Contenu du sommaire : Le français calédonien (Nouvelle-Calédonie), une « variété régionale » de français au sein de la francophonie
Revue | Langages |
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Numéro | no 203, septembre 2016 |
Titre du numéro | Le français calédonien (Nouvelle-Calédonie), une « variété régionale » de français au sein de la francophonie |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Le français calédonien (Nouvelle-Calédonie). Description d'un français régional, confrontations de terrains panfrancophones - Christine Pauleau p. 5-20
- La description du français calédonien : état des lieux - Christine Pauleau p. 21-36 Les travaux linguistiques sur la variété régionale calédonienne du français sont peu courants. Depuis les études de l'Université d'Auckland dans les années 60 (CNRS-Inalf 1983-1996) jusqu'aux descriptions lexicographiques (Pauleau 1995, 2007 & BDLP), c'est le domaine lexical qui est le mieux représenté : Pauleau (1995a) pose l'existence et la densité de la variation géolectale sur le terrain calédonien et l'illustre par un inventaire lexicographique qui, par la suite, est régulièrement augmenté (Pauleau 2007). La prononciation des locuteurs est néanmoins abordée avec notamment une enquête pour le projet Phonétique du Français Contemporain (Pauleau 2013) qui montre la persistance de la variation géophonétique. D'autres éléments encore, tel que l'imaginaire linguistique des locuteurs (Pauleau 1994, 2008), révèlent le français calédonien comme à la fois particulier et comparable aux autres lectes issus d'un processus de dialectalisation.Linguistic researches on Caledonian French are scarce. From the first studies (Auckland University) in the sixties (CNRS-Inalf 1983-1996) to polylectal lexicographic descriptions including electronic dictionary (Pauleau 2007 & BDLP), lexicon is most represented. Pauleau (1995a) shows hypothesis validation of caledonian geographic lexical variation existence and density illustrated by a lexicographic inventory that is regularly augmented (Pauleau 2007). Prononciation is studied too, for instance within the Phonétique du Français Contemporain project (Pauleau 2013), which shows the persistence of geophonetic variation. Other dimensions, such as the ambivalent ways in which Caledonian speakers perceive “their own code” and “people of France's code” (Pauleau 1994, 2008), define Caledonian French as both specific and similar to others “lects” stemming from dialectalisation.
- Entre français calédonien et langue kanak : quelle place pour le tayo ? Une approche écolinguistique - Sabine Ehrhart p. 37-48 Le tayo de Saint-Louis est une langue de Nouvelle-Calédonie avec une croissance exceptionnelle à cause de sa situation sociolinguistique privilégiée comme langue d'une communauté scolaire qui s'est transformée en principal système de communication pour la communauté tribale. Après les premières recherches sur les structures grammaticales de cette langue (Ehrhart 1993), j'avais étudié son statut sociolinguistique et sa matrice sociale (Ehrhart 2012). Les créoles ne sont pas une catégorie de langues à part mais des langues dans lesquelles le contact avec d'autres cultures et communautés linguistiques a joué un rôle particulièrement important et a laissé des traces particulièrement visibles. C'est ainsi que j'ai été amenée à définir le tayo, d'une part, comme une forme « extrême » du français calédonien et, d'autre part, comme l'une des langues kanak du pays.Tayo is a contact language spoken in and around Saint-Louis tribe in Southern New Caledonia. It shows at the same time common features with standard French or other regional varieties of French and French Creoles in other parts of the globe and also syntactical and semantic elements close to some Melanesian languages. This article tries to give a clearer definition of its position as a go-between, mediator or facilitator in the contact between groups of very diverse origins. This creole experience could well serve as an example for the management of linguistic and cultural diversity in other contexts.
- Les particularités du français calédonien (lexique, morphosyntaxe) et leurs enjeux sémantiques, pragmatiques et cognitifs - Didier Bottineau p. 49-70 Le français parlé calédonien présente un ensemble de caractéristiques cohérentes dans son lexique et sa morphosyntaxe qui n'ont rien d'anecdotique : elles illustrent la manière dont les modèles psychosociaux de l'interaction verbale dans une communauté constituée peut infléchir les usages au point de profiler la grammaire de leur langue au niveau même du système. En s'appuyant sur le paradigme de la linguistique enactive, cette étude montre comment une routine de l'interaction, mue par la subjectivité et l'émotion, impose à des faits de langue hétérogènes des ajustements innovants et convergents.Far from being anecdotic, the lexicon and morphosyntax of Caledonian spoken French display a whole range of coherent features which illustrate the way in which the psycho-social standards of verbal interactions in a human group bear upon usage and tend to profile the grammar of the language at the core of its system. With reference to the paradigm of enactive linguistics, this study shows how the routines of verbal interactions, driven by emotion and subjectivity, impose innovating and converging adjustments to heterogeneous linguistic facts.
- Diastratismes et réallocation des variantes : français d'Amérique et de Nouvelle-Calédonie - André Thibault p. 71-86 Cet article propose un relevé systématique, comparatif et analytique des correspondances entre les régionalismes présents en Nouvelle-Calédonie, d'une part, et ceux qui caractérisent les français d'Amérique (laurentien, acadien et louisianais) ainsi que le continuum créole/français antillais, d'autre part. Il identifie un certain nombre d'archaïsmes, mais aussi d'innovations communes, et se penche en particulier sur les diastratismes ayant connu des processus de réallocation dans les variétés d'outre-mer. En conclusion, le français de Nouvelle-Calédonie apparaît comme la « dernière frontière » d'un ex-empire colonial peuplé d'expatriés qui se sont construit une norme à eux, bien loin du carcan normatif de la métropole.This paper proposes a systematic, comparative and analytical survey of the correspondences between regionalisms in New Caledonia, on the one hand, and in North-America (Laurentian, Acadian and Cajun French) and the Antilles (French and Creole), on the other. It identifies a number of archaisms but also a set of common innovations, and specifically deals with vulgarisms that have undergone reallocation processes in overseas varieties. In conclusion, New Caledonia French appears to be the “last frontier” of a former colonial empire populated by expatriates who have built a norm of their own, far from the normative weight of the metropolis.
- Traits syntaxiques « populaires » dans le français « régional » de La Réunion : très populaires dans la francophonie, jusqu'en Nouvelle Calédonie - Gudrun Ledegen p. 87-102 Les jugements d'acceptabilité différents entre le français régional des DROMs (actuels et anciens : La Réunion, les Antilles, la Nouvelle-Calédonie, etc.) et le français de métropole (neutre vs populaire respectivement) sont une caractéristique très connue sur les plans du lexique, de la prononciation mais aussi de la syntaxe. Après un exposé historique permettant de cerner l'origine (« populaire » ?) commune de traits syntaxiques, le corpus d'analyse est présenté et les différents sens du terme « populaire » définis. Deux traits syntaxiques « populaires » sont ensuite examinés, i.e. l'omission du subjonctif et l'interrogation indirecte in situ, pour ce qui est de l'histoire de la tournure et de leur fonctionnement (en ce qui concerne notamment sa prosodie pour l'interrogative) et l'attestation actuelle en français régional de La Réunion ainsi que dans d'autres zones francophones, dont la Nouvelle-Calédonie.Differences of acceptability between the regional French from the DROMs (current and ancient départements et régions d'outre-mer (“overseas departments”): Reunion Island, West Indies, New Caledonia, etc.) and metropolitan French (respectively, neutral vs popular), are very well known in vocabulary, pronunciation but also in syntax. After a historical presentation identifying the common (“popular”) origin of the syntactic items, follows the presentation of the corpus and the definition of the term “popular”. Two “popular” syntactic items are then examined, the omission of the subjunctive and the indirect in situ interrogation, for what concerns the history of the structure, their uses (among others what concerns prosody for the interrogative structure) and current occurrences in regional French of Reunion Island and in other French-speaking areas, of which New Caledonia.
- Le français des Isles : des Antilles à la Nouvelle-Calédonie - Inka Wissner p. 103-124 Cet article étudie les liens qui relient le français en Nouvelle-Calédonie et le français aux Antilles à travers une analyse historico-variétale comparative des diatopismes linguistiques qu'ils partagent. Il émet l'hypothèse selon laquelle l'essentiel de ces partages relève du « vocabulaire des Isles » et est, à ce titre, issu du français colonial. Cela est confirmé par l'analyse pour les cas identifiés (amarrer, langage, linge, nous/vous/eux autres), un seul partage lexical étant de création récente (zoreille). L'article montre que le français en Nouvelle-Calédonie s'intègre bien dans une dynamique partagée avec les français d'outre-mer formés à date ancienne, constituant la dernière d'une série de « vagues » de diffusion qui ont balayé l'espace francophone.This paper examines the connections between Caledonian French and French in the West Indies through a comparative historico-varietal analysis of its shared linguistic diatopicisms. It states the hypothesis according to which most of the latter are also shared with the other French-speaking Islands, and were originally transported by colonial French. This is confirmed by the analysis of the identified diatopicisms (amarrer, langage, linge, nous/vous/eux autres), only one lexical unit being a recent creation (zoreille). The article shows that Caledonian French appears to be part of a dynamic movement shared with the earlier formed overseas French, forming the last of a series of “waves” which swept across the French-speaking world.