Contenu du sommaire : La Chine et l'Asie du Sud-Est, vers un nouvel ordre régional ?
Revue | Monde Chinois |
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Numéro | no 54 - 55, 2018/2-3 |
Titre du numéro | La Chine et l'Asie du Sud-Est, vers un nouvel ordre régional ? |
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- Éditorial - Emmanuel Dubois de Prisque, Jean-Yves Heurtebise p. 5
- La Chine et l'Asie du Sud-Est, vers un nouvel ordre régional ? - Benoît de Tréglodé, Eric Frécon p. 6-11
Dossier : la Chine et l'Asie du Sud-Est, vers un nouvel ordre régional ?
- China-ASEAN relations through the lens of the South China Sea Maritime Security - Nong Hong p. 12-24 L'ASEAN et la Chine sont deux acteurs majeurs sur la scène de la mer de Chine du Sud (MDC) et leurs relations se développent donc parallèlement à l'évolution des contentieux maritimes. L'article observe de près l'évolution des relations entre l'ASEAN et la Chine et son impact sur l'attitude changeante de la Chine quant à l'approche à adopter pour régler les différends en mer de Chine méridionale.As it involves two major actors on the South China Sea (SCS) stage, the ASEAN-China relationship develops parallel with the evolution of the SCS dispute. The paper observes closely the development of ASEAN-China relations, and its impact on the changing attitude of China on what approach should be taken to address the SCS disputes.
- L'Asie du Sud-Est, la fin du hedging ? - Benoît de Tréglodé p. 25-31 La stratégie du contrepoids a toujours une constante des politiques étrangères des Etats de l'Asie du Sud-Est dans ses relations avec les grandes puissances pour mieux préserver leurs indépendances. La reconfiguration de l'Asie-Pacifique implique de profonds changements. La montée en puissance de la Chine et l'affaiblissement du rôle des Etats-Unis dans la région est en train de contraindre les dirigeants sud-est asiatiques à réévaluer avec pragmatisme leur relation avec la Chine de Xi Jinping. Assiste-t-on à la fin prochaine des politiques de hedging pour les Etats de la région ?The strategy of counterweight always has a constant of the foreign policies of the States of Southeast Asia in its relations with the great powers to better preserve their independence. The reconfiguration of Asia-Pacific implies profound changes. China's rise to power and the weakening role of the United States in the region is forcing Southeast Asian leaders to pragmatically reassess their relationship with Xi Jinping's China. Are the hedging policies for the states of the region coming to an end?
- La Chine et le premier cercle sud-est asiatique Indonésie, Malaisie, Singapour et Viêt Nam - Collin Koh Swee Lean, Evan Laksmana, Lê Thu Huong, Elina Noor, Mélanie Sadozaï p. 32-41 Cet entretien rassemble les chercheurs les plus en vue parmi la nouvelle génération des intellectuels sud-est asiatiques, tous issus des think tanks les plus influents. Ils partagent leurs vues sur la région en général et sur leurs pays d'origine en particulier à propos de la Chine populaire – qu'il s'agisse de diplomatie, de défense ou de soft power (puissance douce). Afin de ne pas allonger l'entretien, tout en laissant suffisamment d'espace de réflexion aux interlocuteurs, nous avons décidé de nous limiter à l'Indonésie, à la Malaisie, à Singapour et au Viêt Nam, du fait de l'expertise des chercheurs et des liens étroits de ces Etats avec la Chine.This interview brings together the most prominent researchers among the new generation of Southeast Asian intellectuals, all from the most influential think tanks. They share their views on the region in general and on their countries of origin in particular about China – on diplomacy, defence or soft power. In order not to lengthen the interview, while leaving enough space for reflection to the interlocutors, we decided to limit ourselves to Indonesia, Malaysia, Singapore and Vietnam, because of the expertise of the researchers and the close links of these States with China.
- Beating up on China: Southeast Asian versus Americano-Australian Approches - Sam Bateman p. 42-49 Les sentiments anti-chinois sont devenus une caractéristique commune du discours des nations occidentale. Menés par les Etats-Unis et les think tanks américains, ces sentiments sont à présent propagés parmi les amis et alliés de Washington. La Chine est fréquemment désignée comme ne respectant les règles de l'ordre international, à travers par exemple les supposées restrictions sur les libertés de navigation ainsi que sur son incapacité à accepter les décisions du Tribunal arbitral dans l'affaire entre elle et les Philippines en mer de Chine méridionale. Cet acharnement sur la Chine nourrit le manque de confiance. Mais, à l'exception du Vietnam, les nations sud-est asiatiques n'ont jusqu'ici pas adopté de ligne anti-chinoise.Anti-China sentiments have become a common feature of discourse in Western nations. Led by the United States and American think-tanks, these sentiments are now widespread among Washington's friends and allies. China is frequently cast as not following the rules-based international order through for example, its alleged restrictions on freedoms of navigation and its failure to accept rulings from the Arbitral Tribunal in the case between it and the Philippines in the South China Sea. This beating up on China builds distrust, but and with the exception of Vietnam, Southeast Asian nations have not so far adopted the anti-China line.
- La politique contre-terroriste chinoise face aux réseaux jihadistes en Asie du Sud-Est - Mélanie Sadozaï, Charza Shahabuddin p. 50-58 La politique antiterroriste de la Chine découle de sa politique nationale de répression contre la minorité ouïghoure. La Turquie est un pays refuge pour cette population, dont la frange la plus radicalisée, les jihadistes du Parti islamique du Turkestan, se rendent en Syrie et en Iraq pour combattre aux côtés d'Al-Qaïda et Daesh. Toutefois les Ouïghours séparatistes ne partagent pas le même agenda politique que ces groupes jihadistes. L'Asie du Sud-Est est avant tout pour eux une route de passage vers les fronts de combats. Pour lutter efficacement contre ces menaces, la Chine aligne sa politique de défense et de lutte antiterroriste à celle de ses partenaires stratégiques et commerciaux en Asie du Sud-Est. Elle peut, dans certains cas, faire pression sur des pays alliés pour renforcer l'efficacité de ses mesures.China's counter-terrorism policy stems from its own repressive domestic policy against the Uighur minority. Turkey is a haven for this population, whose most radical fringe, the Turkistan Islamic Party (TIP) jihadists, go to Syria and Iraq to fight alongside Al Qaida and Daesh. However, Uighur separatists do not share these groups' political agenda. South-Est Asia represents for the Uighur a route they use on their way to the battlefronts. In order to fight efficiently against these threats, China aligns its defense policy on that of its strategic and trade partners in South-Est Asia. In some cases, China is able to pressure allied countries into strengthening the efficiency of their measures.
- La modernisation des armées d'Asie du Sud-Est - Christian Bourdeille p. 59-67 Les pays d'Asie du Sud-Est ont fait le choix de la modernisation de leurs armées face à la présence importante de la Chine dans la région. Cette politique d'armement passe par l'acquisition de nouveaux matériels auprès des industriels européens notamment, qui peuvent ainsi percer dans le marché de la défense en Asie Pacifique. Toutefois, les Etats sud-est asiatiques ont aussi l'ambition de développer leur propre armement afin de s'autonomiser, ce qui passe, en particulier, par un transfert de technologie.The countries of Southeast Asia have chosen to modernize their armies in the face of China's significant presence in the region. This armament policy requires the acquisition of new equipment from European manufacturers in particular, who can thus break into the defence market in Asia Pacific. However, the South-East Asian states also have the ambition to develop their own armaments in order to empower themselves, which requires, in particular, a transfer of technology.
- Quand Pékin cible les élites sud-est asiatiques - Eric Frécon p. 68-77 La Chine cherche à peser sur la scène sud-est asiatique par tous les moyens. Au-delà des approches économiques et militaires, Pékin cible les élites : en priorité les dirigeants mais aussi les proches conseillers, chefs militaires et femmes ou hommes d'affaires. La méthode pourrait cependant rencontrer quelques limites : les minorités chinoises se lassent de la tutelle chinoise ; les élections risquent de renverser les personnalités proches de Pékin et le modèle chinois pourrait ne plus autant séduire du fait des concurrences extra-régionales. A croire qu'une voie médiane, entre top-down (de haut en bas) et bottom-up (de bas en haut) serait plus judicieuse, par exemple à travers les forums informels dits ‘Track 2' ?China is seeking to influence the South-East Asian scene by all means. Beyond economic and military approaches, Beijing targets the elites: in priority the leaders but also the close advisors, military chiefs and businessmen. The method could, however, meet some limits: Chinese minorities get tired of Chinese supervision; elections risk overthrowing personalities close to Beijing and the Chinese model could no longer be as attractive because of extra-regional competition. It seems that a middle way, between top-down and bottom-up would be more judicious, for example through the informal forums called “Track 2”?
- Le rôle de la Chine dans l'intérêt accru des forces armées indonésiennes pour la sécurité régionale - Christine Cabasset p. 78-84 Alors que les forces armées indonésiennes sont traditionnellement plutôt tournées vers la sphère intérieure, l'environnement régional et les priorités du président Joko Widodo en matière de défense ont favorisé leur ouverture accrue aux enjeux transnationaux. Cet article explore la place que tient la Chine dans ce mouvement et dans l'évolution de la posture militaire, dans un contexte marqué par les avancées de la Chine près des Iles Natuna et par une histoire tortueuse entre les deux pays, mais aussi par le poids économique majeur acquis par la Chine en Indonésie.While the Indonesian armed forces traditionally focused moreover on the interior sphere, the regional environment and the President Joko Widodo priorities in the defense sector, have favored an increasing interest of the army for transnational challenges. This article explores the role of China in this move and in the evolution of the military posture, in a context marked by both the China advance in the Natuna Islands area and the tortuous history between the two countries, but also by the major economic weight acquired by China in Indonesia.
- La dérive chinoise de la Thaïlande des généraux - Arnaud Dubus p. 85-92 La militarisation de l'appareil dirigeant, des organes d'Etat et, dans une certaine mesure, de la société depuis le coup d'Etat de mai 2014 en Thaïlande a favorisé une dérive du royaume vers la Chine. Les ambitions régionales chinoises tant au niveau économique que politique ont fait écho à la volonté de la junte thaïlandaise de renforcer ses liens avec Pékin après le refroidissement des relations avec les pays occidentaux. Ce rapprochement stratégique entre Bangkok et Pékin s'articule autour de grandes initiatives économiques, comme le projet de « la nouvelle route de la soie », ainsi qu'autour d'achats d'armements chinois par la junte et d'une coordination diplomatique sur les questions de sécurité régionale. Ce rapprochement n'est toutefois pas sans tensions, Bangkok se trouvant en position de vulnérabilité vis-à-vis de Pékin et voyant sa crédibilité au niveau international affectée.The militarization of the government apparatus, the state agencies and, to a certain extent, of the society since the coup of May 2014 in Thailand has favored a drift of the kingdom towards China. The regional ambitions of China, both at the economic and political level, are echoing the desire of the Thai junta to strengthen its links with Beijing after the cooling of its relations with the Western countries. This strategic proximity between Bangkok and Beijing is built around large economic initiatives, such as the Belt and Road Initiative, as well as around purchases of Chinese weapons and military equipment by the Thai junta and diplomatic coordination on regional security issues. This proximity is not without tensions, as Bangkok finds itself in a position of weakness vis à vis Beijing and see its international credibility being undermined.
- Transition politique birmane et redéfinition des relations avec la Chine : vers une reprise des relations « fraternelles » ? - Carine Jaquet p. 93-100 La Chine a maintenu des relations de « fraternité » avec les juntes birmanes. Lors de la transition politique, la Birmanie s'efforça de s'émanciper du pouvoir chinois en diversifiant ses relations diplomatiques et commerciales. Puis, le gouvernement d'Aung San Suu Kyi a dû revoir cette position suite aux crises internes comme les conflits armés ethniques mais aussi les violences anti-Rohingya. Celles-ci ont fourni de nouveaux points d'entrée à la Chine qui apparait à nouveau comme son allié stratégique.China maintained 'fraternal' relations with Burmese juntas. With the political transition, Myanmar attempted to emancipate from the Chinese power by diversifying its diplomatic and trade relations. But Aung San Suu Kyi's government had to review this strategy after the internal crises such as the ethnic armed conflicts and the violent episodes targeting the Rohingya populations. These issues offered new entry points to China that appears to be back to its former position of strategic ally.
- La Modernisation de l'Armée Populaire du Viêt Nam : mécanismes et conséquences sur la défense vietnamienne - Benoît Noget p. 101-109 A l'issue du VIIe congrès du Parti Communiste Vietnamien (PCV) en 1991, les cadres politiques et militaires ont décidé d'amener l'Armée Populaire du Viêt Nam (APV) vers une réforme dite progressive. Pour la première fois dans l'historiographie militaire vietnamienne, une modernisation n'allait pas coïncider avec une augmentation croissante des effectifs et de la dotation. 27 ans plus tard, limitée financièrement et contrainte à entretenir sous différents parcs d'alerte l'ensemble de son matériel, l'armée vietnamienne dispose aujourd'hui de peu d'options. L'armée de l'air et la marine représentent les seules entités pouvant accueillir les systèmes d'armement idoines. Les revendications chinoises en mer de Chine méridionale ont totalement changé les facteurs de menaces et le contrôle de cet espace maritime qui apporte de la profondeur stratégique va modifier fortement la doctrine d'emploi de l'Armée populaire du Viêt Nam. Saisir et mener cette modernisation à bien n'est pas aisé. L'intégration d'équipements de nouvelles générations pose de nombreux problèmes aux Vietnamiens, d'autant plus que l'ensemble des données disponibles pour conduire des programmes d'armement à caractères évolutifs est limité. Le potentiel militaire de l'APV demeure ainsi toujours confiné à l'emploi de son armée de terre. Atypique par sa conception et son organisation, la modernisation de l'APV tend encore aujourd'hui à évoluer dans le but d'assurer sa pérennité.At the end of the VIIth Congress of the Communist Party of Vietnam (CPV) in 1991, the political and military cadres decided to lead the Vietnam People's Army (VPA) towards a so-called progressive reform. For the first time in Vietnamese military historiography a modernization would not coincide with an increasing increase in manpower and staffing. 27 years later, financially limited and forced to maintain all its equipment under various warning parks, the Vietnamese Army now has few options. The Air Force and the Navy are the only entities that can accommodate suitable weapon systems. The Chinese demands in the South China Sea have totally changed the threat factors and the control of this maritime space which brings strategic depth will strongly modify the employment doctrine of the Vietnam People's Army. It is not easy to grasp and carry out this modernization. The integration of new-generation equipment poses many problems for Vietnamese, especially since all the data available for conducting weapons programs with evolving characters is limited. The military potential of the VPA thus remains confined to the use of its army. Atypical in its design and organization, the modernisation of the VPA still tends to evolve today in order to ensure its sustainability.
- China-ASEAN relations through the lens of the South China Sea Maritime Security - Nong Hong p. 12-24
Varia
- From Model to Solution? The China Experience and Its Implications - Der-yuan Maxwell Wu p. 110-120 Avec l'émergence géopolitique de la Chine, ce pays tend à se proposer sous différentes formes comme une référence pour les autres pays en développement et même pour le monde dans son ensemble. Cependant, cette évolution n'est pas sans provoquer des tensions à la fois à l'intérieur du pays et dans le domaine des relations internationales.With the geopolitical rise of China, this country tends to emerge in different forms as a reference for other developing countries and even for the world as a whole. However, this evolution is not without causing tensions both within the country and in the field of international relations.
- L'emprise financière de la Chine sur Sri Lanka : quelles implications pour l'Inde ? - Laurent Amelot p. 121-134 Alors que sous la présidence de Mahinda Rajapaska, les entreprises chinoises ont massivement investi à Sri Lanka, en particulier dans ses régions méridionales, générant une dépendance financière de Colombo à l'égard des établissements bancaires chinois, l'arrivée au pouvoir de Maithripala Sirisena a facilité le retour des sociétés indiennes à Sri Lanka, qui ont essentiellement investi dans le Nord et l'Est. Le face-à-face sino-indien, par entreprises interposées, qui semble se profiler ne devrait pas transformer Sri Lanka en un théâtre d'affrontement entre ces deux grandes puissances asiatiques. Par contre, la géographie des investissements chinois et indiens qui se dessine pourrait fragiliser l'unité territoriale de Sri Lanka.While under the presidency of Mahinda Rajapaska, Chinese companies have invested heavily in Sri Lanka, particularly in its southern regions, generating financial dependence of Colombo on Chinese banking institutions, the coming to power of Maithripala Sirisena has facilitated the return of Indian companies to Sri Lanka, which essentially invested in the North and East. Nevertheless, this situation should not turn Sri Lanka into a theater of confrontation between these two great Asian powers. On the other hand, the emerging geography of Chinese and Indian investments could weaken the territorial unity of Sri Lanka.
- From Model to Solution? The China Experience and Its Implications - Der-yuan Maxwell Wu p. 110-120
Notes de lecture
- Notes de lecture - p. 135-148