Contenu du sommaire : D'après Rawls. Volume 2
Revue | Raisons Politiques |
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Numéro | no 34, juillet 2009 |
Titre du numéro | D'après Rawls. Volume 2 |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Editorial
- Editorial - Speranta Dumitru p. 5-7
Dossier
- L'extension de la justice comme équité à la santé et aux soins de santé - Norman Daniels p. 9-29 L'objectif de cet article est de montrer comment la théorie de la justice comme équité peut être étendue à la question de la santé et des soins de santé. Dans mes travaux j'ai réalisé trois extensions successives des idées rawlsiennes. La première vise les rapports entre la santé et l'égalité équitable des chances. La deuxième extension s'appuie sur la relation entre les principes de justice comme équité de Rawls et les déterminants sociaux de la santé mis en évidence par l'épidémiologie sociale des trois dernières décennies. La troisième extension puise dans les contributions de Rawls en matière de délibération démocratique et de justice procédurale des suggestions pour savoir comment répondre équitablement à des besoins de santé qui ne peuvent pas être tous satisfaits. Ces extensions fournissent ensemble la base d'une théorie robuste de la justice et de la santé.
- La question générationnelle et l'héritage rawlsien - Axel Gosseries p. 31-55 Dans cet article, l'auteur examine l'apport de Rawls au débat sur la justice entre les générations. Il se concentre en particulier sur trois aspects. D'abord, il discute les difficultés rencontrées par Rawls dans la définition d'une position originelle adéquate pour aborder ces questions. Ensuite, il envisage différentes interprétations en particulier de type maximin et de type suffisantiste et critiques possibles du principe substantiel dit « de juste épargne ». Enfin, il examine le traitement philosophique proposé par Rawls de la question du taux social d'actualisation. L'auteur conclut en pointant tant les apports que les absents de l'oeuvre rawlsienne sur la question intergénérationnelle.
- Objectivité, impartialité, et critique féministe - Bertrand Guillarme p. 57-71 L'analyse de la forme d'objectivité et de théorie pratiques avancée par Rawls, ainsi que le type d'impartialité associé aux principes de justice qu'il justifie permet de mettre en évidence les affinités de la démarche rawlsienne avec les épistémologies féministes du point vue, et les divergences méta-éthiques qu'elle entretient avec les perspectives du care.
- Raison publique rawlsienne et démocratie délibérative. : Deux conceptions inconciliables de la légitimité politique ? - Charles Girard p. 73-99 La démocratie délibérative et la raison publique rawlsienne, qui s'opposent toutes deux aux théories agrégatives de la démocratie, sont communément associées. Elles impliquent pourtant deux conceptions différentes et inconciliables de la légitimité politique. Tandis que la démocratie délibérative fonde la légitimité des décisions collectives sur une délibération publique et non contrainte qui vise l'émergence d'un accord épistémique et moral entre citoyens, la raison publique la fonde sur un principe excluant les raisons privées de la justification publique et subordonne en conséquence la délibération à un accord préalable sur une conception politique de la justice. La première comprend d'abord la démocratie comme un idéal d'autogouvernement par le débat public, le second la conçoit avant tout comme un idéal de coopération équitable.
- John Rawls et les alternatives libérales à la laïcité - Catherine Audard p. 101-125 La distinction établie par Rawls entre doctrines « compréhensives » et conceptions politiques induit que, dans un état laïc, les valeurs religieuses ne peuvent jouer un rôle direct dans l'espace politique sans menacer l'égalité des différentes conceptions de la vie bonne auxquelles adhèrent les citoyens. Mais qu'en est-il des doctrines philosophiques ou morales comme celle de la laïcité ? La conséquence logique de la distinction établie par Rawls est que tous les citoyens, laïcs ou religieux, sont obligés en raison de leur devoir de civilité, de recourir à des raisons publiques dans le débat politique, un point problématique pour définir une conception libérale de la laïcité. Rawls répond de manière paradoxale, dans « La raison publique revisitée », à cette difficulté consiste à dire qu'on ne peut pas défendre l'Etat laïc sur la base de la doctrine de la laïcité. C'est cette alternative libérale à la laïcité, respectueuse de la pluralité et de l'égale dignité des doctrines compréhensives raisonnables, que cet article se propose de présenter.
- L'extension de la justice comme équité à la santé et aux soins de santé - Norman Daniels p. 9-29
Varia
- « Sur ma religion » de John Rawls : comment les croyances religieuses de Rawls ont influencé sa philosophie politique - Joshua Cohen, Thomas Nagel p. 127-141 La découverte récente de deux textes de John Rawls sur la religion, notamment de son mémoire de licence consacré à une analyse du péché et de la foi, constitue une invitation à s'interroger sur l'influence de ses croyances religieuses sur sa philosophie politique. Joshua Cohen et Thomas Nagel s'attachent à démêler les relations complexes entre les convictions morales et sociales exprimées sous une forme religieuse dans le mémoire et les principales idées des écrits ultérieurs de Rawls sur la théorie morale et politique. Les principaux points de contact qu'ils identifient sont l'adhésion à une morale définie par les relations interpersonnelles plutôt que par la poursuite du souverain bien ; l'insistance sur l'importance du caractère séparé des personnes ; le rejet de l'idée de société comme un contrat ou une négociation entre des individus égoïstes ; la condamnation de l'inégalité fondée sur l'exclusion et la hiérarchie ; le rejet de l'idée de mérite.
- Morale ou moralisme ? : Un exercice de sensibilisation - Emilie Hache, Bruno Latour p. 143-165 Dans cet article, les auteurs proposent de réinterroger la fermeture de la question morale aux seuls humains, à l'heure où chacun de nos gestes manger du thon rouge, prendre l'avion, jeter ses déchets devient objet de scrupule. La « crise écologique », loin d'être seulement scientifique et politique, est aussi une crise morale, ré-interrogeant la liste des êtres capables de nous obliger moralement. Pour partager cette hypothèse avec le lecteur, nous allons proposer un exercice de sensibilisation au scrupule moral à partir d'un petit laboratoire constitué de quatre extraits de textes, aussi hétérogènes par leurs statuts académiques que par leurs disciplines. Malgré l'artifice obligé d'un tel découpage, l'analyse de ces textes, aussi bien de leurs idées que de leur dynamique interne, permettra de faire sentir une série de variations morales nous amenant à proposer, à la fin de cette expérience, une double échelle de valeur.
- Le Film comme Crime : le cas Veit Harlan - Emmanuelle Glon p. 167-189 Le cinéaste allemand, Veit Harlan, fut le seul cinéaste à être jugé pour « crimes contre l'humanité ». Le 15 juillet 1948, quatre juristes allemands déposèrent plainte devant la Haute Coure de Justice de Hambourg, indignés qu'il ait été blanchi par la commission de dénazification. C'est en particulier à la réalisation, en 1940, du « Juif Süss » qu'Harlan dût son accusation. Le cas est d'autant plus remarquable que le « Juif Süss » est une fiction. Un film peut-il être criminel et en quel sens ? D'une part, l'article présente les conditions historiques de la réalisation de ce film et de la mise en accusation d'Harlan pour complicité de crimes contre l'humanité, avec comme élément comparatif, le cas d'un autre cinéaste de propagande nazie, Fritz Hippler, par ailleurs directeur de la Chambre du Film et capitaine SS. Au-delà de ces cas exemplaires, l'article interroge d'autre part les rapports complexes entre l'éthique et l'esthétique : quelle « leçon » pouvons-nous tirer du cas Veit Harlan, réalisateur d'un film, Le Juif Süss, jug comme tel, de « criminel » ?
- Lectures critiques - Arnaud Leclerc p. 191-195
- « Sur ma religion » de John Rawls : comment les croyances religieuses de Rawls ont influencé sa philosophie politique - Joshua Cohen, Thomas Nagel p. 127-141