Contenu du sommaire : Ce que signer veut dire

Revue Sociétés & Représentations Mir@bel
Numéro no 25, 2008
Titre du numéro Ce que signer veut dire
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Ce que signer veut dire

    • Présentation - Dominique Margairaz, Myriam Tsikounas p. 7-12 accès libre
    • La signature : du signe à l'acte - Béatrice Fraenkel p. 13-23 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Partant de la force transgressive de la signature exploitée par certains artistes contemporains, cet article propose une triple approche de l'acte de signer. D'un point de vue sémiotique, la signature est un signe d'identité et de validation forgé dans les chancelleries royales, qui condense la sémantique individualisante d'un nom propre et, comme signe autographe, la force de présence d'un indice. D'un point de vue diplomatique, elle s'insère au bas des actes, accompagnée, selon les époques et les lieux, de sceaux, de seings, dessinant un système d'actants juridiques hiérarchisés. C'est aussi un signe qui doit se comprendre au sein d'une agency élargie, impliquant la genèse des actes, leur fabrication et leur archivage. L'observation de pratiques actuelles convie à penser la performativité de l'acte de signer au niveau d'une théorie plus générale des actes d'écriture.
      Starting from the transgressive force of the signature used by some contemporary artists, we propose a triple approach to the act of signing. From a semiotic point of view, the signature is a sign of identity and validation, invented in the royal chanceries. It joins the particular semantism of a proper name and the force of presence of an index as an autographic sign. From a diplomatic point of view, the signature, the seal and the signum appear together under the texts, shaping a hierachized system of juridical actants. The signature is also a sign that should be understood inside a larger agency connected to the genesis of acts, their making and their archives. The observation of these practices today invites us to consider the performativity of the act of signing inside a general theory of the acts of writing.
  • Valeurs de la signature

    • La signature et l'existence juridique de l'œuvre - Marie Cornu p. 25-34 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La signature de l'œuvre vue sous l'angle juridique pose plusieurs séries de questions. D'une part, elle doit être rapportée à la naissance de l'œuvre. Quel effet s'attache à l'apposition d'une signature ? Si ce geste signale le plus souvent l'achèvement de l'œuvre, il ne signifie pas pour autant que l'auteur entend la divulguer, la communiquer au public. Achèvement, divulgation, ces deux moments de l'œuvre, même intimement liés, ne coïncident pas toujours. Et la divulgation, manifestation de la volonté de l'auteur, est déterminante dans le sort juridique de l'œuvre. La signature met aussi à l'épreuve la vérité de l'œuvre, le lien indéfectible de l'auteur à sa création. Lui-même ne peut le défaire. Le droit ne laisse guère de place à la fiction. Les liens signature/authenticité sont pourtant parfois troublés, en particulier dans la création contemporaine.
      The signing of a work of art considered under the legal angle raises several series of questions. First it must be associated with the birth of the piece. What effect is attached to signing ? If that act generally signals that the work is finished, it doesn't necessarily means that the author wishes to display it to the public. Finishing, displaying, these two moments, even intimately related, don't always coincide. And the fact of displaying,, as evidence of the author's will, is a determining factor in the legal status of the work. The signature also puts the truth of the work to the test, the indestructible link between the author and his creation, that not even he can undo. The law doesn't leave much room for fiction. However, the connections between signature and authenticity are sometimes clouded, particularly in contemporary creation.
    • La signature testamentaire - Yvonne Flour p. 35-46 accès libre
  • Signer pour..transformer un objet en œuvre d'art

    • La signature dans le tableau aux XVIIe et XVIIIe siècles : identité, réputation et marché de l'art - Charlotte Guichard p. 47-77 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Souvent associée à l'avènement du marché de l'art et à l'émergence d'une figure singulière et saturnienne de l'artiste, l'histoire de la signature dans le tableau reste pourtant mal connue. Cet article propose de poser les bases d'une réflexion générale sur les pratiques de la signature chez les peintres français de l'époque moderne. Tout d'abord, on verra que la signature ne s'oppose pas au monde de l'artisanat et appartient, bien au contraire, aux traditions corporatives anciennes des artisans d'art qui marquent leur production. Au XVIIIe siècle, le développement du marché et l'aura nouvelle du nom du peintre favorisent la diffusion de la signature dans les tableaux : forts de leur réputation, les peintres à la mode comme François Boucher ou Joseph Vernet utilisent leur nom pour valoriser leur production. La diffusion de la signature cursive liée au marché marque alors l'appauvrissement des formes de la signature. Si elle devient une convention dans l'espace pictural, la signature est aussi investie d'une signification politique et identitaire nouvelle au moment de la Révolution française, en particulier chez Jacques-Louis David, qui lui redonne une place centrale dans l'interprétation générale de l'œuvre. Les usages politiques du nom s'articulent, de manière exemplaire dans son œuvre, à la valeur économique de la signature et à une réflexion identitaire renouvelée.
      The painter's signature is often associated with the birth of the art market and the emergence of the romantic myth of the artist. But its history, both in terms of practices and representations, has never really been charted. In this article, I propose to sketch a general outline of the practices linked to artists signing their works in the 17th and 18th centuries. The painter's signature is not opposed to the world of craftsmanship, as often thought: on the contrary it is derived from the ancient tradition of guilds (goldsmiths, cabinet makers, engravers). In the 18th century, the birth of the art market and the new magic of the artist's name promoted the signature as a new convention in the pictorial space: fashionable painters, such as Joseph Vernet and François Boucher, used their names and signatures to give value to their productions. This spread of cursive signatures was accompanied by a simplification in the forms of signatures. At the time of the French Revolution, signatures became, as in the works of Jacques-Louis David, a site where social and political identities were constructed, which contributed to give them a central place in the general interpretation of the work of art.
    • La signature du peintre et sa caricature : l'exemple de Courbet - Bertrand Tillier p. 79-96 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dès ses premiers envois au Salon et jusqu'à la fin de sa carrière, le peintre Gustave Courbet (1819-1877) a retenu l'attention des caricaturistes qui ont moqué sa manière réaliste, ses sujets ruraux d'inspiration socialiste et son goût pour la vérité n'excluant pas des formes presque grotesques. La personnalité de l'artiste a aussi suscité un grand nombre de charges raillant son narcissisme immodéré et un peu ridicule. Entre caricature esthétique visant les tableaux et critique ad hominem malmenant leur auteur, les « caricatures de signatures » forment une catégorie particulière de ce corpus d'images irrespectueuses et signifiantes.
      From his first exhibitions until the end of his career, the painter Gustave Courbet (1819-1877) caught the attention of caricaturists who mocked his realistic manner, his rural subjects of socialist inspiration as well as his attraction for the truth that wasn't deterred by almost grotesque forms. The artist's personality also inspired many caricatures making fun of his immoderate and somewhat ridiculous narcissism. Between aesthetic caricatures directed at the paintings and ad hominen criticism slating their author, the “caricatures of signatures” are a particular category of this corpus of disrespectful and significant images.
    • La signature comme indicateur d'artification - Nathalie Heinich p. 97-106 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Faut-il une signature pour faire art, un signataire pour faire artiste ? Autrement dit, la signature est-elle un indicateur d'« artification » ? Cette question, posée à propos des différentes catégories de créateurs, sera étudiée à travers l'histoire de la peinture et de la sculpture, de l'art contemporain, de la photographie, du cinéma ainsi que du commissariat d'exposition. Il en ressort que la catégorisation artistique est indissociable d'une signature – quelles qu'en soient les formes – et que la présence d'une signature est un indice majeur d'accession d'une activité au rang d'art.
      Is signature necessary for an activity to be labelled “art”, for a producer to be categorized as an “artist”? In other words, does signature mean “artification”? Raised about several categories of creators, this question is addressed throughout the history of painting and sculpture, contemporary art, photography, cinema, as well as curating. The conclusion is that artistic categorization goes together with signature, whatever its forms; so that the presence of a signature is a major clue indicating that an activity has reached the status of art.
  • Signer pour..se transformer en œuvre d'art

    • Le rouge des Lumières. Signature de produit et signature de soi dans la France du XVIIIe siècle - Catherine Lanoë p. 107-117 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Dans la capitale des Lumières, la massification de la consommation des cosmétiques et l'avènement d'un marché de la beauté fortement concurrentiel favorisent, chez les usagers aussi bien que chez les fabricants, la montée en puissance du désir de faire reconnaître leur identité singulière. Le cas du fard rouge en délivre un exemple caractéristique. D'une part, il devient l'objet d'une stratégie nouvelle de conditionnement qui engage la qualité du produit et la réputation de son fabricant par la signature des articles. D'autre part, les producteurs ont soin de répondre aux attentes plurielles d'une clientèle socialement élargie, voire de les anticiper, en déclinant le rouge de toutes les manières, offrant ainsi la possibilité inédite de concevoir le visage tel l'espace d'une signature plus libre et plus individuelle de soi.
      In XVIIIth century Paris, the growth of cosmetics mass-consumption and the emergence of a highly competitive beauty market promoted - for users as well as producers - the desire to mark their singularity. The case of red makeup provides a perfect example. On one hand, it becomes the object of a new packaging strategy involving the quality of the product and the producer's reputation through the means of a signature on the items. On the other hand, producers are keen to answer, even to anticipate the various needs of a socially varied clientele, by marketing all kinds of rouges, thus offering people the new opportunity to see their face as a space for a more personal self signature.
    • Entre signature et biffure : du tatouage et du piercing aux scarifications - David Le Breton p. 119-133 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Piercing et tatouage sont des formes d'embellissement du corps. Ils sont choisis pour leur beauté, leur mise en valeur du visage ou du corps, leur touche d'originalité. À la fois objets privés et publics, ils sont destinés à l'appréciation des autres, même s'ils participent de l'intimité dans un monde où il importe d'attirer l'œil avec un signifiant socialement porteur. Ils incarnent une signature de soi sur la peau. À l'inverse, pour d'autres qui ne se reconnaissent pas dans une peau les enfermant dans une identité intolérable, les scarifications sont alors une biffure de soi.
      Piercings and tattoos are forms of embellishment of the body. They are chosen for their beauty, for the way they highlight a face or a body, for their touch of originality. Private and public objects at the same time, they are offered to public appreciation, even though they reveal some intimacy in a world where it is important to attract attention with something socially meaningful. They are the signature of the self on one's skin. On the other hand, for those who cannot recognize themselves in a skin that they feel imprisons them in an insufferable identity, scarification is more like a striking out of the self.
  • Signer pour..informer son lecteur

    • Écologies de la signature en science - David Pontille p. 135-156 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      Bien souvent, signer un article scientifique est considéré comme un geste semblable à celui qui vaut dans le monde littéraire : le chercheur est la personne qui formule une idée, réalise le travail, écrit et signe tout naturellement son texte. Les analyses de la signature en science restent attachées à cette conception individualiste, même face à des situations de cosignature : chaque signataire est conçu à la fois comme détenteur d'une parcelle du travail et comme pleinement responsable de la totalité de l'article. Ce texte examine des situations où la cosignature est la règle et spécifie différentes façons de signer à plusieurs. Il montre qu'une vision individualiste néglige le rôle décisif de l'écologie du travail. La signature est un acte qui s'articule à des configurations sociales, cognitives et matérielles de l'activité scientifique.
      Generally, scientific authorship is considered as something similar to the authorship of literature texts: the scientist is the person who formulates an idea, does the work, writes the paper and naturally signs it. Previous studies of scientific authorship endorse this individualistic conception, even in multiple authorship situations: each name listed in an article's byline is conceived both as a holder of a part of the work and as fully responsible for the entire text. This article examines situations that are characterized by large-scale multiauthorship and specifies different patterns of name ordering. It shows that an individualistic perspective strongly neglects the decisive role of the ecology of work. Authorship is an act associated with specific social, cognitive and material configurations of the scientific practice.*
    • Ces lettres démunies de signatures. Représentations et pratiques sociales de l'écriture anonyme fin de siècle - Philippe Artières p. 157-170 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La non-signature d'une lettre ne résulte pas seulement d'un oubli ; elle peut être volontaire et constituer en cela un acte aussi fort que celui de signer. Cette pratique de signature anonyme, bien connue s'agissant de l'imprimé, est aussi une forme de délinquance graphique. Au XXe siècle ces pratiques ont été au centre d'affaires comme celle d'Angele Laval à Tulle (1921) et associées durablement à la figure de l'hystérie, mais il existe tout un ordinaire de l'écriture anonyme qu'un service policier comme celui de la Brigade mondaine à Paris, à la fois, nourrit et agrège. L'analyse de ces archives met en évidence une autre figure du signataire anonyme comme citoyen de la société de contrôle.
      The absence of a signature in a letter is not necessarily an oversight ; it can be an act of will as meaningful as the act of signing. This practice of anonymous signature, common enough in printed texts, is also a form of graphic delinquency. In the 20th century it was at the heart of famous cases such as Angele Laval's in Tulle (1921) and durably associated with hysteria, but there is a more ordinary practice of anonymous writing which a police department, like the vice squad in Paris, both collects and combines. The analysis of these archives draws another portrait of the anonymous signer as a citizen of the society of control.
  • Lieux et Ressources

  • Regards croisés

  • Trames

    • Graffiti en péril ? - Jean-Claude Vimont p. 193-202 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La lente modernisation du parc carcéral français implique la désaffectation de nombreux établissements. En ces lieux, la mémoire des prisonniers a laissé des traces matérielles fragiles et quelque peu méprisées : les graffiti carcéraux. L'article présente l'intérêt de ces sources pour la compréhension des répressions politiques mais aussi pour une appréhension du quotidien pénitentiaire vécu par les détenus de droit commun. Mieux faire connaître les recherches entreprises par des anthropologues et des historiens devrait permettre de mieux préserver ces formes rudimentaires de messages.
      The slow modernization of the French prison infrastructure implies the closing down of a number of buildings. In these places, the memory of the inmates has left fragile and somewhat despised material traces : prison graffiti. The article presents the interest of these sources for the understanding of political repressions but also for the grasping of the penitenciary everyday life experienced by prisonners. To advertize the research carried out by anthropologists and historians should lead to better preserve these rudimentary messages.
  • Retours sur...

  • Actualités

  • Grand entretien

  • Hors-cadre

    • 1914-18 : guerre, chirurgie, image. Le Service de Santé et ses représentations dans la société militaire - Christine Debue-Barazer, Sébastien Perrolat p. 233-253 accès libre avec résumé avec résumé en anglais
      La guerre de 1914-18 s'inscrit dans un registre nouveau, tant du point de vue de la stratégie militaire que de l'armement utilisé. Pour rendre compte de cette guerre, la photographie, associée au cinéma, vient seconder puis supplanter la peinture et le dessin dans la représentation par l'image. Cet article se propose d'aborder les moments et les modalités d'adaptation de la médecine de guerre par le Service de Santé militaire, épisodes illustrés par une plongée dans le fonds photographique du musée du Service de Santé militaire du Val-de-Grâce.
      World War I sees the beginning of a new style, both in terms of military strategy and of weapons. To give accounts of that war, photography, associated with cinema, complements, then supplants painting and drawing in the representations by images. This article aims at studying the moments and the modes of adaptation of war medicine in the Military Health Department, through the photographic archives kept in the Val-de-Grâce museum of the military Health Department.