Contenu du sommaire : La pensée de Serge Moscovici

L'œuvre de Moscovici se résume à une tentative de rapprochement du psychique et du social, ne serait-ce que parce que la rationalité et l'irrationalité sont transversales aux comportements individuels et à l'activité sociale. En ce sens, l'individu n'est pas plus du ressort de la seule psychologie que la société ne l'est de la seule sociologie. Simplifier la réalité reviendrait à simplifier la connaissance de celle-ci. La psycho-sociologie de Moscovici nous invite donc à prendre en compte l'homme dans sa complétude, en tant que mixte de logique et de sentiments, de raison et de passions. On comprendra alors l'importance du paradigme écologique dans les sciences sociales comme forme de compréhension de ce qui relie l'homme à une entité plus vaste, le renvoyant aussi bien à la nature et à son ascendance animale qu'à la technique et à sa destinée post-humaine.

Relatives aux phénomènes victimaires, les dernières publications de Serge Moscovici, peu connues, font l'objet d'une présentation donnant à voir l'étroit maillage entre une expérience vécue et une œuvre scientifique. La victimisation est abordée par cet auteur comme une question éthico-historique dont la formulation tardive s'étaie sur une réflexion de jeunesse portant sur le destin social des juifs, enrichie par de nombreux travaux sur les minorités, la psychologie des foules, la pensée sociale, pour aboutir à une théorisation des phénomènes liés à la persécution et l'exclusion des minorités ethniques, racisées ou dissidentes et à leur émancipation. Le cas retenu pour mener ces analyses concerne les gitans. Il permet d'argumenter une critique des perspectives de la psychologie sociale qui rendent compte des relations intergroupes par des processus cognitifs fragmentaires et de fonder une approche holistique de réalités sociales observées depuis le lointain des temps. Cette approche réintroduit la considération de l'histoire et des valeurs dans l'analyse des phénomènes victimaires. Elle insiste sur le rôle des représentations sociales et des mouvements sociaux dans l'élaboration et la transformation des images et relations entre les victimes et leurs persécuteurs.

Nous décrirons d'abord les caractéristiques du modèle d'analyse des minorités actives et ses relations avec la théorie des représentations sociales chez Serge Moscovici. On définira de façon plus précise les éléments essentiels de sa théorisation, centrée sur la régénération cognitive des minorités (parvenir à une conduite consistance, fondée sur un nomos défini par l'intellectualisation/mise en images fortes d'une expérience de vie). Nous mettrons ensuite en relation cette dernière spécificité (nécessité de devenir une « minorité active ») avec la biographie de Moscovici en affirmant que l'on peut arrimer, à l'avenir, les théories de la résilience à celle des mouvements sociaux et des minorités actives.

L'œuvre de Serge Moscovici s'éclaire par un jeu de miroirs entre militantisme écologique et psychologie sociale ancrée dans l'étude des mentalités et des croyances. Elle donne à lire une autre voie possible pour le développement des sciences sociales. Elle déploie la programmatique d'une sociologie de l'environnement. Elle a surtout la sagesse de nous éclairer sur les angoisses de demain.

Cet article met en avant l'apport de la pensée de Serge Moscovici dans la compréhension des formes sociales liées à l'écologie et plus particulièrement aux éléments naturels. L'épistémologie qu'il nous propose est de type initiatique et révèle nos manières d'être dans la nature. Elle privilégie une pensée par le milieu qui considère l'implication des personnes. Deux formes se dégagent : la première est caractéristique d'une approche romantique des formes de la nature tandis que la seconde articule la défense des cadres de vie au processus de socialisation. Toutes deux sont considérées comme des manières de promouvoir une vision écologique du milieu. Pour ce faire, les groupes déploient des relations de proximité et s'approprient les valeurs environnementales sous forme esthétique et éthique leur permettant de valoriser la nature et de s'interroger sur les conditions de la résistance écologique.

Abordant la question de l'irréductible antagonisme domestication/ensauvagement de la vie au fondement de la civilisation occidentale, Serge Moscovici en appelait, dans les années 1970, au développement d'un révolutionnaire « naturalisme actif », une philosophie écologique de la vie seule à même de dépasser cette dualité mortifère dont on mesure aujourd'hui les tragiques ravages.

Cet article présente une mise en correspondance des notions de dénotation et de connotation proposées par Roland Barthes dans sa « rhétorique de l'image » et des processus d'objectivation et d'ancrage proposés par Serge Moscovici dans sa théorie des représentations sociales. Ce parallélisme permet d'envisager différentes modalités de construction d'un message iconique, c'est-à-dire d'un message essentiellement supporté par une iconographie. Il permet en outre de suggérer deux dimensions d'analyse de ce type de messages. Il permet enfin de suggérer plusieurs pistes de recherches relatives à l'originalité et à l'accessibilité des messages iconiques, au rôle joué par les modes d'objectivation et d'ancrage dans la créativité perçue des messages et aux interactions entre style de message, contenus et récepteurs.

La publicité vit de nostalgie, c'est l'un des symptômes essentiels de la postmodernité. Cela se manifeste surtout par la pratique d'une « récupération » dont l'essentiel consiste à puiser l'inspiration d'une créativité dans des choses déjà-là et réanimées. Ce phénomène s'observe dans les éléments de la langue choisis comme matériaux par les slogans, tels les proverbes, citations littéraires, chansons, anciens slogans... Par le détournement des originaux et l'étonnement ainsi suscité, ne veut-on pas renforcer le sentiment d'appartenir à une même communauté socioculturelle ? Bref, cette récupération n'est-elle pas une réincarnation, une « revenance » en quête de vitalité sociale sous la forme d'un « réenracinement dynamique » semi-conscient dont l'effet de ralliement auprès des Français exclut inévitablement les étrangers ?