Contenu du sommaire : Réprimer & domestiquer : stratégies patronales

Revue Agone Mir@bel
Numéro no 50, 2013
Titre du numéro Réprimer & domestiquer : stratégies patronales
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • À l'ombre du « dialogue social » : Éditorial - Étienne Penissat p. 7-18 accès libre
  • Entretien d'Anne Debrégeas, syndicaliste (SUD-Énergie) : À propos de Répression et discrimination syndicales - Anne Debrégeas p. 19-32 accès libre avec résumé
    La grève de la faim de militants syndicaux était une pratique totalement inédite, venant au terme d'un processus qui semblait sans issue, d'une violence extrême tant pour le salarié licencié que pour le collectif, puisque cela revenait pour le patronat à nier le droit de grève et le droit de se syndiquer. La répression patronale n'était pas nouvelle, mais elle avait rarement été exercée à ce niveau et dans une entreprise comme GrDF. Cette grève de la faim fut un catalyseur, une occasion de parler ensemble de cette question de la répression avec des militants syndicaux ou non venus de secteurs différents, qui – tous – en avaient été victimes ou témoins. L'absence de visibilité de cette pratique finalement courante, et la faible mobilisation syndicale au niveau central sur cette question apparaissaient criantes. Le droit syndical est un droit fondamental inscrit dans la Constitution de ce pays, qu'une partie du patronat se permet pourtant de bafouer régulièrement.
  • Derrière la vitrine du « dialogue social » : les techniques managériales de domestication des conflits du travail - Baptiste Giraud p. 33-63 accès libre avec résumé
    Si l'entreprise est un lieu de conflit, la mobilisation collective des salariés est interprétée avant tout comme le résultat d'une accumulation de problèmes individuels protéiformes d'ordre psychologique, relationnel, ou liés aux conditions de travail, que l'encadrement hiérarchique n'a pas su tempérer. Ce faisant, les syndicalistes auraient le champ libre pour se saisir de ces problèmes et enrôler les salariés dans un mouvement de protestation tout en retraduisant leurs griefs dans des registres de revendication plus collectifs et politiques. Selon un consultant, « il n'y a pas de grève salariale : dans 95 % des cas, elle n'est que symptomatique de dysfonctionnements managériaux. Vous savez, lorsqu'un salarié entre en grève, généralement, ce n'est pas parce qu'il adhère aux revendications. Il entre en grève parce qu'il y a eu une série de petits irritants qui font qu'il a eu besoin d'exprimer son ras-le-bol. C'est après que les revendications sont formulées par les syndicats ».
  • Petite phénoménologie du despotisme d'entreprise - Henri Clément p. 65-88 accès libre avec résumé
    Cet article voudrait parvenir à saisir la réalité quotidienne des politiques patronales en partant d'une expérience concrète de militant syndical. En marge des travaux sociologiques, les matériaux de ce texte sont issus de la nécessité pour le militant qui découvre la violence des relations sociales en entreprise de comprendre la réalité à laquelle il doit faire face afin de mettre en place des stratégies efficaces. C'est pour cette raison qu'en décalage avec la pratique commune des publications universitaires j'aurai largement recours à la première personne du singulier, mais aussi du pluriel car j'ai rarement été seul à mener ces activités. Derrière cette expérience personnelle, il s'agit de montrer la répression quotidienne, banale, celle à laquelle doivent faire face des milliers de délégués, d'élus et de militants de terrain. Cette répression, qui les harcèle, les use, les épuise, est théorisée par des gens formés pour la mettre en pratique.
  • Les syndicats américains face aux stratégies managériales d'entrave du syndicalisme - Émilien Julliard p. 89-114 accès libre avec résumé
    Les consultants en relations sociales spécialisés dans la gestion des conflits du travail constituent un secteur en pleine croissance aux États-Unis. Il est passé de cent cabinets dans les années 1960 à plus de mille en vingt ans, avant de se stabiliser, dans les années 1990, en partie à cause du déclin du syndicalisme auquel il a lui-même contribué. Le taux de syndicalisation a chuté aux États-Unis de 28,3 % en 1954 à 11,8 % en 2011. Dans ce pays, la participation quasi systématique des consultants aux conflits du travail a érigé un mode de gestion des relations professionnelles en norme : des entreprises « libérées » de leurs syndicats – « union free ». En retour, les syndicats ont progressivement intégré ces techniques d'« évitement du syndicalisme (union avoidance) » au sein de leurs stratégies.
  • Préserver l'ordre usinier en France à la fin des années 68 - Xavier Vigna p. 115-133 accès libre avec résumé
    Un des pires lieux communs dans la déploration des piètres relations sociales en France est de faire porter cette responsabilité à une tradition radicale supposée des organisations syndicales et de leurs militants, qui contrasterait avec la modération de leurs homologues européennes. À supposer qu'une pacification de ces relations soit souhaitable, il apparaît vite que le patronat, seul ou en association avec l'appareil d'État, a déployé une large palette de stratégies pour interdire toute transformation d'ampleur de l'« ordre usinier ». Par là, on désigne l'organisation traditionnelle du travail industriel, caractérisée par la présence d'une hiérarchie censée faire respecter les méthodes du travail, les cadences et la discipline. Cette défense de l'ordre usinier revêt une forme collective, à mesure que les organisations patronales se structurent à la fin du XIXe siècle, en même temps qu'elles fournissent des informations et prodiguent des conseils en temps de grève.
  • Le circuit de secours syndical : Quand représentants patronaux & syndicaux cogèrent les conflits professionnels - Marlène Benquet p. 135-157 accès libre avec résumé
    Nous avons déplacé notre attention des salariés vers l'encadrement en partant de l'idée que les freins aux actions collectives proviennent certes des trajectoires et de la faiblesse des ressources des premiers, mais aussi des stratégies mises en place par les seconds pour garantir, autant que possible, la réalisation quotidienne du travail. Nous décrivons ici l'une des stratégies patronales de pacification professionnelle : le fait de s'attacher une organisation syndicale particulière. En centrant l'analyse sur les relations que les syndicalistes entretiennent, non pas avec les salariés, mais avec les responsables patronaux, il s'agit de comprendre pourquoi le patronat n'est pas hostile au développement de toutes les organisations syndicales, comment il élabore avec certaines des relations de partenariat, mais aussi de quelles façons les évolutions patronales et notamment la financiarisation de l'actionnariat modifient et dégradent les relations entre patronats et syndicats.
  • Réforme de la représentativité, pouvoir syndical & répression : Quelques éléments de réflexion - Karel Yon, Sophie Béroud p. 159-173 accès libre avec résumé
    Le syndicalisme français est généralement dépeint, taux de syndicalisation à l'appui, comme particulièrement faible. Cette faiblesse serait à l'origine d'une conflictualité sociale récurrente : faute de représentants pour canaliser l'expression des salariés et de négociateurs expérimentés pour transformer ces griefs en accords, seule l'action protestataire semblerait rationnelle. L'« irresponsabilité » des organisations professionnelles serait de surcroît encouragée par les « excès » d'interventionnisme étatique. La loi du 31 janvier 2007 « de modernisation du dialogue social » impose désormais à l'État de consulter les « partenaires sociaux » préalablement à toute réforme portant sur le travail, l'emploi et la formation professionnelle. Peu de temps après était adoptée la loi du 20 août 2008 « portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du travail », qui modifie profondément les règles de représentativité syndicale.
  • Histoire radicale

  • La leçon des choses