Contenu du sommaire : Le pouvoir des légistes

Revue Politix Mir@bel
Numéro vol 8, no 32, 1995
Titre du numéro Le pouvoir des légistes
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Le pouvoir des légistes

    • Éditorial - p. 1 accès libre
    • La royauté médiévale sous l'impact d'une conception scientifique du droit - Ernst Kantorowicz p. 5-22 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La royauté médiévale sous l'impact d'une conception scientifique du droit. Ernst H. Kantorowicz [5-22] La voie qui mène du Xlle siècle aux théories absolutistes est longue, tortueuse et complexe. On ne peut pas la comprendre si on ne prend pas en compte l'autonomisation et la professionnalisation d'un métier de juriste, à partir de la redécouverte du droit romain dans les universités naissantes, et les transactions collusives qui se nouent entre les légistes et le Prince pour la production de principes de gouvernement moderne.
      Kingship under the Impact of Scientific Jurisprudence. Ernst H. Kantorowicz [5-22] The way from the XIIth century to absolutist theories is long torturous and complex. One can not understand it whithout taking into account the autonomization and professionalization of the lawyer's profession, from the rediscovery of Roman Law in emerging universities, and the collusive transaction between the lawyers and the Prince in order to produce the principles of modern government.
    • Qui dit légiste, dit loi et pouvoir. Entretien avec Pierre Legendre - Pierre Legendre, Annie Collovald, Bastien François p. 23-44 accès libre
    • Engendrer l'État. Formation familiale et construction de l'État dans la France du début de l'époque moderne - Sarah Hanley p. 45-65 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Engendrer l'État. Formation familiale et construction de l'État dans la France du début de l'époque moderne. Sarah Hanley [45-65] En France, au début de l'époque moderne, le modèle de structuration monarchique de l'État n'était pas politique et constitutionnel, comme on l'imaginait encore récemment, mais social et familial. Ce premier modèle de l'État ne se centrait pas sur les institutions politiques servant un public amorphe, mais était dérivé d'un «complexe famille-État» qui légalisait les distinctions entre les sexes au service de la formation de la famille. La présente étude discute la formulation du complexe famille-État entre 1530 et 1640 et reconstruit des procès dont fut saisi le Parlement de Paris entre 1580 et 1730 en vue d'évaluer les conséquences qui résultent des rapports entre la «pratique de la structure» (les clauses du complexe) et la «structure de la pratique» (les actes d'agents humains). Elle montre comment les femmes, lésées par ce système, tournèrent les lois et les coutumes à leur profit et produisirent, en franchissant les démarcations de classe, une «culture de la feinte» qui minimisait les risques. Pour terminer, l'étude relève comment les plaideurs, qui imprimaient leurs doléances et les distribuaient dans les rues de Paris, transformèrent les procédures légales sur les droits sociaux jusqu'à la veille de la Révolution.
      Engenderig the State. Family Formation and State Building in Early Modem France. Sarah Hanley [45-65] In Early Modern France the model for monarchic statebuilding was not political and constitutional, as heretofore imagined, but social and familial. This early early state model was not centered on political institutions that served an amorphous public, but was derived from a «Family-State Compact» that legalized gender distinctions in the service of family formation. This article discusses the formulation of the Family-State between the «practice of the structure» (the regulation of the compact) and the «structure of the practice» (the actions of the human agents). It shows how women, who were placed at risk in this system, appropriated law and custom to fit themselves and produced accross class lines a «conterfeit culture» that minimized risks. Finally, the study notes how the litigants, who printed their stories and distributed them in the streets of Paris, transformed legal procedures into street dramas thar informed public opinion and provoked public discourse on social entitlement right up to the eve of the Revolution.
    • «Nul n'est censé ignorer la loi». La publication au Journal officiel : genèse d'un mode d'universalisation de la «puissance publique» - Pascal Gougeon p. 66-88 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      «Nul n'est censé ignorer la loi». La publication au Journal officiel : genèse d'un mode d'universalisation de la «puissance publique». Pascal Gougeon [66-88] S'il est une pratique considérée aujourd'hui, en France, comme une expression «naturelle» de l'autorité publique, c'est bien celle de la publication au Journal officiel. Pourtant, la genèse de ce mode d'universalisation du pouvoir étatique est le fruit d'une lente évolution, dont les différentes phases et les ruptures principales se produisent sous la IIIe République. Avec la publication au Journal officiel, le pouvoir diffuse et maîtrise une représentation de son autorité. En portant ses activités à la connaissance de groupes restreints mais spécifiques, il se lie à des intermédiaires sociaux essentiels (notables, juristes, bureaucrates, etc.). C'est à travers l'établissement d'une croyance dans une connaissance universelle de la loi (au sein de ces groupes sociaux restreints), et parallèlement, par la définition et la diffusion progressive d'une pratique comme la publication officielle, que le pouvoir étatique a pu fonder une reconnaissance de sa «puissance publique».
      «Nul n'est cense ignorer la loi». Publication in the Journal officiel : Genesis of a way of universalization for the Public authority. Pascal Gougeon [66-88] The publication in the Journal officiel is now considered as a natural practice of public authority. Although the genesis of this way of universalizing the power of the state is a product of a very slow evolution which the different phases and major breaks occured during the Third Republic. With the publication in the Journal officiel, the political power spreads and controls a respresentation of its authority. In making its activities knoweable to a restricted but specific groups, it ties itself with very important social intermediaries (members of the establishment, lawyers, bureaucrats, etc.). It is through the construction of a belief in the universal knowledge of the law (within these restricted social groups), and through the definition and progressive diffusion of a practice as the officiel publication that state power has been able to created a compliance to its «public authority».
    • «C'est la faute à Rousseau...». Les juristes contre les parlementaires sous la IIIe République - Marie-Joëlle Redor p. 89-96 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      «C'est la faute à Rousseau». Les juristes contre les parlementaires sous la IIIe République. Marie-Joëlle Redor [89-96] Loin des théories à la mode qui visent à faire de cette notion le fondement de la démocratie, cet article cherche à montrer, en revenant sur le contexte de son apparition - le début du siècle - que celle-ci a d'abord été élaborée par des publicistes contre les parlementaires. Au cœur du développement de l'État de droit s'inscrit ainsi un antiparlementarisme porté par des juristes qui voyaient dans les élus de la IIIe République et dans le suffrage universel, le symbole de l'incompétence et de l'ignorance.
      «C'est la faute à Rousseau..... Lawyers against MPs during the Third Republic. Marie-Joëlle Redor [89-96] Far from fashionable theories for which the notion of «État de droit» is the basis of democracy, looking back at the context of its emergence - the beginning of this century -, this article aims to show that it was invented by public lawyers against MPs. At the heart of the development of the «Etat de droit» lays therefore the antiparlementarism of these lawers which saw in the Mp of the Third Republic and in the universal suffrage, the symbol of incompetence and ignorance.
    • Remarques sur les doctrines nationales-socialistes de l'État - Olivier Jouanjan p. 97-118 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Remarques sur les doctrines nationales-socialistes de l'Etat. Olivier Jouanjan [97-118] Cet article s'insère dans un programme de recherche visant à restituer les discours de justification du système totalitaire nazi tels qu'ils ont pu être articulés par les juristes de l'époque. Comment en quelque sorte s'est justifié l'injustifiable ? Contrairement à ce qui a pu être avancé à propos de Vichy, l'analyse de la doctrine allemande montre que le nazisme juridique ne renvoie pas au positivisme traditionnel mais à une supra-légalité qui n'est autre que l'idéologie raciale-communautaire exaltée alors. Le positivisme se heurte en effet à partir de 1933 à la volonté nazie d'idéologisation des sciences, sciences sociales mais aussi sciences juridiques, dont le passage obligé est une refonte générale du langage ordinaire. C'est à ce travail de remodelage de la langue juridique que cet article est consacré.
      Notes on the National-Socialist Doctrine of the State. Olivier Jouanjan [97-118] This article is part of a research program which aims at restating the justification discourses of the Nazi totalitarian system, as articulated by the then jursits. How was the unjustifiable justified ? Contrarily to what happened with Vichy, the analysis of the German doctrine shows that juridical Nazism don't look back to traditional positivism, but to a supra-legality, that is nothing more than the racial communautarian idelology. From 1933 onwards, positivism faced the Nazis' aim to ideologize sciences, social sciences and juridical sciences, therefore remolding the ordinary language. This article deals with the remolding of the juridical language.
    • Une révolution tranquille. La Cour de justice des communautés européennes et ses interlocuteurs - Joseph H. Weiler p. 119-138 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Une Révolution tranquille. La Cour de justice des Communautés Européennes et ses interlocuteurs. Joseph H. Weiler [119-138] Bien que les gouvernements des États-membres de la Communauté Européenne (CEE) ont toujours joué un rôle essentiel dans l'élaboration des politiques et des normes communautaires, des années 60 jusqu'au années 80 la CJCE a toujours été un élément clé dans l'imposition des nonnes, de façon proche par sa structure et sa rigueur à l'ordre constitutionnel d'un État fédéral. À un degré sans précédent dans d'autres organisations internationales, les État se sont retrouvés pris par ce régime, incapables de jouir de l'habituelle marge de manoeuvre vis-à-vis des règles du droit international. Curieusement, les tribunaux, les parlements et les gouvernements des États-membres ont globalement semblé accepter sans rechigner ce nouveau régime constitutionnel .imposé* par la CJCE, ce qui a constitué une véritable «révolution tranquille». Dans article, l'auteur évoque les principales caractéristiques de ce nouvel ordre, avant d'examiner les raisons éventuelles de l'acceptation de la CJCE par les principales institutions des États-membres. Enfin, l'auteur pointe les facteurs susceptibles d'engendrer des relations plus difficiles entre la CJCE et ses interlocuteurs nationaux.
      A Quiet Revolution. The European Court of Justice and Its Interlocutors. Joseph H. Weiler [119-138] Although the governments of the member states of the European Community (EC) have allways had a principal role in fashioning EC policies and norms, from the 1960s through to the 1980s the European Court of Justice played a key role in imposing a compliance regime with these norms that nas resembled in its structure and rigor the constitutional order of a federal state. To an extent unprecedented in other international organizations, states have found themselves locked into this regime and unable to enjoy the more common international legal compliance latitude. Interestingly, member state courts, legislatures and governments seemed, by and large, to accept the new constitutional regime «imposed» by the European Court with a large measure of equanimity — a veritable «quiet revolution». In this essay, the author restates the principal features of the new order and then explores the possible reasons that explained the acceptance and endorsements of the European Court by major constituencies in the member states. In the conclusion, the author hints at factors that bode a much rougher future relationship between the European Court and its national intelocutors.
    • Droit pénal et droit civil. À propos d'une réforme de la mise en détention provisoire - Rémi Lenoir p. 139-153 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Droit pénal et droit civil. A propos d'une réforme de la mise en détention provisoire. Rémi Lenoir [139-153] La loi du 4 janvier 1993 a instauré les «juges délégués» et a modifié les attributions du juge d'instruction en matière de détention préventive. Extrêmement contestée par les magistrats, cette loi a surtout visé à modifier les modalités techniques ainsi que la nature même de l'acte de «mise en examen» du prévenu. Un système transitoire a ainsi «dépossédé» en partie le juge d'instruction de ses pouvoirs de mise en détention provisoire. Si peu qu'ait duré son application, cette réforme aura permis de faire apparaître avec plus de netteté, les différences d'approches de juges qui, bien que partageant la même «culture juridique», ne sont pas intégrés au même degré à la mission pénale confiée aux tribunaux correctionnels et à la Cour d'Assises. C'est ce que montre l'entretien, publié ici in extenso, d'une magistrate qui réfléchit à sa pratique de juge.
      Criminal Law and Civil Law. About a Reform of Preventive Emprisonment. Rémi Lenoir [139-1531 The «loi du 4 janvier 1993» created «executive judges» (Juges délégués) and modified the attributions of the juges d'instruction in preventive emprisonment matters. Extremely contested by judges, this Bill aimed principally to change the technical devices and the nature of the conviction ( mise en examen). A transitory system has therefore partly «despossesed» the juge d'instruction of his preventive emprisonment powers. Even if the application of this Bill was confined to a very short period of time, the reform showed how different were the approches of the judges whom, although they share a common «jurdidical culture», are not integrated to the same extent in the criminal procedure of the courts. This is what shows this interview with a judge about her own practice.
    • La réforme du droit de la nationalité ou la mise en forme juridique d'un virage politique - Géraud de Geouffre de La Pradelle p. 154-171 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La réforme du droit de la nationalité ou la mise en forme juridique d'un virage politique. Géraud Geouffre de La Pradelle [154-171] Quel a été le pouvoir des légistes dans l'élaboration de la réforme du droit de la nationalité enregistrée dans la loi du 22 juillet 1993 ? Cet article s'attache à montrer que les professionnels du droit ont joué un rôle à la fois politique et juridique. Politique parce qu'ils ont participé à la fois à la définition d'un nouveau cap dans la conduite des affaires de nationalité et à la légitimation de ses thèses idéologiques. Juridique parce qu'ils ont contribué bien sûr à la juridicisation de la loi. Tout semble alors montrer que leur pouvoir de juristes a été faible et subordonné à la volonté des hommes politiques. Rien ne dit cependant que ce pouvoir ne s'exercera pas après-coup, dans les prétoires, là où ils mettront en application cette loi nouvelle.
      The Reform of Nationality Law, or the Formalization of a Political Turn. Géraud de Geouffre de La Pradelle [154-171] What was the power of lawyers in the elaboration of the nationality law reform in the «loi du 22 juillet» ? This article shows how professional lawyers played both a political and a jurdical role. Political because they participated both to the definition of a new direction in the conduct of nationality matters and to the legimation of these ideological thesis. Juridical because they contributed to the juricization of this Bill. Everything seems to point that the power of the lawyers was weak and subordinated to the politicians' will. Although nothing allows us to think that this power will not be used afterwards in courtrooms.
  • Lectures

  • Revue des Revues - p. 185-201 accès libre
  • Resumes - abstracts - p. 202-204 accès libre