Contenu du sommaire : Varia
Revue | Le Mouvement social |
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Numéro | no 250, janvier-mars 2015 |
Titre du numéro | Varia |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- L'art et la manière d'acheter. : Apprendre à consommer en Europe dans le second XXe siècle - Sabine Effosse p. 3-7
Apprendre à consommer au XXe siècle
- Catholiques militants et réforme de la consommation en France au XXe siècle - Marie-Emmanuelle Chessel p. 9-28 Le point de départ de l'article consiste à évaluer le rôle des catholiques dans les associations de consommateurs en France au XXe siècle. L'auteur prend appui sur l'étude de deux associations où des femmes et des hommes catholiques étaient engagés : la Ligue sociale d'acheteurs, avant la Première Guerre mondiale, et l'Union féminine civique et sociale, des années 1930 aux années 1960. Dans un premier temps, la nature de la transmission entre les deux organisations est questionnée. Un héritage indirect est mis au jour : la formation des ménagères. Dans un deuxième temps, les discours et les pratiques des deux organisations sont comparés ; il est notamment mis l'accent sur la culture partagée de l'enquête sociale. Enfin, l'auteur s'intéresse au répertoire des modes d'action utilisés par les deux organisations.Catholic Activists and Consumer Reform in 20th Century France. From the Ligue sociale d'acheteurs to the Union féminine civique et sociale. The starting point for this paper is an evaluation of the role of Catholics in French consumer associations in the 20th century. The author focuses on two associations where Catholic men and women were activists: the Ligue sociale d'acheteurs (Social Buyers' League), before the First World War, and the Union féminine civique et sociale (Women's Civic and Social Union), from the 1930s to the 1960s. In the first part, the paper investigates what was transmitted from one organisation to the other. Light is cast on an indirect legacy: home economics training. In the second part, the messages and practices of the two organisations are compared; emphasis is notably placed on the shared culture of social investigation. Lastly, the author focuses on the range of activist activities used by both organisations.
- « L'art de faire son marché ». : Responsabilisation et éducation des consommatrices dans les années d'après-guerre (1944-1968) - Rebecca J. Pulju p. 29-40 Cet article porte sur les contradictions inhérentes au rôle émergeant de « consommateur-citoyen » des femmes françaises au cours des décennies de changements économiques et sociaux qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Dans un contexte où l'économie française était fragilisée par l'inflation et où les planificateurs et modernisateurs s'efforçaient de créer une société de consommation de masse florissante, le rôle de consommateur-citoyen répondait à la fois à ces désirs et à ceux d'organisations espérant responsabiliser les femmes et améliorer les conditions de vie des familles. Ces divers groupes, bien que motivés par des objectifs différents, étaient en accord sur deux points : les consommatrices pouvaient contribuer à l'amélioration de l'économie en limitant l'inflation et en orientant la production vers les besoins des familles ; les femmes devaient être éduquées afin d'assumer ce rôle. Dans le discours prédominant, on passait dès lors de la proclamation du pouvoir de la femme consommatrice à l'importance de son besoin d'éducation.“L'art de faire son marché”. Empowering and Disciplining Women Consumers in the Postwar Years (1944-1968)This article explores the contradictions inherent in the role of “citizen consumer” that emerged for French women in the decades of social and economic change following the Second World War. As inflation wracked the French economy and as planners and modernisers attempted to create a thriving mass-consumer society, the role of citizen consumer answered both the desires of planners and modernisers, and those of organisations hoping to empower women and improve family living conditions. These various groups – though perhaps motivated by different objectives – agreed on several things: that women consumers could have an ameliorative effect on the economy, both by curbing inflation and directing production toward family needs, and that women needed to be educated to assume this role. Thus, the prevailing rhetoric alternated between at once heralding the power of the woman consumer, and pointing to her need for education.
- « Quotidien doré » : consommation des ménagères et domestication des banques dans la Suède des années 1960 - Orsi Husz p. 41-63 Cet article explore les aspects culturels, historiques et genrés de la financiarisation de la vie quotidienne. Il s'appuie sur le cas d'une importante campagne bancaire en Suède dans les années 1960 ciblant les ménagères, en analysant un cycle de conférences appelé « Quotidien doré » (1961-1969) comme représentation de la finance populaire. Deux questions traversent l'article. D'une part, comment les identités financières sont-elles construites et mises en œuvre pour un public large ? D'autre part, quel rôle la banque joue-t-elle vis-à-vis de ses clientes potentielles ? Si l'on commence à connaître le développement de la banque de détail, il n'existe encore aucune étude approfondie du défi auquel ont été confrontées ces banques, ni des stratégies adoptées, pour ancrer la finance dans la vie quotidienne. L'exemple des conférences « Quotidien doré » invite à conclure à une domestication des banques dans les années 1960, intimement liée à la « bancarisation des ménages » analysée par l'histoire et la sociologie du secteur bancaire.« Golden Everyday ». Housewifely Consumerism and the Domestication of Banks in 1960s Sweden
The paper explores cultural, historical and gender aspects of the financialisation of everyday life through a case study of an extensive Swedish bank campaign in the 1960s targeting women. Its analyses the so-called Golden Everyday conferences (1961-1969) as representations of popular finance and focuses on two questions: firstly, how the financial identities for a broad population were constructed and enacted; and secondly, which role the bank adopted in relation to its (presumptive) clients. The development of retail banking has been roughly outlined in historical studies of banking, but the challenge faced by the banks, and their strategies for entangling finance in everyday practices has not been looked upon in detail. Through the case of the Golden Everyday conferences, the paper argues that in the 1960s, a domestication of banks occurred intertwined with the”bancarisation of households” described in the history and sociology of banking.
- Catholiques militants et réforme de la consommation en France au XXe siècle - Marie-Emmanuelle Chessel p. 9-28
Marchés et concentration en milieu rural
- Grande propriété foncière et littoralisation des sociétés en France, 1750-1970 - Johan Vincent p. 65-79 Les études scientifiques sur le développement balnéaire n'ont souvent abordé la question foncière que sous l'aspect du promoteur spéculateur. Si l'on suit ce raisonnement, le littoral a longtemps été entièrement à vendre et prêt à accueillir une population saisonnière ou sédentaire. Or l'étude historique des grandes propriétés sur le littoral révèle une certaine inertie du foncier : si des grands propriétaires ont procédé à un lotissement de leurs parcelles, d'autres ont conservé leur patrimoine pour des questions de prestige ou pour leurs loisirs. Les populations locales ont également joué un rôle dans la mise en valeur de ces propriétés, à la constitution parfois contestée. La littoralisation de la population n'a donc pas bénéficié d'un espace totalement ouvert. Le profond enracinement et l'évolution des grandes propriétés apparaissent comme d'intéressants indices des tendances de peuplement futur et des conflits larvés qui pourraient alors surgir.Large Landholdings and Seaside Development of Societies in France, 1750-1970Studies of seaside development have often addressed the land question under the aspect of the property developer. If we follow this reasoning, the entire French coastline was available to be sold. However, historical study of changes in large landholdings along the coast proves another reality: land inertia. Some large landholders subdivided their plots, while others kept theirs intact, either for prestige purposes or for their own leisure activities. Local populations also played a role in developing these properties, which were sometimes contested. Settlement of the French coastline did not occur in a wide open space. Large landholdings, especially old ones, represent a good sign for understanding future settlement trends.
- Séparer le bon grain de l'ivraie ? : L'organisation patronale dans la meunerie du Nord (1914-1987) - Stéphane Lembré p. 81-95 Les transformations de la meunerie au XXe siècle ont été majeures. Sous l'effet de mutations techniques engagées à la fin du XIXe siècle, cette activité met en rapport de petits patrons et les responsables de grands groupes meuniers. Tous sont confrontés à l'instabilité des marchés du blé, de la farine et du pain, au point de rendre nécessaire l'organisation des marchés. Autour du cas de la Chambre syndicale des meuniers du Nord de la France, la possibilité pour une profession de gérer le passage de plus de 300 moulins en 1913 à une quinzaine dans les années 1980 interroge la dynamique constante d'organisation patronale. Entre liberté et protection, le contingentement et la résorption décidés en 1935 ouvrent une période décisive dans le processus plus large de concentration industrielle.Separating the Wheat from the Chaff? Employers' Organisations in the Milling Industry in Northern France (1914-1987)The milling industry underwent major transformations in the 20th century. Under the effect of technological changes initiated at the end of the 19th century, small employers were brought face to face with the managers of large milling groups. These employers faced the instability of the wheat, flour and bread markets. This situation required the organisation of markets. Based on a case study of the Chambre syndicale des meuniers du Nord de la France (The Millers Union of Northern France), the possibility for a profession to manage the transition from more than 300 mills in 1913 to fifteen in 1980 challenged the constant dynamics of the employers' organisation. Between freedom and protection, quotas and resorption decided in 1935 opened a decisive period in the broader process of industrial concentration.
- Grande propriété foncière et littoralisation des sociétés en France, 1750-1970 - Johan Vincent p. 65-79
Théories de la participation ouvrière en Allemagne
- Sur les origines historiques et théoriques de la codétermination dans les entreprises allemandes - Bernd Zielinski p. 97-114 L'article retrace les débats théoriques qui ont marqué la genèse historique du principe de cogestion dans les entreprises allemandes. À travers les approches de quatre auteurs importants couvrant la première moitié du XIXe et les premières décennies du XXe siècle, il analyse les tentatives de justification de la mise en place de comités d'ouvriers dans les entreprises. L'examen des approches des théoriciens Robert von Mohl (1799-1875), Gustav Schmoller (1838-1917), Friedrich Naumann (1860-1919) et Fritz Naphtali (1888-1961) révèle qu'à chaque époque, les discussions et réflexions sur la participation ouvrière ont été marquées par un certain niveau de développement institutionnel et technologique du capitalisme, ainsi que par des contextes politiques spécifiques. Parallèlement, le traitement par chaque auteur de la question des comités ouvriers renvoie à des courants différents de la pensée économique et sociale allemande, de l'« École historique » à l'approche de la « démocratie économique ». Au XIXe siècle, les théories sur la participation des salariés étaient surtout conçues par des intellectuels qui y voyaient un moyen de pacification sociale tandis que le mouvement ouvrier se montrait majoritairement hostile à ce principe, le considérant comme un moyen idéologique pour masquer le vrai rapport de force dans les entreprises. Ce n'est qu'à partir du début du XXe siècle que syndicats et social-démocratie ont commencé à voir dans les comités un instrument de la démocratisation de l'économie, dans le cadre d'une stratégie réformiste.Historical and Theoretical Origins of Codetermination in German Companies
This paper traces back the theoretical debates that marked the historical creation of the principle of codetermination in German companies. By looking at four major authors from the first half of the 19th century through the first decades of the 20th century, it analyses the attempts to justify the creation of workers' committees in companies. An examination of the approaches of theoreticians Robert von Mohl (1799-1875), Gustav Schmoller (1838-1917), Friedrich Naumann (1860-1919) and Fritz Naphtali (1888-1961) shows that in every period, discussions and thinking about worker participation were influenced by a certain level of institutional and technological development of capitalism, as well as by specific political contexts. In parallel, each author's handling of the question of workers' committees refers to different schools of German economic and social thought, from the”Historical School” to the”Economic Democracy” approach. In the 19th century, theories of worker participation were mainly devised by intellectuals who viewed them as a means for social peace, while the labour movement was mainly hostile to this principle, considered to be an ideological means of obscuring the actual balance of power in companies. Only from the start of the 20th century did unions and Social Democrats begin to view workers' committees as an instrument for democratisation of the economy, as part of a reformist strategy. - Notes de lecture - p. 115-130
- Informations et initiatives - p. 131-135
- Sur les origines historiques et théoriques de la codétermination dans les entreprises allemandes - Bernd Zielinski p. 97-114