle du comportement. Cette conception de la psychologie partage avec le néolibéralisme contemporain une même idéologie du contrôle social fondée sur la nécessaire rationalité des comportements et sur l'activité de consommation comme principal système de renforcement positif.
- Généalogie politique de la psychologie. Une lecture du cours de Michel Foucault Du gouvernement des vivants (Collège de France, 1980) - Jean-Michel Landry p. 31-45 Demeuré inédit, le cours prononcé en 1980 au Collège de France correspond à un moment charnière dans l'?uvre de Michel Foucault. D'une part, il constitue le point culminant des travaux menés sur le thème du gouvernement des hommes ; d'autre part, il trace la généalogie du dispositif politique de la psychologie. En suivant l'évolution des rapports qui se sont noués entre l'aveu et l'obéissance au cours des premiers siècles de notre ère, les leçons de 1980 montrent que chercher à découvrir et formuler sa vérité cachée équivaut à se placer sous dépendance. Ce faisant, elles dévoilent l'enjeu politique de la psychologie. Réalisé à partir d'une transcription intégrale de l'année de cours, cet article retrace le cheminement qui conduira Foucault à affirmer que la formulation d'une vérité sur soi représente « une des formes premières de notre obéissance ».
- La psychothérapie, le néo-comportementalisme et la loi - Jean-Pierre Sueur p. 47-55 Cet article présente le processus législatif qui a abouti au vote par le Parlement d'un article symptomatiquement contradictoire dans ses termes à partir de l'amendement dit « Accoyer » (du nom de son auteur) qui visait à définir dans la loi les conditions d'attribution du titre de psychothérapeute. Il montre comment cette contradiction initiale en a induit d'autres dans les différents avant-projets de décret d'application qui ont été publiés. Il décrit en quoi l'ensemble de ce débat s'est trouvé largement influencé par diverses initiatives ou publications mettant en cause la psychanalyse et promouvant les thérapies cognitivo-comportementalistes. Il critique la procédure suivie qui risque, en l'espèce, de rendre problématiques, inopérantes ou peu efficaces les modalités retenues pour définir ? ce qui est, au demeurant, souhaitable ? les conditions d'exercice de la profession de psychothérapeute.
- Le droit à la vie - Guillaume Le Blanc p. 57-71 Nous assistons de plus en plus à l'expression d'un droit à la vie. Celui-ci, désormais requis dans une série de revendications qui vont du vital au social, a pris historiquement deux formes. La première se manifeste au 19e siècle dans une ontologie de la vie sociale par la création du droit social à l'occasion des lois sur les accidents de travail et sur les retraites, et se traduit sur le plan théorique et pratique par une sociologie de la solidarité. La seconde, qui apparaît dans le cadre d'une ontologie de la vie individuelle, se manifeste dans l'extension du pouvoir médical et se traduit sur le plan théorique et pratique par la référence à une nouvelle valeur qui n'est plus la solidarité mais la santé. C'est ce déplacement d'une forme à une autre forme qui est interrogé dans cet article.
- La cigale lacanienne et la fourmi pharmaceutique - Philippe Pignarre p. 73-88 Une nouvelle psychiatrie a peu à peu sapé toute possibilité de développement de la psychanalyse. Pour comprendre comment elle s'est imposée, il est moins important de s'intéresser aux débats théoriques qu'aux pratiques et aux apprentissages qui dictent la manière dont les médecins regardent les patients. À la notion de chronicité qui a déterminé les pratiques psychiatriques jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, a succédé une psychiatrie des comportements (gérables/ingérables) qui commence avec la psychochirurgie (les lobotomies) et se réalise pleinement avec l'essor des psychotropes, de 1952 à nos jours, de la prise en charge de la schizophrénie à celle des troubles du comportement. On a vu ainsi se développer une « petite biologie » et une « petite psychologie » dont les pouvoirs de réorganisation permanente sont considérables. L'épisode du trouble de déficit avec hyperactivité chez l'enfant et l'adolescent doit être compris dans ce contexte.
- La psychanalyse dans son temps - Michel Plon p. 89-99 Les temps forts de l'histoire et de la politique se déposent, déformés, condensés et déplacés dans l'inconscient. L'analyste peut en entendre quelque chose pour peu qu'il soit lui-même et simultanément à l'écoute de son temps. Mais qu'est-ce qu'être « à l'écoute de son temps » ? Freud, de par ses interventions (de Considérations actuelles sur la guerre et la mort (1915) à L'Homme Moïse et le monothéisme (1939) en passant par L'avenir d'une illusion, le Malaise dans la culture et Pourquoi la guerre ?) a fait en sorte que la psychanalyse se préoccupe de la politique. Mais la politique de nos jours plus encore que du temps de Freud, s'occupe de la psychanalyse, pas nécessairement pour assurer son avenir, il peut être urgent d'y réfléchir.
Varia
- Penser la réforme pénitentiaire avec Michel Foucault. Apports et limites à une sociologie politique de la loi du 18 janvier 1994 - Eric Farges p. 101-125 À l'encontre d'une représentation trop événementielle de la réforme carcérale, Michel Foucault développa dans Surveiller et punir une conception de la réforme comme stratégie de légitimation de l'institution pénitentiaire. On propose d'analyser dans quelle mesure la conception foucaldienne de la réforme carcérale comme instrument de gouvernement est heuristique dans la compréhension de la loi du 18 janvier 1994 réorganisant la gestion des soins en prison. Il apparaît que si la considération du point de vue de l'institution carcérale permet d'adopter un regard plus critique, elle présente néanmoins le risque de reléguer au second plan les luttes professionnelles et d'aboutir ainsi à une sociologie désincarnée. Problématiser la réforme du 18 janvier 1994 requiert dès lors de lui rendre son historicité et d'opérer, pour cela, un déplacement du regard sociologique de la question des effets de la réforme à celle de ses conditions de possibilité.
- Le néo-paganisme et la politique : une tentative de compréhension - Stéphane François p. 127-142 Cet article traite de l'apparition d'une contre-culture païenne couvrant tout le spectre politique. Cependant, indépendamment des orientations idéologiques, cette subculture développe un discours commun cohérent fondé sur une critique radicale de la modernité et de ses manifestations.
- Penser la réforme pénitentiaire avec Michel Foucault. Apports et limites à une sociologie politique de la loi du 18 janvier 1994 - Eric Farges p. 101-125
Parcours de recherche : Élisabeth Roudinesco
- Élisabeth Roudinesco - Franck Chaumon, Frédéric Gros p. 143-145
- Entretien avec Élisabeth Roudinesco - p. 147-177
Lectures critiques
- Lectures critiques - p. 179-201