Contenu du sommaire : Pour une socio-histoire de la science politique
Revue | Revue Française de Science Politique |
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Numéro | vol. 67, no 1, février 2017 |
Titre du numéro | Pour une socio-histoire de la science politique |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Pour une socio-histoire de la science politique
- Pour une socio-histoire de la science politique : Introduction - Antonin Cohen p. 7-12
- Une science sans savants ? : Les paradoxes de l'émergence de la science politique en France entre 1945 et 1968 - Brigitte Gaïti, Marie Scot p. 13-42 Cet article retrace la construction de la science politique comme discipline scientifique dans la France d'après-guerre : c'est à Sciences Po – lieu a priori peu propice à l'innovation disciplinaire mais doté par l'ordonnance de 1945 d'une mission de recherche – qu'ont été institués en quelques années des cours et des diplômes, une revue, une association, des laboratoires de science politique. Le contexte académique d'après-guerre permet de comprendre la stratégie de création disciplinaire adoptée par Sciences Po, avec l'aide des fondations américaines pourvoyeuses de financements, de modèles épistémologiques et de légitimité scientifique. Empirique, focalisée sur l'analyse de l'actualité, la science politique se construit dans une tension contradictoire entre processus d'autonomisation et demandes nouvelles d'expertise sociale et politique dans une France en voie de modernisation.A science without scientists ?
This paper describes the development of political science as an academic discipline in post-war France. In just a few years, Sciences Po, a professional school rather than a research institution, established by Executive Order in 1945 in order to “promote research”, has offered academic programmes and degrees, founded an academic journal and a professional association, and created several research centres in political science. The post-war French academic context accounts for Sciences Po's disciplinary investment, backed by the US philanthropic foundations which provided money, scientific recognition, and epistemic models. Focusing on empirical methods and on the study of politics, the academic discipline has been caught between contradictory demands : scientific autonomy vs. social and political demands for expert knowledge in a post-war context of staterebuilding and economic and social modernization - “The French Connection” : Éléments pour une histoire des relations internationales en France - Nicolas Guilhot p. 43-67 Cet article offre quelques pistes d'analyse pour comprendre l'essor d'une discipline des « relations internationales » en France. Plutôt que d'y voir le résultat de spécificités nationales ou un produit importé des États-Unis, il tente de resituer le développement de cette discipline dans le cadre de circulations transatlantiques. Il montre les similitudes à la fois intellectuelles et idéologiques entre les trajectoires française et américaine de la discipline, largement déterminées par l'importation de la pensée politique allemande dans les deux contextes.“The French Connection”This article develops some hypotheses about the emergence of the discipline of International Relations in France. Rather than considering it the result of national idiosyncrasies or a product imported from the United States, it seeks to situate the development of the discipline within the framework of transatlantic circulations. It places the emphasis on the intellectual and ideological similarities between the French and the American trajectories of the discipline, due in particular to the displacement of German political thought and its impact in both contexts.
- La structuration atlantique des European Studies : La Fondation Ford et l'institut de la Communauté européenne pour les études universitaires dans la génération d'un « objet » - Antonin Cohen p. 69-96 En suivant la principale entreprise menée par la Fondation Ford pour instituer les European Studies, des années 1950 aux années 1970, cet article montre en quoi les stratégies transnationales en lien direct avec l'institutionnalisation du champ du pouvoir européen se heurtent aux résistances des champs nationaux. Les « études européennes » ne sont en effet que la partie résiduelle de stratégies beaucoup plus ambitieuses pour créer une véritable « université européenne ». Dans ce dossier spécial sur la sociohistoire de la science politique, cet article illustre ainsi le fait que la « discipline » ne peut être appréhendée isolément d'autres espaces sociaux qui lui sont en apparence étrangers.The Atlantic Structuration of European Studies
Tracing the main enterprise of the Ford Foundation aiming at instituting European Studies, from the 1950s to the 1970s, this article shows how transnational strategies linked with the institutionalization of the European field of power come up against the resistances of national fields. “European Studies” indeed appear to be the residual lot of much more ambitious strategies to create a truly “European University”. In this special issue about the sociohistory of political science, this article thus illustrates the fact that a “discipline” cannot be apprehended in isolation from other social spaces seemingly extraneous. - Des partis paradigmatiques : « LaPalombara & Weiner », « Lipset & Rokkan » et la science normale du politique dans les années 1960 - Francisco Roa Bastos p. 97-119 L'article étudie deux « classiques » de la théorie des partis : LaPalombara & Weiner (eds), Political Parties and Political Development, 1966 ; et Lipset & Rokkan (eds), Party Systems and Voter Alignments, 1967. Combinant analyse de contenus et étude sociologique des interactions des auteurs, il montre que leurs modèles théoriques divers, et leurs contradictions, s'expliquent par une adhésion partagée aux paradigmes de la « science normale » du politique de leur époque : fonctionnalisme systémique et behavioralisme. Cette communauté de pensée se fonde sur l'appartenance aux mêmes réseaux, qui consolident en retour ces paradigmes en les appliquant à un objet canonique : les partis politiques.Paradigmatic PartiesThis article examines two “classics” of political science : La
Palombara & Weiner (eds), Political Parties and Political Development, 1966 ; Lipset & Rokkan (eds), Party Systems and Vote Alignments, 1967. Combining a content analysis and a sociological study of the interactions between their authors, it shows that their various theoretical models and contradictions can be explained by a shared commitment to the paradigms of the “normal science” of their time : systemic functionalism and behavioralism. This community of thought is nourished by a common membership of the same networks, which in turn reinforces these paradigms by applying them to the study of a canonical object : political parties. - Excentrée ou excentrique ? : Positions de l'Université de Vincennes dans la science politique française des années 1970 - Christelle Dormoy-Rajramanan, Laurent Jeanpierre p. 121-143 À partir de l'étude du département de science politique de « Vincennes », de 1969 à 1980, cet article propose d'enrichir l'histoire de la discipline grâce à la prise en compte : des institutions secondaires, qui en sont parties prenantes ; du département d'enseignement comme unité d'analyse ; et de l'hétérogénéité des pratiques locales. Conduite à partir d'archives et de biographies d'enseignants-chercheurs, l'enquête insiste sur l'importance de l'État, du public étudiant et du capital social extra-universitaire des enseignants, comme paramètres d'analyse du développement des disciplines.Off-Center or Off-the-Wall ?
Studying the department of political science at the University of Vincennes from 1969 until 1980, this article presents the history of the discipline by taking into account : institutions that are considered secondary ; disciplinary departments as relevant units of analysis ; the heterogeneity of local practices inside the discipline itself. Built on archival and biographical research, the analysis insists on State policies, the sociology of student audiences and the social capital of scholars developed outside of the academic world as important parameters in order to explain the developments of a discipline.
Chronique professionnelle
- Les docteurs en science politique croient-ils en leur titre ? : Une cartographie dynamique de l'espace des docteurs en science politique des années 2000 - François Buton, Frédéric Lebaron, Nicolas Mariot p. 145-160 Cette note de recherche avance quelques résultats à partir d'une enquête par questionnaire menée auprès des docteurs en science politique ayant soutenu leur thèse dans les années 2000. Il s'agissait pour l'essentiel de demander à ces docteurs de retracer leur parcours doctoral et de porter un jugement sur les conditions de son déroulement. L'article s'intéresse principalement à un paradoxe : alors que la grande majorité des docteurs en science politique interrogés ont un emploi stable et se disent satisfaits des relations qu'ils ont pu avoir avec leur directeur de thèse, la moitié d'entre eux déconseillerait à de nouveaux arrivants d'entreprendre un travail de doctorat.Do Doctors in Political Science Believe in Their Academic Degrees ?
This research note gives some evidence from a survey about people who achieved a PhD in political science during the 2000s. We asked them about their doctoral years and the conditions under which they achieve their PhD. The article focuses on a paradox : how can we understand that, even though the vast majority of PhDs get a stable job and are satisfied with the relationship they had with their supervisor, half of them would advise newcomers not to commit on a PhD course.
- Les docteurs en science politique croient-ils en leur titre ? : Une cartographie dynamique de l'espace des docteurs en science politique des années 2000 - François Buton, Frédéric Lebaron, Nicolas Mariot p. 145-160
Chronique bibliographique
- Lectures critiques - p. 161-176
- Comptes rendus - p. 177-228
- Informations bibliographiques - p. 229-233