Contenu du sommaire : Dossier : Polices et événements politiques au 20e siècle

Revue 20 & 21. Revue d'histoire Mir@bel
Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire
Numéro no 128, novembre-décembre 2015
Titre du numéro Dossier : Polices et événements politiques au 20e siècle
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Articles

    • Forces de l'ordre et crises politiques au 20e siècle - Emmanuel Blanchard, Emmanuel Droit p. 3-14 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Les contributions de ce dossier interrogent, pour les 20e et 21e siècles et sur des terrains d'enquête géographiques variés, les liens entre des régimes politiques de nature différente, leurs forces de police et les sociétés civiles. Bien qu'inscrites dans des cultures historiographiques nationales différentes, ces contributions participent au renouvellement en cours de l'histoire sociale et culturelle du politique. En adoptant une perspective relationnelle et disséminée du pouvoir, il s'agit de considérer les forces de l'ordre comme des acteurs politiques et d'étudier comment elles se positionnent lors de crises politiques. Ces forces contribuent à faire advenir ou à contenir des dynamiques révolutionnaires. Les polices et les forces de l'ordre doivent ainsi être replacées au cœur d'une histoire politique attentive aux organisations et aux institutions n'étant pas étiquetées comme politiques.
      Law Enforcement and Political Crises in the 20th Century The articles contained in this issue address the relationships between different political regimes, their police forces and civil societies in a wide range of different geographical locations throughout the 20th and 21st centuries. Although rooted in different national historiographical traditions, these articles all contribute to the renewal of social and cultural political history. By adopting a relational perspective to power and its diffusion, these articles recast security forces as political actors, in turn analysing how these forces manage political crises. As security organs have helped to foster but also to contain various revolutionary dynamics, they should therefore form the centre of a new political history that focuses on organisations and institutions that have not traditionally been viewed as political.
    • Le 6 février 1934, une crise policière ? - Emmanuel Blanchard p. 15-28 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La journée du 6 février 1934 est restée dans les mémoires comme l'acmé d'une crise parlementaire aiguë. Les quatorze victimes et les méthodes de maintien de l'ordre ont moins retenu l'attention des historiens qui ont étudié cet événement. Jean Chiappe, préfet de police aux liens politiques multiples et très marqués à l'extrême droite, démis de ses fonctions le 3 février, joua pourtant un grand rôle dans la mobilisation, le déroulement et le dénouement de cette crise. En prêtant une attention particulière aux attitudes et aux pratiques des agents engagés dans la répression, il s'agit d'étudier plus généralement les multiples voies par lesquelles les forces de l'ordre peuvent contribuer à la configuration des crises politiques.
      February 6th, 1934 : A Police Crisis The political demonstrations of 6 February 1934 are still remembered as marking the apex of an acute parliamentary crisis. Unfortunately, the fourteen victims of these demonstrations and the police practices used against demonstrators have attracted less attention from historians studying the event. Jean Chiappe, who was recalled from his post as police commissioner on 3 February, had maintained numerous political ties during his mandate, especially with far-right leaders and organisations ; he therefore played a significant role in the mobilisation, unfolding and outcome of this crisis. By paying special attention to the attitudes and practices of police agents involved in the protest's repression, this article also contributes to a general analysis of the multiple ways in which law enforcement can help to shape political crises.
    • La grève de la force publique de São Paulo (13 et 14 janvier 1961) - André Rosemberg p. 29-44 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Cet article étudie la grève de la Force publique (Força pública) qui se déroula à São Paulo les 13 et 14 janvier 1961. La Force publique est une police militaire, en tenue et armée, patrouillant dans les rues. Cette grève s'inscrit dans le contexte de grands bouleversements sociopolitiques du début des années 1960 et constitue un épisode situé en amont de la chute du régime démocratique en vigueur au Brésil depuis 1946. Rétrospectivement, on peut mettre en évidence que ce mouvement de grève représente un condensé des multiples tensions idéologiques relatives à la fois aux intérêts corporatifs de la police et aux projets politiques pour l'avenir du pays.
      São Paulo's Police Strike (13 and 14 January 1961) This article analyses the Força Pública strike in São Paulo that took place on 13 and 14 January 1961. The Força Pública was Sao Paulo's military police, which traditionally policed the city streets while armed and in uniform. The strike occurred during the serious socio-political turbulence of the early 1960s, when the Brazilian democratic regime that had been established in 1946 was crumbling. In hindsight, the Força Pública strike presents a condensed picture of all of the ideological disputes regarding the police's corporate interests and the country's political future.
    • La politique sécuritaire et les manifestations contre la police dans le ghetto noir de Chicago (1943-1969) - Andrew Diamond, Elsa Devienne p. 45-62 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la seconde moitié des années 1960, à Chicago, des organisations se revendiquant de l'idéologie du « pouvoir noir » ont mobilisé un nombre sans précédent de jeunes Afro-Américains pour participer à des actions de protestation contre la brutalité policière. Cet article montre le rôle ambigu joué par ces manifestations dans la lutte globale pour les droits civiques à Chicago. Il défend l'idée selon laquelle cette approche s'est avérée source de divisions pour la communauté noire et l'a empêchée de développer un programme de revendications plus ambitieux. Cela était dû en grande partie au rôle central joué par la politique du maintien de l'ordre dans la communauté noire de Chicago, une situation ayant rendu de nombreux dirigeants civiques et religieux clés réticents à l'idée de soutenir des protestations contre la police.
      Law-and-Order Politics and Anti-Police Protest in Chicago's Black Ghetto (1943-1969) In the second half of the 1960s black power organizations in Chicago rallied unprecedented numbers of young African Americans to participate in insurgent protest actions by focusing on the issue of police brutality. This essay demonstrates the ambiguous role played by anti-police protest to the broader civil rights struggle in Chicago, arguing that such an approach ultimately proved divisive for black communities and hampered them from pursuing a more ambitious agenda of demands. This was due, in large part, to the centrality of law-and-order politics within black Chicago, which made many key civic and religious leaders resistant to support anti-police protests.
    • La Stasi face à la « Révolution pacifique » de l'automne 1989 en République démocratique allemande - Emmanuel Droit p. 63-76 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Le but de cet article est d'analyser la « Révolution pacifique » en République démocratique allemande (RDA) à l'automne 1989 en lui restituant son caractère ouvert et incertain. En s'appuyant principalement sur les archives de la police politique est-allemande, nous cherchons à montrer que l'effondrement inattendu du régime communiste de la RDA s'expliquait moins par la puissance du mouvement d'opposition que par la capacité d'agir, ou non, des détenteurs du pouvoir. La violence a été une option plus sérieuse jusqu'à l'automne 1989 mais, au moment de passer à l'acte, elle n'était plus considérée comme un moyen légitime par les membres du bureau politique du Sozialistische Einheitspartei Deutschlands (SED), ce qui rendit la Stasi impuissante et l'événement révolutionnaire possible.
      The Stasi and the Peaceful Revolution of the German Democratic Republic in 1989 The goal of this article is to analyse East Germany's 1989 ‘Peaceful Revolution' by emphasising this movement's open and uncertain character. Using the archives of the East German political police, this article argues that the abrupt collapse of the German Democratic Republic (GDR) and the Communist regime was caused less by the actions of a powerful opposition movement, than by the political regime's (in)ability to react. Violence appeared to be a serious option until the fall of 1989 ; by the time they had to act, however, the members of the Sozialistische Einheitspartei Deutschlands (SED - Socialist Unity Party) politburo no longer considered violence a legitimate means. As a consequence, the Stasi was rendered powerless and made the peaceful revolution possible.
    • Répression d'État et situation révolutionnaire en Tunisie (2010-2011) - Choukri Hmed p. 77-90 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La sociologie des mouvements sociaux a longtemps négligé la dimension répressive des mobilisations. En s'appuyant sur une enquête ethnographique menée en Tunisie entre 2011 et 2012, cet article propose d'évaluer le rôle de la « violence paroxystique » d'État dans les situations révolutionnaires, en prenant pour objet les interactions entre les représentants du régime, les forces de l'ordre, les protestataires et les non-engagés. Il montre comment les pratiques répressives au sens large ont contribué à moduler et à structurer la protestation contre le régime tunisien, au cours de la première situation révolutionnaire, du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2011. La répression doit ainsi être entendue comme un mode d'action parmi d'autres mobilisés par les agents de l'État pour mettre fin aux mouvements protestataires qui le mettent directement en cause.
      State Repression and Revolutionary Situation in Tunisia (2010-2011) The sociology of social movements has long neglected the repressive dimension of mobilisations. Based on ethnographic fieldwork carried out in Tunisia between 2011 and 2012, this article assesses the role of the State's “paroxysmal violence” during revolutionary situations, focusing on interactions between representatives of the regime, the police, protesters and bystanders. It demonstrates how, in a broad sense, repressive practices helped to shape protests against the Tunisian regime during the first revolutionary period, from 17 December 2010 to 14 January 2011. Repression can therefore be viewed as one mode of action employed among others by State officials in order to put an end to protest movements seeking to undermine the regime's legitimacy.
    • Les évacuations de 1939 en Moselle et en Sarre : Cadres et plans stratégiques pour la prise en charge des populations civiles - Nicholas J. Williams p. 91-104 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      À la suite de l'invasion allemande de la Pologne en septembre 1939, plus de cinq cent mille personnes sont évacuées de chaque côté de la frontière franco-allemande. Pour les plus d'un million de civils évacués, les dix mois qui suivent représentent un « exil intérieur ». Il va sans dire que de telles mesures ne se préparent pas en un jour. Les préparatifs desdites évacuations commencent beaucoup plus tôt en France qu'en Allemagne, mais subissent cependant dans les deux pays des changements par rapport aux mesures envisagées initialement. Dans la présente contribution, les planifications des évacuations de la population civile entre les deux lignes fortifiées, Maginot et Siegfried, sont analysées et comparées en détail.
      The 1939 Evacuations in the Moselle and Saarland Regions Following the German invasion of Poland in September 1939, more than 500,000 civilians were evacuated on each side of the French-German border. For these civilian refugees, totalling more than 1 million, the ten months that followed were a kind of ‘domestic exile'. For obvious reasons, this evacuation was not organised overnight. Although preparations for evacuation had begun a lot sooner in France than in Germany, both countries experienced significant changes with regard to the measures they had originally envisioned. This article analyses the evacuation planning for civilians residing between the Maginot and Siegfried fortified lines, and establishes an in-depth comparison between the two programmes.
    • Paroles de « défaitistes » : Communistes, pacifistes et protestataires pendant la « drôle de guerre » - Gilles Morin p. 105-118 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Entre septembre 1939 et juin 1940, polices et justice françaises traquent divers discours et comportements publics. Définis par le mot « défaitisme », ces expressions sont supposées atteindre le moral des Français. Les manifestations de ce « défaitisme » révèlent une société populaire troublée et partiellement apolitique. Cependant, dans plus de la moitié des cas, ce terme concerne des sensibilités politiques connues. Parmi elles dominent l'extrême gauche et l'extrême droite. Au premier rang s'exprime surtout une parole « défaitiste » inscrite dans la culture communiste. Par-delà la diversité des positionnements politiques, ces discours protestataires traduisent différentes formes de rejet de la République et de ses hommes.
      “Defeatist” Words During France's “Phoney War”, French authorities and police forces closely monitored public speech and behaviour. Grouped under the umbrella term of “defeatism”, such behaviours and speech allegedly weakened the morale of the French people. Expressions of this “defeatism” reveal a troubled and partly apolitical working-class society. More than half of the time, however, this term applied to well-known political affiliations, dominated by far-left and far-right tendencies. First and foremost, defeatist language was expressed through its deep roots in Communist culture. In addition to illustrating the diversity of political positions, these expressions of protest revealed the different ways that the Third Republic and its leaders were rejected.
    • L'économie morale des banlieusards : Aux origines de la « crise des transports » dans la France des années 1970 - Daniel A. Gordon p. 119-131 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      En 1970, une révolte des banlieusards, usagers des transports en commun de la région parisienne, déclenchée par une hausse du prix du ticket de métro, a réussi à renverser une tentative du gouvernement Chaban-Delmas de faire payer une proportion plus grande des coûts de transport aux usagers. Ce mouvement a été à l'origine de la carte orange et de la renaissance des tramways. Cet article explique les origines du mouvement, en utilisant l'idée d'économie morale d'Edward P. Thompson. Comment a-t-il été lié à une « crise des transports », différenciée par genre et par classe, créée par l'émergence des banlieues tentaculaires lointaines ?
      The Moral Economy of the “Banlieusards” In 1970, the rebellion of the “banlieusards” – suburban commuters in the Paris region – was sparked by an increase in the price of metro tickets. The movement ultimately succeeded in reversing an attempt by the Chaban-Delmas-led government to make public transportation users pay a greater proportion of the costs. The transportation users movement was responsible for such significant developments as the creation of the “carte orange” (an unlimited transportation pass) and the reintroduction of trams. This article explains the origins of the 1970 movement by drawing on Edward P. Thompson's concept of moral economy. How was this movement linked to a gender- and class-differentiated ‘transportation crisis' created by urban sprawl and far-flung suburbs ?
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