Contenu du sommaire : La gestion contemporaine des migrations en Turquie
Revue | Migrations société |
---|---|
Numéro | no 177, juillet-septembre 2019 |
Titre du numéro | La gestion contemporaine des migrations en Turquie |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Éditorial
- Tunisie, des migrants subsahariens toujours exclus du rêve démocratique - Vincent Geisser p. 3-18
La gestion contemporaine des migrations en Turquie coordonné par Elif Aksaz
- La Turquie, terre méconnue d'immigration - Elif Aksaz p. 19-33 Une interrogation publique a été simultanément formulée en Europe et en Turquie, source de coopérations et de tensions entre les États-nations, turc et européens : ceux qui « arrivent » en Turquie, les immigrés, vont-ils rester en Turquie ou déferler sur l'Europe ? Nombre de travaux de recherches consacrés à l'étude de l'immigration en Turquie qui s'appuient sur des enquêtes par questionnaires administrés auprès des immigrés se posent implicitement ou explicitement la question que se posent les États-nations : les immigrés vont-ils rester ou partir ? Or, plutôt que de chercher à trouver une réponse à cette question, il faut partir de celle-ci et de ses zones d'ombre. C'est ce que ce dossier thématique se propose de faire, à partir des enquêtes réalisées au sein de l'axe de recherche « Migrations et mobilités » de l'Institut français d'études anatoliennes (ifea) à Istanbul. Il vise à contribuer à un domaine de recherche relativement nouveau en Turquie – l'étude de l'immigration –, en éclairant les mécanismes d'enracinement généralement occultés des immigrés, qui échappent aux États-nations, et qui, paradoxalement, reposent sur les actions, ambivalentes, de ces derniers.
- De la « porte ouverte » aux menaces d'expulsion : la présence syrienne en Turquie - Didem Daniş p. 35-52 La Turquie est le pays qui compte le plus grand nombre de réfugiés syriens sur son sol (3,6 millions en 2019). Cet article vise à analyser la présence syrienne dans le pays entre 2011 et aujourd'hui, en nous focalisant sur les évolutions de la politique migratoire mise en œuvre à leur égard. L'objectif de cette contribution est de mettre en lumière les instabilités de la politique d'accueil envers les Syriens et d'analyser la façon dont ces fluctuations produisent des inégalités et des injustices parmi cette population en exil.
- Contourner pour exister : les Syriens et les acteurs humanitaires face à la bureaucratie turque - Adrian Foucher, Elen Le Chêne p. 53-67 Cet article s'intéresse aux modalités de gouvernement dans le domaine migratoire en Turquie et à leurs usages par les gouvernés (exilés syriens et ong) depuis 2011. L'enjeu de cet article est double : identifier et présenter tout d'abord les règles formelles et informelles liées aux procédures bureaucratiques d'enregistrement des exilés syriens et des ong sur le territoire et les arrangements institutionnels localisés qui se mettent en place ; mettre en exergue, ensuite, les marges d'adaptation et de résistance que se ménagent les personnes concernées par la procédure d'enregistrement, en collant au plus près des parcours individuels observés sur le terrain. Nous montrerons de quelle manière les procédures d'enregistrement se caractérisent par une forte instabilité tandis que les tactiques déployées pour s'y soustraire sont rendues possibles par la labilité même des règles en vigueur. Par-delà ce contexte spécifique, la forte instabilité juridique, réglementaire et institutionnelle qui prévaut depuis 2011 traduit des traits plus structurels de l'action publique turque en matière de contrôle migratoire.
- La complexité de l'inscription de l'immigré dans sa nouvelle société : un regard croisé de la banlieue parisienne à Istanbul - Mustafa Poyraz p. 69-84 Cet article, issu d'enquêtes de terrain de longue durée en banlieue parisienne et à Istanbul, a pour objectif de démontrer l'importance de la configuration des espaces sociaux dans le processus d'inscription de l'immigré dans sa société d'accueil, durant lequel celui-ci développe différentes stratégies à la fois pour survivre et pour construire un avenir possible. À travers des observations et des entretiens effectués en région parisienne ainsi que dans les quartiers périphériques d'Istanbul, nous mettons l'accent, d'une part, sur la connexion ou la déconnexion des espaces sociaux qui encourage ou décourage le développement des relations humaines et, d'autre part, sur la question de la proximité, voire de l'interdépendance des facteurs liés à la pauvreté, à l'urbain et à l'immigration. Par voie de comparaison, cet article montre les effets de la rationalisation et de la fragmentation des espaces sociaux sur la concentration et le confinement des immigrés dans la banlieue parisienne, tout en montrant comment l'existence de lieux interconnectés dans les quartiers d'Istanbul facilite, malgré toutes les difficultés cumulées, l'inscription des immigrés nouvellement arrivés, notamment syriens, dans le tissu urbain stambouliote.
- La « réfugiérisation de la main-d'œuvre » agricole en Turquie : le cas des travailleurs saisonniers syriens - Deniz Pelek, Elif Aksaz p. 85-98 Cet article examine le phénomène de la « réfugiérisation de la main-d'œuvre » agricole à travers le cas des réfugiés syriens en Turquie à partir d'une recherche de terrain réalisée à Adana, Bursa, Mersin et Manisa entre 2013 et 2015. L'intensification depuis les années 1990 du processus de dissolution de l'agriculture a eu pour conséquence le départ des travailleurs familiaux locaux non rémunérés de leur village ; le besoin de main-d'œuvre saisonnière qui en a découlé est en grande partie satisfait aujourd'hui par les réfugiés syriens. En analysant cette circulation des travailleurs par le concept de « réfugiérisation de la main-d'œuvre », nous mettrons en lumière le double processus d'insertion économique et d'exclusion sociale que connaissent les réfugiés syriens dans le secteur agricole du marché du travail en Turquie. Nous verrons que ce phénomène impacte le mode de vie des Syriens, qui diffère considérablement de celui des autres travailleurs saisonniers agricoles.
- Ceux qui n'ont pas pu passer : les naufragés réengloutis du cimetière de Doğançay (Izmir) ou la naissance d'un « menu monument » de l'indicible - Jean-François Pérouse p. 99-112 La tragédie ininterrompue des naufrages en mer Égée des embarcations de fortune bondées de candidats au passage en Europe est ici envisagée à travers la formation et la transformation d'un impossible lieu de mémoire, la section des « sans-personne » au sein du vaste cimetière métropolitain de Doğançay à Izmir (Turquie). Depuis 2014, à l'initiative de la mairie métropolitaine d'Izmir, y est enterrée une partie des victimes innombrables de ces tentatives de passage. Une portion infime de ces naufragés parvient à sortir de l'anonymat pour devenir sujets de recueillement.
- L'exil de la jeunesse égyptienne à Istanbul - Nouran Gad p. 113-126 Istanbul, au cœur d'une région historiquement traversée par de multiples mouvements migratoires, symbolise le lieu de rencontre des migrations récentes en provenance des pays du Proche-Orient et du Moyen-Orient. De jeunes Égyptiens, largement touchés par les transitions politiques en Égypte depuis 2011, s'y sont récemment installés. Leurs trajectoires personnelles ainsi que leurs expériences migratoires sont marquées par les stigmates d'une multitude de questionnements identitaires réactivés par les « printemps arabes ». En choisissant de s'installer à Istanbul, qu'ils considèrent être « une ville musulmane moderne », cette génération de jeunes cherche à tourner la page d'une séquence récente. Cet article a pour objet principal de comprendre les particularités de cette migration et les rapports de diasporicités créés en exil. Il est alors question de la construction de nouveaux liens entre Égyptiens installés à Istanbul et des interactions entre ceux-ci et les populations d'autres nationalités qui sont présentes et plus visibles dans la ville.
- Les migrations de « footballeurs » africains en Turquie : rester ou continuer vers l'Europe ? : Les enjeux ambivalents de la Coupe d'Afrique d'Istanbul - Clément Lopez p. 127-140 Cet article propose une analyse sociologique du phénomène des migrations de « footballeurs » africains vers l'Europe à travers une enquête ethnographique menée à Istanbul. Il s'agit de comprendre comment des acteurs hétérogènes (agents de joueurs, escrocs « vendant du rêve », pouvoirs publics turcs…) contribuent à la fois à mettre en œuvre des moyens pour rejoindre l'Europe et les conditions de l'intégration de cette communauté de « footballeurs » africains à Istanbul. Pour analyser ces dynamiques migratoires, l'étude se focalise sur l'exemple d'un tournoi de football local qui met en scène ces acteurs dont les interactions produisent des logiques paradoxales.
- Bibliographie sélective - p. 141-144
- La Turquie, terre méconnue d'immigration - Elif Aksaz p. 19-33
Varia
- La migration des Turcs à Chypre du Nord après 1974 : de l'identification à la différenciation ? - Julie Alev Dilmaç p. 145-166 Le présent article a pour objet de cerner les raisons économiques et sociales qui ont motivé la migration des Turcs à Chypre à partir de 1975. Outre les nombreux avantages que ce déplacement offrait aux ressortissants de Turquie, cette migration représentait aussi un enjeu important pour la société d'accueil, et notamment sur les plans politique, économique et démographique. Il sera ici question non seulement de décrire les caractéristiques de ces flux migratoires mais aussi de cerner l'accueil qui est réservé aux nouveaux arrivants par les populations autochtones : nous verrons ainsi que l'attribution de la citoyenneté aux migrants turcs est loin d'avoir permis l'acceptation inconditionnelle de ces derniers dans la société chypriote.
- La migration des Turcs à Chypre du Nord après 1974 : de l'identification à la différenciation ? - Julie Alev Dilmaç p. 145-166
Note de lecture
- Note de lecture - p. 167-170
Nouveautés documentaires de CIEMI
- Nouveautés documentaires de CIEMI - p. 171