Contenu du sommaire : 1983, un tournant libéral ?
Revue |
20 & 21. Revue d'histoire Titre à cette date : Vingtième siècle, revue d'histoire |
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Numéro | no 138, avril-juin 2018 |
Titre du numéro | 1983, un tournant libéral ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Pierre Milza - Jean-Pierre Rioux p. 3
Articles
- Le tournant de mars 1983 a-t-il été libéral ? - Florence Descamps, Laure Quennouëlle-Corre p. 5-15
- L'incartade socialiste de 1981 - Jean-Charles Asselain p. 17-31 Dans ce texte issu d'une communication lors d'un séminaire de recherche, l'auteur souligne d'abord la rupture politique que constitue le tournant de mars 1983, du fait d'une « inversion des priorités » en matière de politique économique. Il s'attache à définir des continuités fortes entre la politique menée à la fin des années 1970 et celle des années 1980, et offre de nouveaux découpages chronologiques. Enfin, à l'aulne de son analyse macro-économique de moyenne durée, la parenthèse de 1981-1983 apparaît comme un échec économique et social qui aura contribué, plus que n'importe quelle argumentation libérale, à ancrer la conviction qu'il n'existe aucune alternative possible à la politique de rigueur et au primat de l'entreprise privée.1981 and the Failures of Socialism
In this text, which builds off of an oral presentation delivered during a research seminar, the author first describes the dramatic political U-turn that occurred in 1983 as the result of the so-called “inversion of priorities” in terms of economic policy. He then outlines the strong continuities that existed between French economic policy at the end of the 1970s and its development during the 1980s, offering a number of new chronological perspectives. In the light of this author's mid-term macro-economic analysis, the brief window of time between 1981 and 1983 is viewed as a moment of economic and social failure, the single most important factor – more so than any neoliberal economic arguments – which helped to convince the country that there was no reasonable alternative to austerity and the primacy of the private sector. - Les technocrates du ministère des Finances et le tournant de la rigueur de 1983 : Conversion libérale ou idéologie gestionnaire ? - Florence Descamps p. 33-47 Entre 1981 et 1983, les hauts fonctionnaires français du ministère des Finances rétablissent progressivement leur audience et leur crédit auprès des gouvernants socialistes, qui avaient dans un premier temps donné la priorité à un programme politique social et à une relance économique d'inspiration keynésienne. À l'occasion de la crise financière de 1982-1983 qui conduit le président François Mitterrand à faire le choix de l'Europe et à rectifier la politique économique, ils militent pour un plan de redressement des finances publiques et s'engagent dans une politique de lutte contre l'inflation dont il conviendra de déterminer si elle témoigne ou non d'une conversion au néolibéralisme.French Finance Technocrats and the 1983 Austerity Turn
Between 1981 and 1983, senior officials at the French Ministry of Finance gradually regained their footing as well as their credibility with the Socialist government, which had initially favoured a social political agenda as well as a Keynesian stimulus package. With the advent of the financial crisis in 1982-1983, which led President Mitterrand to choose to stay within the European monetary system and therefore correct the country's economic policy, French finance ministers launched a public finance restructuring plan and a number of anti-inflation policies. It remains to be seen whether or not this turning point was a true conversion to neo-liberalism. - Quand Pierre Mauroy résistait avec rigueur au « néolibéralisme » (1981-1984) - Mathieu Fulla p. 49-63 Cet article interroge l'idée d'une conversion précoce et résolue des élites socialistes françaises aux charmes du néolibéralisme au début des années 1980. François Mitterrand endosserait-il les habits de Ronald Reagan en mars 1983, tandis que Pierre Mauroy ferait du néolibéralisme sans le savoir ? L'examen des archives de la présidence de la République et de Matignon révèle le caractère néolibéral extrêmement discret, pour ne pas dire introuvable, de la politique économique socialiste. Si entrée de la France dans une forme de néolibéralisme économique il y eut, celle-ci est bien davantage à chercher dans les politiques suivies par les gouvernements Fabius et Chirac que dans celles menées par Pierre Mauroy.Pierre Mauroy's Rigorous Fight Against “Neoliberalism” (1981-1984)This article examines the widespread belief that French Socialist elites were quickly and decisively seduced by the charms of neoliberalism at the beginning of the 1980s. Did François Mitterrand dress up in Ronald Reagan's clothes in March 1983, and did Pierre Mauroy unwittingly implement neoliberal economic policies? A thorough analysis of the archives of the French president and prime minister's offices in fact reveals the incredibly discreet – if not downright invisible – contribution of neoliberal thought to Socialist economic policies at the time. If France did indeed enter into a neoliberal economic era during the 1980s, the roots of that transition should be sought under the subsequent Fabius and Chirac governments, rather than while Pierre Mauroy was at the helm.
- Les réformes financières de 1982 à 1985 : Un grand saut libéral ? - Laure Quennouëlle-Corre p. 65-78 À travers l'étude des réformes bancaires et financières menées sous le premier septennat de François Mitterrand, cet article entend revisiter la chronologie centrée autour du tournant de mars 1983. En s'appuyant sur des archives inédites, l'auteure montre qu'en matière financière et monétaire, virages et lignes continues offrent une histoire plus complexe que la rupture politique de 1983 et propose de nouvelles temporalités des politiques mises en œuvre depuis la fin des années 1970 jusqu'au milieu des années 1980. Centré sur l'action des ministres des Finances Jacques Delors et Pierre Bérégovoy, le changement de perspective conduit également à s'interroger sur le caractère néolibéral des politiques suivies, sur leurs fondements idéologiques et sur leurs objectifs.Finance Reform from 1982 to 1985By analysing the banking and financial reforms launched during the first mandate of president François Mitterrand, this article seeks to shed new light on the turning point marked by the year 1983. Drawing on hitherto unpublished archives, this article reveals that in terms of financial and monetary policies, the story is much more complicated than a simple political break. Highlighting a number of continuities and reversals, the author offers a new perspective on the policies implemented between the end of the 1970s and the middle of the 1980s. By focusing on the actions launched by the finance ministers Jacques Delors and Pierre Beregovoy, this shift in perspective also leads us to investigate the neoliberal nature of the politics adopted, their ideological basis and their objectives.
- L'impossible réforme de la Banque de France dans les années 1980 : L'autonomie repoussée - Bertrand Blancheton p. 79-92 Cet article met en perspective les projets de réformes de l'autonomie de la Banque de France dans les années 1980. Il analyse les débats théoriques anglo-saxons autour de l'indépendance, la lenteur de leur pénétration en France, l'évolution du degré d'autonomie juridique et opérationnelle de la Banque de France sous les gouvernements Mauroy et Fabius. L'échec de trois projets de réforme révèle l'attachement des responsables politiques et administratifs à la maîtrise des leviers monétaires et budgétaires et un scepticisme sur la capacité de l'autonomie à mieux garantir la stabilité des prix.The Impossible Reform of Banque de France in the 1980s
This article contextualises the various attempts at reforming the independence of the Banque de France in the 1980s. It analyses Anglo-Saxon theoretical debates regarding fiscal independence and their slow penetration in France, as well as the expansion of the Banque de France's legal and operational autonomy under the Mauroy and Fabius governments. The failure of three successive reform projects reveals just how attached French political and administrative leaders were to fiscal and monetary controls, and illustrates their high degree of scepticism regarding the ability of the Banque's independence to ensure price stability. - Le spectre de la crise financière française de 1983 : Influences et solidarités européennes - Laurent Warlouzet p. 93-107 Cet article revisite le « tournant de la rigueur » de mars 1983 grâce à de nouvelles archives ouest-européennes issues des gouvernements britanniques et allemands, de la Bundesbank, et de la Confédération européenne des syndicats. Il montre qu'un tournant véritable eut lieu en mars 1983 du fait du risque de crise financière, avec une possible intervention du Fonds monétaire international. La résolution de la crise a été essentiellement franco-allemande. Elle a permis une convergence des politiques économiques qui traduit moins un tournant néolibéral, que l'adoption de politiques de libre-marché perçues comme mieux adaptées au défi de la mondialisation, sans être incompatibles avec des politiques sociales.The Spectre of the 1983 French Financial Crisis
This article revisits the so-called “austerity turn” that occurred in March 1983 in the light of new West European archives from the British and the German governments, the Bundesbank, and the European Trade Union Confederation. It demonstrates that a genuine turning point occurred in March 1983, provoked by the spectre of a financial crisis and the potential intervention of the International Monetary Fund in France. The crisis was largely resolved by Franco-German negotiations. It allowed for the convergence of economic policies which, rather than reflecting a neoliberal turn, in fact revealed the adoption of free-market policies aimed at addressing the challenge of globalisation, without being incompatible with social policies.
- Qui sont les personnes sans domicile en France depuis 1945 ? : Éléments de réponse au prisme lyonnais - Axelle Brodiez-Dolino p. 109-126 Qui ont été les sans-abri en France au 20e siècle ? Ce qui paraît aujourd'hui nouveau l'est-il vraiment ? Embrassant, au prisme de l'urgence sociale lyonnaise, la période qui court de 1945 à nos jours, l'article montre comment, de l'après-guerre aux années 1970, la figure du « clochard » a masqué un iceberg composite de personnes sans domicile ou mal-logées. Il revient sur le retournement économique des années 1970-1980 et sur la montée des demandes d'hébergement et analyse comment, depuis les années 1990, des politiques publiques et des initiatives associatives novatrices répondent à de nouvelles recompositions sociologiques principalement dues à la durabilité de la crise et à de nouvelles arrivées migratoires.Who are the Homeless in France since 1945?
Who were the homeless in France during the 20th century? And is what seems to be a new problem today really so unprecedented? Looking at the period from 1945 to today, in the specific context of social emergency programmes in Lyon, this article demonstrates how, from the post-war period to the 1970s, the figure of the “hobo” has in fact concealed a multi-faceted portrait of homeless and inadequately housed individuals. This article then analyses the economic reversal of the 1970s and 1980s, as well as the rising demand for public housing and shelter. Moreover, since the 1990s, public policies and innovative associative actions have responded to new sociological configurations, mainly due to the persistence of economic crises and new migratory arrivals. - Tueurs, ibitero et notabilités génocidaires au Rwanda (Kigali, avril 1994) - Florent Piton p. 127-142 À partir du rapport d'une organisation non gouvernementale rwandaise réalisé peu après la fin du génocide des Tutsi, cet article interroge la constitution et l'organisation des bandes de tueurs (ibitero). Il s'intéresse en particulier au massacre de la paroisse de Gikondo à Kigali le 9 avril 1994. Si les génocidaires viennent de toutes les catégories de la population, miroir en cela d'une « société ordinaire », il y a néanmoins des jeux de pouvoir au sein des bandes. Il existe des notabilités génocidaires qui ne reproduisent pas nécessairement les hiérarchies sociales et politiques antérieures : l'opportunisme politique, la conviction idéologique et l'inventivité meurtrière sont à la fois des motivations et des ressources mobilisées par les « tueurs de grand renom ».Murderers, ibitero and other Genocidal Players in Rwanda (Kigali, April 1994)Based on a report produced by a Rwandan non-governmental organization shortly after the end of the Tutsi genocide, this article examines the composition and organisation of Rwandan death squads (ibitero), focusing in particular on the Gikondo massacre in Kigali on 9 April 1994. Although genocidal perpetrators came from every segment of the population, and were thus the reflection of an “ordinary society”, there were nonetheless significant power struggles within the death squads. Certain notable genocidal players did not necessarily reproduce previous social and political hierarchies: political opportunism, ideological beliefs and murderous innovation were both motivations and resources mobilised by so-called “notorious murderers”.
- Le mouvement transhumaniste : Approches historiques d'une utopie technologique contemporaine - Franck Damour p. 143-156 Le transhumanisme est un courant d'idées qui prône une transformation de l'être humain par la mise en œuvre de nouvelles technologies, dans des visées d'augmentation des capacités humaines et de prolongation importante de la vie. Né en Californie en 1988, il a diffusé ses thématiques dans le monde entier. S'il est l'objet de nombreuses études philosophiques, éthiques, théologiques, politiques, sociologiques, il a peu suscité de recherches proprement historiques, notamment de son mouvement. Or l'histoire du mouvement permet de mieux cerner ce qu'est le transhumanisme – entre controverse, mouvance et mouvement – et ce qui constitue sa structure idéologique. Une telle approche s'appuie sur la confrontation des publications, des traces numériques du mouvement et des trajectoires de ses membres.The Transhumanist Movement
Transhumanism is a movement which advocates for the transformation of human beings through the implementation of new technologies, with a view to significantly increasing individual capabilities and prolonging the human lifespan. Created in California in 1988, the transhumanist movement has now been disseminated throughout the world. While transhumanism has been the subject of many philosophical, ethical, theological, sociological and political studies, it remains largely under-investigated from an historical point of view. However, the history of the transhumanist movement can shed important light on the nature of transhumanism, its structure and its ideology, allowing us to see beyond the controversies and reactions it has provoked. This article proposes some possible approaches by cross-referencing transhumanist publications, the digital traces of the movement, and the life trajectories of its members. Rubriques
- Archives - p. 157-173
- Avis de recherches - p. 175-180
- Images, lettres et sons - p. 181-193
- Vingtième Siècle signale - p. 195-201
- Librairie - p. 203-224