Contenu du sommaire : Nouvelles recherches philosophiques sur le cinéma
Revue | Archives de philosophie |
---|---|
Numéro | tome 81, no 2, avril 2018 |
Titre du numéro | Nouvelles recherches philosophiques sur le cinéma |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - p. 227-229
Nouvelles recherches philosophiques sur le cinéma
- Nouvelles recherches philosophiques sur le cinéma - Marc Cerisuelo p. 231-234
- « Penser l'intime avec le cinéma » - Hugo Clémot p. 235-253 L'intime au cinéma est un thème bien documenté du point de vue des études cinématographiques, tandis que le privé soulève des problèmes souvent abordés en philosophie. Il est cependant plus rare que les philosophes aillent au cinéma pour y trouver de nouvelles solutions, voire des manières neuves de poser et de penser ces difficultés conceptuelles. En partant de la démarche d'un philosophe, Stanley Cavell, dont l'écriture relève à la fois des registres philosophique, autobiographique et « cinématographique », l'article cherche à montrer de quelle façon penser l'intime avec le cinéma est un moyen d'enrichir, voire de modifier nos conceptions.Thinking about Intimacy through Cinema
Intimacy in cinema is a well-documented theme in film studies. While philosophy has a long history of probing the problematic aspects of privacy, it is nevertheless unusual for philosophers to turn to the movies in order to find fresh perspectives using novel approaches to address and reconsider these conceptual enigmas. Taking the method of Stanley Cavell as a point of departure—a philosopher whose oeuvre belongs as much to philosophical and autobiographical registers as to “cinematographic” ones—this paper tries to show how thinking about intimacy through cinema is a way of enriching and even changing our conceptions on the matter. - Utopie de la transparence et machines de projection. De la nature des corps au cinéma - Alice Leroy p. 255-268 Cet article questionne la nature paradoxale des corps filmiques : de quelle existence témoignent-ils ? De quelle chair sont-ils faits ? On tentera d'en dessiner l'anatomie singulière à partir de la notion « corps utopique », proposée par le moins cinéphile des philosophes français, Michel Foucault. Bien que cette notion ne s'applique aucunement dans l'esprit de Foucault au cinéma, elle actualise une pensée du corps filmique en faisant de celui-ci le produit d'une configuration épistémique des sciences et de l'imaginaire. Appliquée à l'échelle du corps, l'utopie détermine une capacité de débordement et de dérèglement de la réalité, physique, temporelle et anthropique du corps filmé. Rapporté à l'utopie, le corps échappe au modèle dualiste de la matière et de l'esprit au profit des formes du multiple et des espaces-temps dans lesquels il se déploie.A Utopia of Transparency and Projection Devices. On the Nature of the Body in Film
This article questions the paradoxical nature of the cinematic body: what kind of presence does it have? What flesh is it made of? What precisely gives it shape and weight? I will elaborate its peculiar anatomy by going back to the notion of “utopian body,” suggested by the least “cinephile” of French philosophers, Michel Foucault. Although this notion does not concern a theory of film in Foucault's perspective, it allows us to think of the cinematic body as the product of an epistemic configuration of science and fantasy. When applied to the body's scale, utopia designates a capacity to overtake and disorder the physical, temporal, and anthropic reality of the filmed body. Conceived as a utopia, the body reciprocally escapes the dualist model of matter and spirit, to the benefit of the multiple space-times and shapes within which it materializes. - Film. Ontologie des images et iconologie au-delà de l'humain - Jean-Michel Durafour p. 269-286 Cet article présente le versant ontologique d'une démarche iconologique et esthétique que je baptise éconologie. Celle-ci, si elle n'est pas seulement cinématographique, est expressément filmique en ce qu'elle est élaborée à partir des films et de l'intérieur du mode de pensée que le cinéma porte à l'excellence. Délaissant le moment génétique qui y conduit, j'ai choisi dans ces pages d'en éclaircir les liens avec la nouvelle philosophie des objets.Film. Ontology of the Images and Iconology beyond the Human
This paper presents the ontological side of an iconological and aesthetic approach I call econology. This approach, while it is not only cinematographic, is expressly filmic in that it comes from films and from within the mode of thought that cinema ultimately incarnates. Moving away from the genetic step that leads to it, I have chosen, in these pages, to clarify its links with the new philosophy of objects. - Drôles de genres : la descendance cinématographique d'Erwin Panofsky - Marc Cerisuelo p. 287-304 Célèbre aussi pour son essai consacré au cinéma, « Style et matière du septième art », Erwin Panofsky a défendu, comme le fera plus tard Stanley Cavell, la projection contre l'enregistrement ; il a élaboré une conception fondée sur le fantastique inhérent au cinéma et a accordé au septième art la puissance d'inventer des genres. Renouant avec la force fantasmagorique de son inspiration, nous présentons ici de nouveaux genres un peu étranges, en insistant sur les fictions psychopompes, qui représentent une autre relation des morts et des vivants à l'écran.Funny Genres: The Cinematic Legacy of Erwin Panofsky
Equally famous for having written an essay on film, “Style and Medium in the Motion Picture,” Erwin Panofsky defended—and so, later, did Stanley Cavell—a cinematic thesis based upon projection versus recording; his conception was grounded on the fact that film itself was fantastic and that it became an art by inventing genres. Inspired by his phantasmagorical strength, we present here some new and weird genres, especially the psychopomp fictions, another way to express the connection between the living and the dead on the screen.
Martin Heidegger. Pensées publiques, réflexions privées
- Sur l'histoire de la chaire de philosophie à l'université de Marbourg depuis 1866 - Martin Heidegger, Guillaume Fagniez p. 305-310
- Heidegger lecteur d'Héraclite : l'ombre de Hegel - Antoine Cantin-Brault p. 311-327 Heidegger fut de toute sa vie philosophique un lecteur plus ou moins assidu d'Héraclite. Or, Heidegger n'a jamais su libérer Héraclite complètement de son interprétation hégélienne. De fait, Heidegger n'a jamais pu le libérer de Hegel, ce qui se comprend si l'on met en rapport les lectures heideggériennes et hégélienne d'Héraclite dans une métaphysique entendue comme onto-proto-logie, telle que l'a re-constituée Bernard. Mabille.In the Shadow of Hegel: Heidegger Reading Heraclitus
For his entire philosophical life, Heidegger was, more or less, an assiduous reader of Heraclitus. Heidegger never knew how to completely liberate Heraclitus from his Hegelian interpretation. In fact, Heidegger was never capable of liberating him from Hegel, and this becomes understandable if one relates both Heideggerian and Hegelian readings to a metaphysics understood as an onto-proto-logy, as posited by Bernard Mabille. - Les interprétations heideggériennes de Kant - Inga Römer p. 329-352 Les interprétations heideggériennes de Kant suivent trois étapes dans la réception du philosophe critique par Heidegger : une première, préparatoire (1925-27), une deuxième, positive (1927/28-1929) et une troisième, critique (à partir de 1930). L'article met en évidence la manière dont Heidegger lit l'esthétique, l'analytique et la dialectique transcendantale, ainsi que la philosophie pratique de Kant. Il met en lumière les conséquences philosophiques des lectures heideggériennes de Kant.Heidegger's Interpretations of Kant
Heidegger's interpretations of Kant distinguish three stages in his reception of the critical philosopher: a first preparatory stage (1925-27), a second affirmative stage (1927/28-1929), and a third critical stage (starting 1930). The study shows how Heidegger interprets the transcendental aesthetic, analytic and dialectic, as well as Kant's practical philosophy. A critical conclusion outlines the philosophical consequences of Heidegger's readings of Kant. - Heidegger lecteur de Kant. Points de vue privés et publics à partir de 1930 - David Espinet p. 353-372 Pourquoi Heidegger lit-il Kant ? À quel moment l'interprétation heideggérienne de Kant véhicule-t-elle, sous le couvert d'opérations et de constructions conceptuelles, des convictions désormais portées au jour avec la parution des Cahiers noirs mais pour lesquelles le penseur lui-même maintient une ambivalence dans ses publications et conférences ? Pour répondre à cette question, je propose de tracer une double perspective qui montre le contraste mais aussi les correspondances entre le point de vue intérieur resté privé de Heidegger sur la philosophie – notamment pratique – kantienne qu'il développe dans les Cahiers noirs et son point de vue rendu public sur cette même philosophie, qu'il expose dans le cours magistral De l'essence de la liberté de 1930.Heidegger Reading Kant. Private and Public Viewpoints from 1930 Onwards
Why did Heidegger read Kant? At what point does Heidegger's interpretation of Kant convey, under the guise of conceptual operations and constructions, convictions that have now been brought to light with the publication of the Black Notebooks but for which the thinker himself maintains ambivalence in his published works and lectures? To answer this question, I aim to provide a double perspective that shows the contrast but also the connections between Heidegger's private inner viewpoint on Kantian—notably practical— philosophy (which he develops in the Black Notebooks) and his public viewpoint on the same philosophy, which he exposes in his 1930 lecture The Essence of Human Freedom.
- Interroger la subjectivité. «Pour qui se prend-on ?» - Pierre Fasula p. 373-386 Avec la question « Pour qui se prend-on ? », nous voudrions examiner une certaine manière d'interroger la subjectivité, à la croisée des analyses de Vincent Descombes dans Le parler de soi et de Stanley Cavell dans Les voix de la raison. La subjectivité en jeu dans cette question est à comprendre en termes de positionnement de soi par rapport aux autres, positionnement dont la difficulté est thématisée à la fois par la morale et la littérature.Questioning subjectivity. “Who Does One Think He or She Is?”With the question “Who does one think he/she is?,” we would like to investigate one way among others of focusing on subjectivity, following both Vincent Descombes' analysis in Le parler de soi and Stanley Cavell's in The Claim of Reason. The subjectivity at stake in this question is to be understood as a positioning of oneself in relation to others, the difficulty of which is addressed by both ethics and literature.
- Le social et l'historique Robert Castel face à Michel Foucault - Florence Hulak p. 387-404 Résumé : L'universalité supposée du concept de « social » élaboré par l'École française de sociologie a fait l'objet de critiques foucaldiennes s'employant à en dévoiler l'ancrage historique. L'article montre que Les métamorphoses de la question sociale de Robert Castel met ces critiques à l'épreuve sur leur propre terrain historique. Alors qu'elles conçoivent l'invention du social comme corrélative de l'émergence du gouvernement par la « question sociale », Castel établit que ce mode de gouvernement est bien plutôt la manifestation de l'existence du social, soit de l'injonction à résoudre le problème des défaillances de la solidarité par le travail. Le concept d'État social peut alors être repensé comme le fragile fruit politique de luttes sociales, sans être réduit à la domination exercée par un État illusoirement qualifié de « providence ».The Social and the Historical. Robert Castel versus Michel Foucault
The French school of sociology developed a universal concept of “social,” which was subjected to Foucauldian critics aiming to unveil its hidden historical roots. This article contends that Transformation of the Social Question by Robert Castel puts these critics to the test on their own historical ground. While they describe the invention of the concept of “social” as a by-product of the emergence of a government driven by the “social question,” Castel shows that such politics rather reveal the existence of the social, i.e. the collective need to make up for the failures of solidarity through work. The “social state” should then be understood as the precarious political outcome of social struggles and not be reduced to the domination exercised by a state misleadingly called “État providence.” - Bulletin d'études hobbesiennes I (XXIX) - p. 405-448