Contenu du sommaire : Passing
Revue | Genèses |
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Numéro | no 114, 2019/1 |
Titre du numéro | Passing |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Alf Lüdtke, in memoriam - p. 3-4
Dossier - Passing
- Le passing : un concept pour penser les mobilités sociales - Bastien Bosa, Julie Pagis, Benoît Trépied p. 5-9
- La famille Healy en Amérique : Étude d'un cas de passing racial - James M. O'Toole p. 10-31 À partir de sources d'archives originales, cet article reconstitue l'histoire d'une famille américaine du XIXe siècle ayant franchi la « ligne de couleur » qui séparait les Noirs et les Blancs. Grâce à l'aide de supérieurs hiérarchiques bienveillants et d'institutions de médiation, en particulier l'Église catholique romaine, huit frères et sœurs ont réussi à « passer » avec succès. Leur expérience permet de mettre à l'épreuve les théories contemporaines sur la nature de la race.Using original archival sources, this article reconstructs the history of a nineteenth-century family in the United States who crossed the “color line” between black and white. With the help of sympathetic patrons and mediating institutions, particularly the Roman Catholic Church, eight brothers and sisters successfully “passed.” Their experience challenges contemporary theories of the nature of race.
- L'aménagement du placard : Rapports sociaux et invisibilité chez les hommes et les femmes trans' en France - Emmanuel Beaubatie p. 32-52 Au cours d'un changement de sexe, les trans' en viennent généralement à passer pour des individus vivant dans leur sexe de destination depuis toujours. La littérature scientifique tend à homogénéiser les expériences du passing au sein de cette population et pourtant, le placard peut être aménagé de bien des façons. Fondé sur une enquête par entretiens et sur l'analyse secondaire d'une enquête quantitative, cet article avance que les rapports subjectifs à l'invisibilité et les enjeux sociaux de cette dernière diffèrent selon le sexe, le milieu d'origine, la position sociale, ou encore les modalités de racisation.During a sex change, trans persons usually end up passing as individuals who have always been living in their new sex category. The scientific literature tends to homogenize the experiences of passing among this population, but the closet can be arranged in many different ways. Drawing from a qualitative survey and from the secondary analysis of a quantitative survey, this article demonstrates that the subjective relationships to invisibility – and its social necessity – differ according to sex, social background, social position, and the modalities of racialization.
- Se faire ouvrier·e : L'établissement, un cas de reverse passing ? - Julie Pagis, Karel Yon p. 53-74 Cet article recourt à la notion de passing pour analyser les pratiques de transgression des frontières de classe menées par les « établi·es » dans les années 68. Dans un premier temps sont distinguées les dispositions incorporées, les conditions sociales et l'offre politique dont procède cette entreprise de déclassement social volontaire, ou reverse passing. Une deuxième partie décrit les différentes épreuves et jeux de regards à travers lesquels se joue la réussite de l'établissement. En insistant sur le travail performatif nécessaire au « passer pour ouvrier », le cadre théorique du passing permet d'insister sur la dimension processuelle et relationnelle de l'établissement. En retour, celui-ci éclaire la pluralité des usages du passing, entre acceptation et contestation de l'ordre établi, qu'il soit social, sexuel, racial ou de genre.This article uses the notion of passing to analyze the practices of class boundary transgression by the “établi·es” during and following 1968. First, we document the incorporated dispositions, the social conditions and the political context that made this voluntary social demotion, or reverse passing, possible. Then, we describe the various challenges and social representations that are involved in achieving a successful établissement. By emphasizing the performative effort necessary to “pass as a worker”, the theoretical framework of passing allows us to underline the procedural and relational dimensions of établissement. In return, the latter sheds light on the multiple uses behind passing, ranging from acceptance to contestation of the established order, whether it be social, sexual, racial or gender-based.
- Une infantilisation inévitable ? : La réversibilité de l'âge chez les jeunes exilés en France - Adeline Perrot p. 75-95 L'article met en évidence le rapport contradictoire que vivent les jeunes exilés entre la décélération produite par le trajet migratoire, les dispositifs de jugement et d'accompagnement à l'aide sociale à l'enfance sur le territoire français, et l'enjeu d'accélération du parcours institutionnel aux fins de remplir, en urgence, tous les critères de régularisation. La mobilité statutaire (en particulier le rajeunir) constitue alors une ressource pour faire face à l'avancée en âge – biologique et chronologique – liée aux ralentissements et au déploiement de moyens d'identification. Ce phénomène de réversibilité, non définitif ni même acquis, s'opère sur les plans temporels et spatiaux selon des processus de passage entre les figures « adulte » et « enfant » (majorisation et minorisation).This article highlights the contradictory relationship experienced by young exiles between the deceleration caused by the migratory journey, judicial mechanisms and the intervention of child social services upon reaching French soil, and the acceleration of the institutional process required to meet all regularization criteria as quickly as possible. Statutory mobility (particularly rejuvenation) is therefore a means to counter the advance of time- biological and chronological- linked to the deceleration and the implementation of identification processes. This phenomenon of reversibility is neither definitive nor a given, and takes place at temporal and spatial levels in accordance with the processes of passing between the status of the “adult” and status of the “child” (becoming a “minor” or an “adult”).
Point critique
- Des Noirs qui passent pour Blancs ? : Enjeux analytiques et méthodologiques des enquêtes sur le passing aux États-Unis - Benoît Trépied p. 96-116 Cet article présente et questionne l'historiographie américaine sur le racial passing, ce processus par lequel un individu initialement rattaché à une catégorie raciale change clandestinement d'affiliation et « passe pour » membre d'un autre groupe racial. La lecture croisée de trois ouvrages récents (A Chosen Exile d'Allyson Hobbs, L'Esclave qui devint millionnaire de Karl Jacoby et Passing Strange de Martha Sandweis) soulève en particulier trois axes de réflexion. Le premier traite des liens entre passing et mobilités sociales ; le deuxième analyse les moyens et les effets du passing sur l'intimité du « passeur » ; enfin le troisième met en lumière les enjeux méthodologiques soulevés par le dévoilement d'un phénomène social par définition caché.This article outlines and questions American historiography regarding racial passing, the process by which an individual who initially belongs to a given racial category clandestinely changes affiliation and “passes” for a member of another racial group. The comparative analysis of three recent works (A Chosen Exile by Allyson Hobbs, The Strange Career of William Ellis by Karl Jacoby and Passing Strange by Martha Sandweis) raises three principal axes of our reflection. The first part examines the links between passing and social mobility ; the second analyzes the means and effects of passing on the private life of the “passer” ; finally, the third section highlights the methodological challenges posed by the revelation of a social phenomenon that is, by definition, hidden.
- Des Noirs qui passent pour Blancs ? : Enjeux analytiques et méthodologiques des enquêtes sur le passing aux États-Unis - Benoît Trépied p. 96-116
Fenêtre
- Que sont les SSU devenus ? : Les sondages « sortie des urnes » en France et aux États-Unis - Christine Pina p. 117-133 Le terme « sondages », utilisé pour nommer un type d'enquête par questionnaire réalisée auprès d'un échantillon de population, regroupe toutefois des techniques fort différentes. En recherchant les causes d'une fortune dissemblable des sondages « sortie des urnes » dans deux pays, cet article explore la circulation et l'importation « ratée » d'un procédé développé à partir du milieu des années 1960 aux États-Unis et utilisé en France à partir de 1983.The term “polls” refers to a survey based on a questionnaire distributed to a sample of the population ; however, this generic definition covers many different methods. In looking for the causes for the contrasting fates of exit polls in two countries, this article explores the diffusion and the “failed” importation of a process that was developed in the United States in the mid- 1960s and which was first employed in France in 1983.
- Que sont les SSU devenus ? : Les sondages « sortie des urnes » en France et aux États-Unis - Christine Pina p. 117-133
Controverse
- Care, genre et migration : Pour une sociologie contextualisée des travailleuses domestiques dans la mondialisation - Christelle Avril, Marie Cartier p. 134-152 Cet article montre que, novatrice du point de vue d'une sociologie des sentiments, la thèse d'Arlie Hochschild selon laquelle les pays développés organiseraient la fuite du care des pays en développement à travers la migration des femmes contribue à diffuser une vision erronée de la condition domestique dans la mondialisation. Il tire le bilan de critiques féministes peu visibles en France émanant des spécialistes des migrations et des domestic workers, et s'appuie sur les enquêtes empiriques des auteures pour esquisser de nouvelles pistes de recherche pour une sociologie contextualisée des travailleuses domestiques dans la mondialisation.This article demonstrates that, while innovative from the point of view of a sociology of sentiments, Arlie Hochschild's thesis, according to which developed countries organize a care drain from developing countries through the migration of women, contributes to the diffusion of a false perception of the domestic condition in the context of globalization. It reviews the impacts of feminist critiques, which are not highly visible in France, proposed by specialists of migration and domestic workers. It builds on empirical investigations conducted by the authors in order to suggest new avenues for research for a contextualized sociology of domestic workers within the framework of globalization.
- Care, genre et migration : Pour une sociologie contextualisée des travailleuses domestiques dans la mondialisation - Christelle Avril, Marie Cartier p. 134-152
Lectures
- Transgenre et transracial, ou les difficultés d'une analogie - Abdellali Hajjat p. 153-159
- Des sciences sociales dans le temps - Christian Topalov p. 160-169