Contenu du sommaire : Classe !

Revue Mouvements Mir@bel
Numéro no 100, hiver 2019
Titre du numéro Classe !
Texte intégral en ligne Accessible sur l'internet
  • Communiqué de la revue accès libre
  • Classe !

    • Éditorial - Jean-Paul Gaudillière, Irène Jami, Stéphane Le Lay, Olivier Roueff, Patrick Simon, Julien Talpin p. 7-11 accès libre
    • Les Gilets jaunes une histoire de classe ? - Ludivine Bantigny, Samuel Hayat, Jean-Paul Gaudillière p. 12-23 accès libre avec résumé
      Peuple ou classe ? Que nous dit l'événement Gilets jaunes sur ces manières très différentes de penser la relation entre statut socio-économique, constitution des identités politiques et mobilisations ? Parce que les mouvements populaires du passé ont été, pour les Gilets jaunes tout autant que pour leurs observateur.es, des références essentielles, nous avons demandé à Ludivine Bantigny et Samuel Hayat de revenir sur leur vision du mouvement et la façon dont on y fait classe.
    • Quand les quartiers populaires investissent le mouvement des Gilets jaunes : Table ronde avec des militants de Pantin - Marie-Hélène Bacqué p. 24-33 accès libre avec résumé
      Beaucoup d'observateur·rices se sont interrogé·es sur « l'absence des jeunes des quartiers populaires » dans le mouvement des Gilets jaunes, la catégorie des « jeunes » renvoyant de fait à des populations racisées. Pour autant, le mouvement a bien existé dans les banlieues populaires, sous des formes sans doute spécifiques et ne regroupant pas les populations les plus précaires ou stigmatisées.
    • Construire une expérience politique commune. Comment le Comité Adama a rejoint le mouvement des Gilets jaunes - Youcef Brakni p. 34-42 accès libre avec résumé
      Si certains ont pointé l'absence des habitant·es des quartiers populaires du mouvement des Gilets jaunes, des collectifs anti-racistes s'y sont investis avec ferveur. Youcef Brakni, un des animateur·rices du Comité Justice et Vérité pour Adama, revient sur l'engagement de ce groupe au sein du mouvement social, les difficultés rencontrées et les perspectives en termes de convergence avec les forces populaires et la gauche plus largement. Ce faisant, c'est la question de l'unification des classes populaires qui est en jeu, celle-ci ne pouvant à ses yeux que reposer sur une articulation des spécificités, de classe et de race.
    • « Chercher une définition sociologique de l'élite et du peuple dans les nouveaux mouvements sociaux revient à trahir le populisme qui leur est commun » - Federico Tarragoni, Jean-Paul Gaudillière p. 43-54 accès libre avec résumé
      Populistes les Gilets jaunes ? Au-delà du stigmate, le terme est aussi une manière de parler de l'hétérogénéité sociale du mouvement, de ses discours et revendications prenant pour cible la faillite de la représentation politique. Partant de l'histoire des mouvements populistes, en particulier aux États-Unis, Federico Tarragoni explique pourquoi, à son avis, le mouvement des Gilets jaunes n'est pas engagé dans la construction d'une nouvelle identité de classe mais dans l'utopie d'une organisation du peuple par la radicalisation et la refondation de la démocratie.
    • Les Gilets jaunes vus du Maroc - Max Rousseau p. 55-56 accès libre
    • Un soulèvement de toutes les couleurs – notes sur les Gilets jaunes - Stefan Jonsson p. 57-58 accès libre
    • Le forcené du boulot - Didier Daeninckx p. 59-64 accès libre avec résumé
      Didier Daeninckx est considéré comme l'un des chefs de file du néo-polar français, caractérisé, dans le sillage de Jean-Patrick Manchette, par l'avènement d'un roman noir profondément critique, réaliste et engagé. Il s'illustre dès son premier roman Mort au premier tour (1977, éditions du Masque), puis le très culte Meurtre pour mémoire (1983, Série Noire), par de nombreux récits – romans policiers, nouvelles, essais – dénonçant différents versants de la domination de classe. Il a reçu de nombreuses distinctions dont le prix Paul Féval du roman populaire pour l'ensemble de son œuvre. Puisant à la source d'une documentation historique toujours précise et détaillée, il place au cœur de ses fictions des thématiques sociales et politiques à l'actualité brûlante, n'hésitant pas à s'impliquer dans des polémiques. Il a, au cours de sa vie, exercé différents métiers dont celui d'imprimeur.Collaborateur de longue date de Mouvements, il revient avec une nouvelle où dans une utopie du futur, la réappropriation des moyens de production côtoie des chômeur·ses, quelques Gilets jaunes... et une imprimerie.1
    • Steppe, Acte 1 - Ian Manook p. 65-67 accès libre avec résumé
      Depuis le succès de son premier roman policier Yeruldelgger, publié en 2013 et dont l'action se déroule en Mongolie, suivi en 2015 d'un second opus Les Temps sauvages (éditions Albin Michel), Ian Manook s'est imposé comme un peintre majeur des dérives violentes et totalitaires de nos sociétés contemporaines. Il y dénonce dans une narration aussi implacable que lyrique l'exploitation des plus pauvres, la corruption, les abus du pouvoir et de l'argent qui accompagnent toujours l'oppression et l'asservissement des peuples.Pour le centième numéro de Mouvements dédié à la question des classes sociales, il nous fait don d'une nouvelle originale où sont mis·es en scène des Gilets jaunes, vu·es depuis la Mongolie.
    • Gilles et John - Jean-Hugues Oppel p. 68-69 accès libre avec résumé
      Héritier et contributeur du néo-polar français, Jean-Hugues Oppel est l'auteur de nombreux romans noirs, parus notamment aux éditions Rivage, où la satire sociale se teinte souvent d'iconoclastie, le rapprochant du pastiche.Il porte sur les rouages du pouvoir et les dérives mercantiles des sociétés modernes un regard féroce et sans concession, toujours profondément empreint d'humanité. Il a collaboré à Mouvements à différentes reprises et nous livre, à l'occasion du numéro cent, une nouvelle où il dresse un tableau de son cru, plutôt sombre, de la situation sociale actuelle.
    • Décrire la structure de classe. Pour une approche marxiste élargie - Erik Olin Wright p. 71-81 accès libre avec résumé
      Auteur de très nombreux travaux sur les rapports de classe durant plus de quatre décennies, Erik Olin Wright (1947-2019) a renouvelé l'approche marxiste. Il a notamment cherché à prendre au sérieux les effets des transformations du capitalisme sur les structures de classe, en particulier la croissance des positions intermédiaires entre propriétaires capitalistes et travailleur·ses exploité·es, associées à des postes d'encadrement et à des fonctions d'expertise. Son œuvre reste mal connue en France – malgré l'écho rencontré par la traduction de son dernier ouvrage consacré aux « utopies réelles », qui propose des réponses au problème de la stratégie de transformation sociale2. La traduction par Ugo Palheta de Class Counts aux Éditions Amsterdam, annoncée pour 2020, devrait changer la donne. Elles nous font l'honneur de publier ici un extrait de l'introduction.
    • Les plombiers polonais et français, des frères ennemis ? Panorama des classes sociales en Europe - Cédric Hugrée, Étienne Penissat, Alexis Spire p. 82-88 accès libre avec résumé
      « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » Le capitalisme est né de la mondialisation et n'a jamais cessé de coloniser tous les recoins du monde par les échanges économiques. Pourtant, l'étude des rapports de classe demeure largement nationale, au mieux comparative d'un pays à l'autre. L'Europe n'échappe pas à ce constat. Pour contrebalancer cette représentation partielle des sociétés européennes, C. Hugrée, E. Pénissat et A. Spire ont rassemblé données et études pour une analyse inédite des rapports de classe à l'échelle du continent1, dont ils livrent ici un aperçu.
    • Au peloton, l'exécution ? - Sébastien Jousse p. 89-99 accès libre avec résumé
      Sébastien Jousse et Luc Joulé ont réalisé trois films documentaires consacrés à des situations et des expériences de travail industriel – Les réquisitions de Marseille, mesures provisoires (2004), Cheminots (2010) et C'est quoi ce travail ? (2015). S. Jousse retrace ici le fil des questionnements qui ont mené de l'un à l'autre, jusqu'à interroger l'intimité et la créativité des gestes de travail en collaboration avec les ouvrier·ères d'un site de PSA et un musicien, Nicolas Frize, alors en résidence dans l'usine.
    • Travail et intersectionnalité dans la pratique sociologique de spécialistes des classes populaires - Christelle Avril, Nicolas Jounin, Cédric Lomba, Olivier Masclet, Fanny Vincent p. 100-110 accès libre avec résumé
      Mouvements a interrogé des sociologues spécialistes des classes populaires et des travailleur·ses subalternes sur la manière dont elles et ils affrontent, dans leur pratique d'enquête, l'étude du travail et l'articulation de la classe et des autres rapports sociaux de pouvoir.
    • Penser les classes sociales à partir des marges de l'emploi - Jose-Angel Calderon p. 111-118 accès libre avec résumé
      Comment penser les classes sociales quand la relation salariale se déformalise, que les marchés du travail se fragmentent et que les organisations politiques et syndicales qui gravitaient autour se fragilisent ? Si le sentiment d'appartenance à une classe sociale a sans doute fléchi parmi les populations au bas de l'échelle sociale, peut-on penser encore, pour reprendre l'expression de Robert Castel, une « société de semblables » ? Et surtout, peut-on le faire sans passer par les catégories binaires propres à la société salariale (inclus-exclus, centre-marges, actifs-inactifs...) qui condamnent des franges entières de la population à une position de subalternité ? Quelle réponse peut être donnée à ces questions si l'on se place du point de vue de ceux et celles qui se situent aux marges de l'emploi ?
    • Syndicalisme, classes sociales et oppressions spécifiques - Christian Mahieux p. 119-126 accès libre avec résumé
      Christian Mahieux, syndicaliste cheminot qui a participé à la fondation de SUD-Rail en 1996, revient ici sur l'actualité de la lutte des classes et sur la nécessité, pour le syndicalisme, d'aménager des espaces de luttes autonomes et « non-mixtes » spécifiques aux différents fronts d'oppression.
    • « Partir de ce que les gens vivent ». Théorie de l'exploitation, imbrication des rapports sociaux et difficulté de la convergence des luttes - Christine Delphy, Irène Jami, Catherine Achin p. 127-134 accès libre avec résumé
      La centième livraison de Mouvements est aussi l'occasion de revenir sur ce que, depuis plus de vingt ans, la revue a publié et analysé, mais aussi sur ce qui lui a échappé. Théoricienne du féminisme matérialiste, Christine Delphy est l'auteure de travaux fondateurs analysant l'articulation des systèmes capitaliste, patriarcal et raciste afin de proposer une théorie générale de l'exploitation. Cofondatrice en 1977 de la revue Questions féministes (devenue en 1981 Nouvelles Questions féministes), Christine Delphy a plusieurs fois participé à la réflexion collective engagée par notre revue. Dans sa contribution de 2003 au dossier que Mouvements intitulait « Classes, exploitation : Totem ou Tabou ? » notamment, elle livrait une réflexion sur les angles morts de la théorie de la plus-value. Une quinzaine d'années après, comment réfléchir à l'imbrication des rapports de domination de classe, de genre et de race ?
    • Pourquoi il faut étudier le genre du capital - Céline Bessière, Sibylle Gollac p. 135-142 accès libre avec résumé
      Le patrimoine et le capital sont revenus au cœur de l'analyse des inégalités. Si les publications de Piketty sur le capital au XXIe siècle ont fortement contribué à ce retour, elles ont laissé de côté les inégalités de genre dans la constitution et la transmission du capital. C'est à ce point aveugle que s'attaquent Céline Bessière et Sibylle Gollac, nous rappelant que dans les familles bien dotées comme dans celles qui manquent de tout, les femmes sont toujours plus dépourvues que les hommes et que les analyses des inégalités de classe ne peuvent (plus) faire l'impasse sur les rapports de genre.
    • Bourgeoisie et politique, cet objet à la mode. Motifs de frustrations et raisons d'être optimiste - Kevin Geay p. 143-151 accès libre avec résumé
      Paru en 2003, le numéro 26 de la revue Mouvements s'ouvrait sur le constat suivant : « le vocable de classes sociales a disparu du glossaire savant de la description des sociétés développées autant que du discours politique ordinaire ». Succédait à l'éditorial un article dans lequel Louis Chauvel et Franz Shultheis déploraient le « refoulement de la notion de classes » et l'écroulement de la production livresque sur le sujet1.
    • Grandes écoles : ce que nous apprend la formation de la classe dirigeante - Roxane Dejours p. 152-161 accès libre avec résumé
      Les rapports sociaux de classe s'apprennent, y compris pour celles et ceux qui en profitent. Roxane Dejours analyse sous cet angle les sociabilités parascolaires d'étudiant·es qu'elle a suivi·es en classes préparatoires puis en grandes écoles. Elle montre que les fêtes et leurs excès, sciemment tolérés par les institutions, ne servent pas seulement à créer un esprit de corps mais aussi à apprendre les pratiques de sociabilité inhérentes à la condition dirigeante ainsi que les rapports de pouvoir qui les traversent, en particulier sexistes.
    • Classes supérieures et racialisation. Le cas des clubs de cadres et de dirigeants racialisés - Samina Mesgarzadeh p. 162-168 accès libre avec résumé
      La racialisation n'opère pas seulement au bas des classes sociales mais concerne aussi les classes supérieures. Si les cadres racialisé.es disposent de ressources pour en limiter les pénalités, ils doivent néanmoins composer avec les formes de disqualification associées à leurs origines, leur couleur de peau ou leur religion. Samina Mesgarzadeh montre ici les différents registres de gestion de la racialisation par des membres actif.ves de clubs de dirigeant.es et de cadres, illustrant l'intersection entre race et classe de façon inhabituelle et originale dans les milieux supérieurs.
    • L'antiracisme politique et la classe - Sihame Assbague, Wissam Xelka, Saïd Bouamama, Nacira Guénif, Maboula Soumahoro, Patrick Simon, Julien Talpin p. 169-187 accès libre avec résumé
      Il est fréquent de penser les dominations sous une forme hiérarchisée, les inégalités de classe étant supposées prédéterminer les autres. Cette tradition intellectuelle et politique a dû évoluer sous la critique du féminisme qui a réussi à pluraliser les modes de domination en ajoutant le genre à la classe. Mais la place de la race reste encore disputée, l'autonomie de la domination raciale étant toujours illégitime en France. Classe et race sont le plus souvent pensées en concurrence, comme s'il s'agissait de choisir un principe de hiérarchisation principal et un autre secondaire. Mouvements a réuni dans une table ronde des chercheur.ses et activistes dans le champ de l'antiracisme pour débattre de la place qu'occupe la classe dans leur approche des inégalités.
    • Écolo ou précaires ? La sobriété en actes dans le mouvement No TAV - Anahita Grisoni p. 188-197 accès libre avec résumé
      Précarisation ne rime pas toujours avec indifférence écologique. Les activistes italien.nes du mouvement NoTAV, hostiles à la construction de la ligne de train à grande vitesse Lyon-Turin, dont Anahita Grisoni analyse les trajectoires, en témoignent. Leur capital culturel, d'origine familiale, sociale et universitaire, leur fournit les armes pour faire de nécessité vertu : pour elles et eux, il faut faire de la sobriété un choix. Plus que l'appartenance commune à des classes moyennes italiennes vouées au « précariat », c'est l'expérience générationnelle qui pèse et oriente la façon dont se tissent les liens entre rapport à l'argent, expériences de vie alternatives et revendication d'un territoire qu'il s'agit de défendre contre les « grands projets inutiles ».
  • Itinéraire

    • « Penser le monde à nouveaux frais » - François Gèze, Marie-Hélène Bacqué p. 199-216 accès libre avec résumé
      Président-directeur général des Éditions La Découverte de 1982 à 2014, François Gèze a assuré les conditions éditoriales de l'existence et de la diffusion de Mouvements. C'est par le biais de son parcours militant, commencé en mai 68, et de sa participation aux luttes anti-impérialistes au Cedetim – et plus tard à l'association Algeria-Watch – qu'il est « tombé dans la marmite de l'édition », en l'occurrence celle qui portaient alors le nom de François Maspero. Son implication de longue date dans les organisations professionnelles répond à une préoccupation constante : anticiper la portée des mutations du monde de l'édition pour préserver l'existence d'une critique indépendante.