Contenu du sommaire : L'intelligence artificielle

L'efficacité spectaculaire que l'intelligence artificielle (ia) a acquise en fait un enjeu majeur pour la société, qu'elle transformera rapidement. Mais il reste difficile de prédire la profondeur et la vitesse des bouleversements à venir : si l'ambition des experts a évolué en matière de technologie et de stratégie, le monde politique doit s'en emparer avec détermination. La sagesse est d'observer et de favoriser les expérimentations, de former les jeunes et de familiariser l'ensemble de la population avec les nouveaux enjeux. L'Europe, dans la nouvelle guerre froide opposant États-Unis et Chine, doit faire valoir ses atouts, en premier lieu la qualité de sa formation et de sa recherche, souvent méconnues. Tout se jouera sur le développement d'actions audacieuses, sur le dialogue et la concertation qui se mettent en place, notamment au sein du couple franco-allemand, et plus généralement sur l'intégration des expertises européennes, très diverses et encore trop cloisonnées.

Il s'agit dans cet article d'exposer les traits caractéristiques fondamentaux du projet transhumaniste, de le distinguer soigneusement du posthumanisme, qui repose sur l'hypothèse de la possibilité de parvenir un jour à une intelligence artificielle forte, puis de discuter, en admettant que cela soit possible, des avantages éventuels que pourrait avoir pour nous l'allongement de la vie.

Les récents succès de l'ia ont nourri un discours, souvent anxiogène, d'une obsolescence du travail humain. Si des acteurs divers ont intérêt à diffuser ce message, notre analyse d'informaticien et d'économiste, nécessairement spéculative, souligne les limites technologiques et sociales de l'intelligence artificielle. Nous renversons ainsi la problématique : l'ia couplée aux robots sera-t-elle suffisante pour permettre aux sociétés occidentales fermées à l'immigration de répondre aux défis du xxie siècle qui exigeront beaucoup de travail ?

L'article analyse les principaux enjeux de la transformation numérique sur les activités juridiques et sur les professionnels du droit. Il s'agit à la fois de comprendre les effets sur la pratique juridique du fait de l'émergence d'une large gamme de nouveaux services et de réfléchir aux conditions dans lesquelles ces nouveaux outils doivent être utilisés, s'agissant notamment de la collecte et du traitement des données judiciaires. L'intelligence artificielle est un outil à la disposition des juristes, qui doivent se l'approprier d'une manière responsable.

Alors que se multiplient les travaux scientifiques consacrés au « droit des robots » émerge une interrogation persistante, alimentée par les expériences récentes des roboticiens : les robots peuvent-ils devenir trop conscients d'eux-mêmes, au point de nuire à la société et de rendre le droit commun obsolète ? Envisager les risques éthiques et juridiques associés au développement d'une « conscience » du robot suppose de déterminer la capacité de ses concepteurs à développer l'intelligence artificielle au-delà du seuil de « Singularité technologique ».

Le terme « intelligence artificielle » renvoie au moins à trois choses bien distinctes : une discipline scientifique, les applications de cette discipline, et les craintes de voir une machine prendre son essor de façon indépendante de nous. Nous montrons ici que seules les applications nécessitent d'être contenues et que cela passe par une réflexion et une éthique permanentes.

L'intelligence artificielle est à l'origine d'une nouvelle révolution dans la gestion des affaires militaires, de la prise de décision à l'exécution des actions, dans les chaînes de production et de maintenance des équipements comme dans les circuits opérationnels. Le passage à une ia forte, qui suppose apprentissage profond des machines et algorithmes sophistiqués, est cependant inscrit dans un avenir certain. Les questions éthiques, militaires, financières devront être posées. La France possède d'indéniables atouts ; cependant, l'effort à accomplir pour rester dans la course face aux États-Unis et à la Chine ne peut-être qu'européen. L'ia est le nouveau paradigme des conflits du xxie siècle et de la guerre augmentée.

Si le règlement général sur la protection des données (rgpd) s'applique déjà aux algorithmes afin de garantir un haut niveau de protection de la vie privée, le développement d'algorithmes apprenants, toujours plus autonomes, suppose de l'adapter. Plus de transparence et d'intelligibilité dans le mode de fonctionnement de l'algorithme, la garantie que les données utilisées ne sont pas biaisées, que son fonctionnement est loyal et non discriminant, et enfin que son rôle reste limité à une aide à la décision, sans remplacer l'être humain, qui doit toujours pouvoir garder la main : c'est à quoi il faut répondre pour que les progrès attendus de l'ia ne se fassent au détriment des valeurs éthiques portées par le droit de l'Union européenne et la législation française.

L'école, en tant que technologie de transmission de l'intelligence, est d'ores et déjà une technologie dépassée. Sa modernisation accélérée sous l'effet des technologies numériques constituera en réalité les derniers feux d'une institution vouée à prendre place dans l'histoire au rayon des curiosités du passé, fondées sur une science approximative, au même titre que les sanatoriums. À partir de 2035, l'éducation deviendra une « branche de la médecine », utilisant les immenses ressources des neurosciences pour personnaliser d'abord la transmission et optimiser ensuite bioélectroniquement l'intelligence. Ce sera la seule solution pour éviter un apartheid intellectuel dans un monde rendu ultra-compétitif par l'ia.

Que l'on conçoive l'intelligence artificielle comme une innovation incrémentale ou une technologie de rupture, il ne fait aucun doute qu'elle va durablement transformer les entreprises et les structures de marché. Loin de consacrer nécessairement la suprématie des géants technologiques américains et chinois actuels, l'ia est porteuse de nouvelles opportunités pour les entreprises qui sauront les saisir. Si l'Europe prend rapidement la mesure de ce qui est en train de se jouer, l'avènement de l'ia pourrait constituer une opportunité de combler le retard accumulé sur les États-Unis et la Chine en matière de développement technologique.

Les perspectives ouvertes par l'intelligence artificielle, en particulier sur son versant économique et militaire, ont rejoint les ambitions internationales de certains pays et précipité la naissance d'une nouvelle compétition. L'antagonisme sino-américain se structure désormais autour de ce répertoire de techniques, suivant des stratégies distinctes : un modèle dirigiste, fondé sur un complexe techno-partidaire, côté chinois, face au modèle néolibéral américain, qui institue la primauté et l'autonomie d'action des grandes firmes numériques.