Contenu du sommaire : Égalité et mobilité sociale aux États-Unis : La « recherche du bonheur » est-elle confisquée ?
Revue | Politique Américaine |
---|---|
Numéro | no 32, 2019/1 |
Titre du numéro | Égalité et mobilité sociale aux États-Unis : La « recherche du bonheur » est-elle confisquée ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Éditorial - Alexandra de Hoop Scheffer, François Vergniolle de Chantal p. 5-8
- Introduction - François Vergniolle de Chantal, Christine Zumello p. 9-16
- Politiques à destination des classes moyennes, facteur d'égalité ou d'inégalité ? - Bradley Smith p. 17-39 Les années 1950 voient l'émergence d'une idéologie selon laquelle l'héritage politique du New Deal aurait permis aux États-Unis de devenir une société de classes moyennes. Grâce à la mise en place de l'État-providence, d'une fiscalité très progressive et d'une politique d'accès à la propriété immobilière, les inégalités sont peu importantes et de nombreux Américains de la classe ouvrière viennent gonfler les rangs des classes moyennes : les politiques à destination de ces dernières seraient donc un facteur d'égalité important. Or, depuis la fin des années 1970, les États-Unis assistent au retour d'inégalités économiques telles qu'ils ne les avaient pas connues depuis les années 1920. La classe moyenne serait aujourd'hui en train de s'effriter, ce que certains imputent à la cupidité de la haute finance, d'autres à une fiscalité excessive et une réglementation trop stricte. Cet article défend la thèse que les politiques à destination des classes moyennes peuvent aussi être facteurs d'inégalité lorsque, pour maintenir leur mode de vie, des membres de cette classe soutiennent les réductions d'impôt, la déréglementation et d'autres politiques néolibérales. Le paradoxe est que ce sont ces mêmes politiques qui à terme rendent le mode de vie de la classe moyenne moins accessible au grand nombre.During the postwar era, the United States had allegedly become a middle-class society thanks in large part to the legacy of the New Deal. Between the rise of a welfare state, a very progressive tax system, and policies aimed at increasing homeownership, inequalities were limited, and many working-class Americans made their way into the middle class. It would seem therefore that middle-class politics is a force for equality. Since the late 1970s, however, the United States has seen the return of levels of economic inequality that hadn't been experienced since the 1920s. Today the American middle class appears to be eroding. Some blame this on upper-class greed, others on excessive taxes and regulations, and still others on globalization. This article argues that middle-class politics can also be a powerful force for inequality when middle-class voters support tax reductions, deregulation, and other neoliberal policies to maintain their lifestyle. The paradox is that it is the same policies that have been putting the middle-class lifestyle out of reach for a growing number of Americans.
- La crise identitaire du Parti démocrate face à l'avènement de l'aristocratie blanche - Olivier Richomme p. 41-82 Le capitalisme financier américain et les mécanismes d'accumulation de richesse sur plusieurs générations ont crée une nouvelle forme d'aristocratie qui est presque exclusivement blanche. Cette stratification ethno-raciale, et sa mesure statistique, change la perspective que les Américains ont des inégalités. Cet article propose dans un premier temps d'examiner dans quelle mesure affiliation ethno-raciale et appartenance à une classe sociale sont imbriquées. Dans un second temps, nous exposons le dilemme stratégique du Parti démocrate en réponse à l'avènement de cette aristocratie blanche. Le parti, fortement divisé quant aux leçons à tirer de l'élection de 2016, se trouve poussé, presque malgré lui, vers une certaine forme d'intersectionalité par des contraintes électorales fortes.The American financial capitalism and wealth inheritance mechanisms are creating a new form of aristocracy that is almost exclusively white. This racial stratification, and its statistical measure, changes the perspective many Americans have of inequality. First, this paper proposes to examine the extent of the conjoined nature of race and class in today's United-States. Then, it analyses the strategic dilemma of the Democratic Party in response to the advent of this white aristocracy. The party is strongly divided over the lessons to be drawn from 2016. Yet, it is pushed, almost reluctantly, toward some form of intersectionality by powerful electoral constraints.
- Obama et le Affordable Care Act : un nouveau discours pour une nouvelle approche politique - Lea Stephan p. 83-128 Cet article propose une analyse du discours de Barack Obama concernant la politique de santé et les politiques sociales. L'analyse met en avant une nouvelle approche discursive centrée sur l'union par intérêt économique des différentes populations raciales des classes moyenne et ouvrière en puisant dans une rhétorique de transcendance raciale et de populisme économique. Le discours d'Obama est une réponse méticuleuse au discours conservateur et néolibéral (qui favorise la division raciale et le désengagement de l'État) afin de créer un nouvel environnement discursif favorable à la réforme de santé. Il est ensuite montré comment l'approche idéologique d'Obama se reflète dans le Affordable Care Act.This paper proposes an analysis of Barack Obama's discourse regarding health and social policies as a new discursive approach that emphasizes unity through shared economic interests of the different racial populations of the working and middle classes by drawing on a rhetoric of racial transcendence and economic populism. This analysis particularly highlights Obama's answer to conservative and neoliberal discourse, which triggers racial divisiveness and advocates less government intervention, in order to create a new discursive environment more suited for health care reform. Finally, it is shown how this ideology is reflected in the Affordable Care Act.
- La question raciale au cœur de l'activisme étudiant sur les campus américains - Clémentine Berthélémy p. 129-152 L'un des traits caractéristiques des universités américaines est sans contredit leur caractère microcosmique. Ces « sociétés en miniature » ont souvent constitué un terrain fertile pour le développement de l'activisme estudiantin. Cet article propose d'apporter un éclairage sur le visage actuel de l'engagement estudiantin qui, depuis une dizaine d'années déjà, fait un retour remarqué. Cet article entend d'une part mettre en lumière la place centrale qu'occupe la question raciale dans les mobilisations étudiantes et d'autre part discuter la façon dont l'activisme se développe et se manifeste sur les campus et dans quelle mesure il peut/doit être perçu comme le signe que le seuil de tolérance du degré d'inégalité a été aujourd'hui atteint.One of the defining characteristics of American universities and colleges is undoubtedly their microcosmic aspect. These “societies in miniature” have often provided a breeding ground for the development of student activism. This article seeks to shed light on the face of student involvement today which has been making a remarkable comeback for the past ten years. This article intends to highlight the central place which racial issues occupy in student mobilization, discuss how activism emerges and takes form on campuses as well as determine to what extent it may/must be considered as a signal proving that the tolerance threshold regarding inequality has now been exceeded.
- Entrechoquements axiologiques et sentiment de « frustration relative » : l'expression publique de la colère anti-médias des partisans de Donald J. Trump pendant la campagne présidentielle de 2016 - Sébastien Mort p. 153-186 Depuis les campagnes présidentielles de 2016, l'hostilité envers les médias d'information grand public s'est très nettement intensifiée. Aiguillonnés par leur candidat, les partisans de Trump expriment publiquement leur colère envers les journalistes de ces médias, notamment en marge des rassemblements publics du candidat. En mobilisant les travaux sur le lien entre statut social et expression publique de la colère, la présente étude suggère que, dans le cas des partisans de Trump, l'impression de « frustration relative » (relative deprivation) par rapport à d'autres groupes sociaux préside à l'expression publique de la colère. L'influence des médias d'information sur la façon dont les soutiens de Trump évaluent leur « statut social subjectif » s'explique par les entrechoquements axiologiques entre ces derniers et les journalistes.Since the 2016 presidential campaigns, hostility towards the mainstream news media has significantly intensified. Egged on by their candidate, Trump supporters have publicly expressed their anger towards mainstream journalists, most notably during rallies. Relying on work conducted on the link between social status and public expression of anger, this study argues that, in the case of Trump supporters, relative deprivation with respect to other social groups account for public expression of antimedia anger. Axiological clashes between mainstream journalists and Trump supporters account for the latter's negative assessment of their “subjective social status.”
Varia
- Les périls de l'idéologie : la droite américaine et le dérèglement climatique - Jean-Daniel Collomb p. 187-213 Cet article tente de mettre en lumière les ressorts idéologiques de l'hostilité du parti républicain à des politiques volontaristes en matière climatique, tout en plaçant l'argumentaire déployé par les think tanks conservateurs et libertariens qui alimentent ce parti en idées dans le contexte de la forte polarisation de la vie politique américaine. Malgré l'existence de voix dissidentes au sein des mouvements conservateurs et libertarien, l'hostilité à l'égard de l'État régulateur et la volonté de préserver totalement la souveraineté nationale américaine incitent la grande majorité des élus républicains à refuser tout compromis sur la question climatique. L'article permet de saisir l'argumentaire climato-sceptique dans sa complexité et de mesurer son importance dans un contexte où les deux grands partis coopèrent de plus en plus rarement et peuvent faire usage de nombreux mécanismes d'obstruction.This article sheds light on the ideological reasons for the Republicans' refusal to take decisive action about climate change. Arguments by conservative and libertarian think tanks, which give the GOP ideas and policy proposals, are placed in the larger context of the high polarization of current US politics. A handful of dissenting voices have been trying to make themselves heard within the libertarian and conservative movements, while most Republican officials remain staunchly committed to US national sovereignty and openly hostile to the regulatory state, hence refusing adamantly any compromise on climate policy. This article highlights the ideological complexities of climate skepticism while demonstrating its place within the context of a political scene where Democrats and Republicans cooperate less and less frequently and where opportunities for obstruction abound.
- Les périls de l'idéologie : la droite américaine et le dérèglement climatique - Jean-Daniel Collomb p. 187-213
Point de vue
- Can President Donald Trump Destroy the Liberal International Order? - John E. Rielly p. 215-227
Compte-rendu d'ouvrages
- Compte-rendu d'ouvrages - Alix Meyer p. 229-242