Contenu du sommaire : L'innovation dans tous ses états - I
Revue | Quaderni |
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Numéro | no 90, printemps 2016 |
Titre du numéro | L'innovation dans tous ses états - I |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Dossier
- Les tendances innovatrices des sociétés contemporaines - Bernard Paulré p. 5-20 Si l'innovation technologique a monopolisé l'attention tout au long du XXe siècle, nous sommes aujourd'hui confrontés à une situation originale caractérisable par trois traits : 1) il est de plus en plus question d'innovation en dehors du champ économique pour désigner des activités créatrices de nouveauté dont les modalités et les contenus sont sensiblement différents de ceux de l'innovation techno-économique ; 2) Il existe de multiples injonctions à innover, et 3) l'innovation est souvent l'objet d'une valorisation en soi. siècle, nous sommes aujourd'hui confrontés à une situation originale caractérisable par trois traits : 1) il est de plus en plus question d'innovation en dehors du champ économique pour désigner des activités créatrices de nouveauté dont les modalités et les contenus sont sensiblement différents de ceux de l'innovation techno-économique ; 2) Il existe de multiples injonctions à innover, et 3) l'innovation est souvent l'objet d'une valorisation en soi. Ces trois traits seront argumentés successivement avant que l'on suggère quelques pistes d'interprétation de cette nouvelle situation. Pour cela, nous distinguerons la réflexion conceptuelle de celles relatives à la signification historique de l'évolution en cours : S'agit-il de la manifestation d'une emprise accrue du néo-libéralisme sur les sociétés développées contemporaines, de la manifestation de ce que, génériquement, nous pouvons appeler l'après-modernité, ou encore des signes de l'émergence d'une société d'innovation ?
Throughout the twentieth century technological innovation has monopolized the attention, but we are now facing a new situation characterized by three features : 1) we are concerned more and more with innovation outside of the economic field, that is to say creative activities of novelty, of which the terms and contents are appreciably different from those of the techno-economic innovation, 2) there are many injunctions to innovate and 3) innovation is often the subject of a valuation in itself.Throughout the twentieth century technological innovation has monopolized the attention, but we are now facing a new situation characterized by three features : 1) we are concerned more and more with innovation outside of the economic field, that is to say creative activities of novelty, of which the terms and contents are appreciably different from those of the techno-economic innovation, 2) there are many injunctions to innovate and 3) innovation is often the subject of a valuation in itself. These three features will be argued successively before one suggests some ways of interpreting this new situation. For that, we will distinguish the conceptual thinking from those relating to the historical significance of the evolution in progress : Is it the demonstration of an increased influence of the neoliberalism on the contemporary developed companies ? Or the demonstration of what, generically, we can call after-modernity, or signs of the emergence of an innovation society ? - Making sense of innovation: from weapon to instrument to buzzword - Benoît Godin p. 21-40 L'innovation est un concept que chacun d'entre nous comprend spontanément – ou croit comprendre –, qu'à peu près tout chercheur utilise dans ses travaux et que chaque gouvernement épouse quand vient le temps d'élaborer des politiques économiques. Il n'en a pas toujours été ainsi. Pendant plus de 500 ans, l'innovation était un concept contesté et, depuis la Réforme, essentiellement péjoratif. L'historiographie du concept d'innovation reste à faire. Les rares et brèves réflexions sont actuellement empreintes de mythes et de confusions conceptuelles. La présente communication propose une historiographie documentant les usages du concept au fil des siècles : polémiques, instrumentaux et théoriques. Plus particulièrement, on discutera quand, comment et pourquoi le concept est devenu, et ce en moins d'un siècle, une valeur et un slogan.
Innovation is a concept that everyone understands spontaneously – or thinks he understands – ; that every theorist talks about and every government espouses. Yet, it has not always been so. For the last five hundred years, the concept innovation has been a dirty word. The history of the concept of innovation is an untold story. It is a story of myths and conceptual confusions. In this paper, I study the ways in which thoughts on innovation of early-modern society gave rise to innovation theory in the twentieth century. Namely how, when and why a pejorative and morally connoted word shifted to a much valued concept. I offer a history of the concept of innovation, going back to Antiquity. A history that takes the of the concept seriously : from polemical to instrumental to theoretical. - L'innovation en économie : l'histoire d'un désenchantement - Bernard Paulré p. 41-54 Nous abordons successivement les trois thèmes qui composent le domaine de l'économie de l'innovation. D'abord, la signification du mot innovation, chez Schumpeter avant de traiter de la conception de l'innovation selon les statisticiens. Ensuite, les modalités de l'innovation. Enfin ses effets économiques. La leçon que nous tirons de cet examen est celle d'un triple désenchantement : conceptuel, analytique et relatif aux effets de l'innovation. Nous utilisons ici positivement le mot désenchantement pour exprimer l'idée d'un détachement à l'égard d'une approche schumpetérienne de l'innovation qui la traite, selon nous, comme un phénomène transcendant au sens kantien.
We turn our attention successively to three main research questions in economics of innovation: First, the meaning of the word innovation: Schumpeter's concept before dealing with the approach of statisticians. Then the methods of innovation. Finally its economic effects. The lesson we draw from this review is that of a triple disenchantment: conceptual, analytical and relating to the effects of the innovation. We use here positively the word disenchantment to express the idea of a detachment from a Schumpeterian approach of innovation which treats it, we believe, as a transcendent phenomenon in a Kantian sense. - La montée de l'innovation sociale - Paul Leduc Browne p. 55-66 Si l'expression « innovation sociale » existe depuis plus de deux siècles, elle connaît depuis vingt-cinq ans une montée remarquable. Cet article cherche à situer le moment de l'innovation sociale dans le contexte de l'histoire récente, offrant à la lumière de celle-ci une caractérisation du discours de l'innovation sociale et une interprétation de son déploiement dans des programmes de recherche. L'article propose en outre un bref aperçu de certaines tendances dans la théorie et la pratique de l'innovation sociale qui répondent à une conjoncture historique nouvelle.
Although the expression “social innovation” has been around for more than two hundred years, its popularity has risen considerably over the past quarter of a century. This article situates the moment of social innovation in the context of recent history, in the light of which it proposes both a delineation of the discourse of social innovation and an interpretation of its deployment in social research. The article also looks briefly at some tendencies in the theory and practice of social innovation that respond to a new historical conjuncture. - Michel Foucault, la nouveauté comme différence de la philosophie - Charles Ramond p. 67-79 La notion de « nouveauté » est omniprésente dans les textes de Foucault. Mais d'un autre côté, sa construction de la notion d'épistémè le reconduit à un rationalisme intégral de type classique, dans lequel la philosophie a pour tâche de « comprendre » le « monde », et de mettre fin (comme illusoire) à toute nouveauté comme à tout étonnement. Nous montrons la cohérence de ce double geste, et à travers cela l'attachement de Foucault à une figure classique de la philosophie, rationnelle et virile, qui l'empêche peut-être, dans une certaine mesure, d'en apprécier les accomplissements les plus contemporains.
The notion of « novelty » (nouveauté) is omnipresent in Foucault's work. On the other hand, his construction of the notion of « épistémè » leads him back to an integral rationalism of the classical type, in which philosophy is meant to « understand » the « world » and put an end (as illusory) to all novelty as well to as any event. We inspect the coherence of this double-gesture, and beyond that Foucault's attachment to a classical figure of philosophy, as rational and virile, which prevented him perhaps, to a certain degree, from appreciating its more contemporary accomplishments. - La perception de l'innovation chez les chercheurs canadiens des sciences dites dures - Claude-Julie Bourque p. 81-95 Cet article traite de la perception qu'ont les chercheurs de la notion d'innovation telle qu'elle est véhiculée dans les politiques scientifiques en sciences de la santé, sciences de la vie et génie. Réalisée à partir des données d'une enquête mixte et longitudinale amorcée en 2009 (832 participants), l'analyse rend compte d'interprétations contradictoires des termes et des objectifs des politiques ainsi que de leurs impacts parfois contre-productifs mettant en cause certaines pratiques dans le système universitaire canadien.
This article discusses researchers' perception of the notion of innovation as conveyed by science policy statements in Health Sciences, Life Sciences and Engineering. Based on data from a mixed longitudinal study initiated in 2009 (832 participants), the analysis reflects how researchers hold contradictory interpretations of the terms and objectives of the various policy documents. Our study also exposes some counter-productive impacts regarding different practices in the Canadian university system.
- Les tendances innovatrices des sociétés contemporaines - Bernard Paulré p. 5-20
Politique
- Le Grand Paris qui mange : un projet politique culturel en émergence ? [Seconde partie] : La fabrique symbolique, des processus aux écritures - Dominique Pagès p. 97-111 Le "Grand Paris qui mange", ce sont aussi des signes, des symboles, des récits qui participent à rendre perceptible un territoire en transition alimentaire, à rendre tangible la métropolisation agriurbaine, à sensibiliser les habitants et les visiteurs à ce nouveau modèle de ville dite nourricière, comestible, fertile mais aussi à leur donner la parole sur ces transformations métropolitaines... Cet article propose ainsi de penser ensemble les processus d'évènementialisation, de patrimonialisation, de mise en tourisme mais aussi de mise en intrigue qui fondent la fabrique d'une métropole durable et plus spécifiquement agri-urbaine.
‘Greater Paris who eats' are also the signs, symbols, and stories which help us perceive a transition in the food habits of an area and an agriurban metropolisation, and which help sensitise both inhabitants and visitors to a new urban model for a city said to be nourishing, edible and fertile, at the same time giving them a voice in such metropolitan transformations. This article proposes a collective reflection on the processes underpinning the creation of events, cultural heritage, tourism as well as the narratives, which are the basis of the creation of a sustainable metropolis, more specifically an agri-urban one.
- Le Grand Paris qui mange : un projet politique culturel en émergence ? [Seconde partie] : La fabrique symbolique, des processus aux écritures - Dominique Pagès p. 97-111
Colloque
- « La ville numérique », conférence d'Antoine Picon - Bertrand Morvan p. 113-121
Livres en revue
- Fabriquer l'action publique : une activité "politique" ? - Guillaume Gourgues p. 123-129
- Judith Bonnin, Les voyages de François Mitterrand. Le PS et le monde (1971-1981) - Rémi Dalisson p. 131-133
- Gilduin Davy, Raphaël Eckert, Virginie Lemonnier-Lessage (dir.), Histoire, peuple et droit. Mélanges offerts au professeur Jacques Bouveresse - Anne-Sophie Chambost p. 135-138