Contenu du sommaire : Varia
Revue | Le Mouvement social |
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Numéro | no 203, avril-juin 2003 |
Titre du numéro | Varia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Editorial
- Féminismes américains et reproductive rights/ droits de la procréation - Jennifer Merchant p. 55-87 Après un bref panorama historique du rôle de l'État et de certains groupes d'intérêt dans la réglementation de la procréation, cet article présente le concept des droits de la procréation dont la définition contemporaine remonte aux années 1970. A cette époque, il s'agit d'une contre-offensive de la part de féministes de la deuxième vague (courants radicaux ou socialistes) qui, sans être opposées à l'interventionnisme de l'État, vont dénoncer la forme qu'il prend, et surtout vont souligner les limites du droit à l'intimité institutionnalisée (Roe v. Wade) en formulant une définition plus élargie des droits de la procréation. Nous verrons ensuite que cette nouvelle définition ne réussit cependant pas à réunir l'ensemble des groupes féministes aux États-Unis, ni à contrer l'instrumentalisation du discours des « droits » par les groupes antiavortement qui sont parvenus à voir attribuer aux f?tus un cadre juridique tendant à les définir comme des personnes. Nous verrons, enfin, qu'au-delà même de l'opposition à l'avortement (encore aujourd'hui sujet politique brûlant aux États-Unis), l'avènement de l'assistance médicale à la procréation (A.M.P.), la biogénétique appliquée, et les interrogations éthiques qui s'ensuivent, remettent profondément en cause le cadre conceptuel contemporain des droits de la procréation, et accentuent les divisions entre les groupes féministes.
- Droits et mouvements sociaux aux États-Unis - Marianne Debouzy p. 3-18 L'article part de la centralité du « langage des droits » dans la société et la culture américaines et s'interroge sur leur définition, leurs sources, l'évolution et leur contenu à différentes époques et sur la création de « nouveaux droits » depuis les années 1970. Que révèlent la nouvelle « conscience des droits » et l'intense activité judiciaire qu'elle a provoquée quant à l'évolution de la société ? Les rapports entre pouvoirs politique et judiciaire ont-ils changé ? L'articulation entre droits et mouvements sociaux ne révèle-t-elle pas l'ambivalence du droit ?
- Notes de lecture - p. 115-139
- Controverses - p. 113
- Entre stratégie sociale et quête érudite : les notables normands et la fabrication de la Normandie au XIXe siècle - François Guillet p. 89-111 Dans l'histoire des processus de fabrication des images régionales en France au XIXe siècle, l'exemple normand diffère nettement de l'exemple breton étudié par Catherine Bertho. La Révolution ne se traduit pas seulement par des réformes qui mettent fin à l'existence juridique et institutionnelle de la province, elle donne lieu également à des transformations sociales qui touchent les élites de la province et modifient leur rapport à la « patrie » normande, qui bascule désormais du côté du passé. L'exil subi par une partie d'entre elles ? rupture essentielle dans la vie de nombre de nobles et d'ecclésiastiques ? accompagne un renouvellement et un élargissement qui alimentent l'essor d'une sociabilité érudite s'attelant dès les années 1800 à une exploration complète de ce qui constitue désormais un lieu de mémoire. Instrument de domination sociale pour des notables dont le régionalisme s'appuie sur un très dense réseau de sociétés savantes, cette quête savante vise à mettre au jour les fondements naturels et historiques de la province et donne naissance à une école d'archéologie médiévale dont le rayonnement d'Arcisse de Caumont atteste l'importance. Alimentant les ?uvres des écrivains et des artistes romantiques français et anglais, cette construction intellectuelle est diffusée auprès d'un public qui ne cesse de s'élargir grâce au développement du tourisme, auquel les antiquaires normands répondent en rédigeant des guides de voyage.
- Droit et mouvement. : Quelques réflexions sur l'usage du droit par le mouvement des soldats américains pendant la guerre du Viêt Nam - Michèle Gibault p. 33-53 Parce que l'armée est une institution particulièrement hiérarchisée et coercitive où, malgré l'existence d'un code de la justice militaire, la possibilité d'invoquer le droit reste formelle, le mouvement des soldats américains pendant la guerre du Viêt Nam est un cas éclairant du recours au droit par un mouvement politique, et de ses limites. Nous nous interrogeons sur l'articulation entre un mouvement faisant preuve d'un antimilitarisme souvent radical et l'exigence apparemment réformiste du droit. A travers quelques exemples, nous montrons qu'on ne peut confondre formes légalistes de lutte et finalité politique du mouvement, mais que l'invocation du droit est pour un mouvement une arme à double tranchant. Ce mouvement des « sans droits », « sans grade » a recours au droit pour changer la vie et ce faisant réinvente la démocratie.
- Liberté et solidarité dans le droit du travail américain - David Brody p. 19-32 L'article réexamine la loi Wagner de 1935 qui a reconnu le droit des travailleurs de s'organiser de façon autonome et a protégé ce droit par des règles et des procédures définies par l'État fédéral. Il révèle ce qu'il appelle la « vulnérabilité » de la loi, critiquée aujourd'hui comme inefficace sinon nuisible par beaucoup de syndicalistes. Non seulement la loi était marquée par le poids du passé, l'hostilité du pouvoir judiciaire envers les syndicats, mais elle a été également sapée par la victoire des Républicains au Congrès en 1947 et le retour en force du conservatisme dans les années 1980. L'article souligne l'idée que les « droits des travailleurs » sont en fait des droits « inférieurs » lorsqu'ils sont fondés sur des politiques publiques, qui peuvent être abandonnées, et non définis comme des droits fondamentaux et inaliénables.